Monsieur Lazhar : les souvenirs d’Evelyne de la Chenelière

En 2002, la dramaturge écrivait la pièce Bashir Lazhar. Neuf ans plus tard, Philippe Falardeau l'adaptait dans le multicélébré Monsieur Lazhar, diffusé sur ICI Télé le 9 octobre, à 2 h.
Un immigrant algérien (joué avec une immense justesse par l'acteur et humoriste algérien Fellag) est engagé dans une école primaire pour remplacer une enseignante qui s’est donné la mort dans sa classe.
L’émotion est évidemment plus qu’au rendez-vous dans le film tiré par Philippe Falardeau de la pièce d’Evelyne de la Chenelière. Mais elle ne prend jamais le pas sur la profondeur et la réflexion que les thèmes (l’enfance, l’exil, la culpabilité) de cette œuvre savent susciter.
Un coup de maître, donc, qui a même abouti à une nomination à l’Oscar du meilleur film étranger en 2012.
Pour replonger dans l’univers de ce film singulier, nous avons demandé à Evelyne de la Chenelière de nous parler de quatre beaux souvenirs liés pour elle à toute cette aventure.

Vous souvenez-vous du moment où vous avez appris que Bashir Lazhar, votre pièce, allait devenir un film?
Évelyne de la Chenelière: Le moment précis où cela s’est concrétisé est un peu divisé. je me souviens que Philippe Falardeau, que je connaissais un peu, mais pas beaucoup, m’a appelée pour me dire qu’il désirait l’adapter, puis le processus ensuite s’est fait doucement, en différentes étapes. Mais je me rappelle que j’étais surprise lorsqu’il m’a appelée. Surprise et impressionnée de constater qu’une pièce prévue pour un acteur seul en scène puisse ainsi inspirer tout un paysage, une esthétique qui, au théâtre, était investie par l’imaginaire du spectateur.
Ce moment a aussi réaffirmé ma conviction que le théâtre peut être une source d’imaginaire et d’inspiration très forte.

Vous souvenez-vous du moment où vous avez appris que c’était Fellag qui allait interpréter Monsieur Lazhar?
E.D.L.C: Je m’en souviens très bien! J’étais en contact avec lui depuis plusieurs années.
Il avait fait une lecture publique de la pièce lors d’un festival en France, et je l’avais déjà vu sur scène. Je l’avais beaucoup aimé.
Il m’avait aussi écrit une lettre pour me dire à quel point ce rôle avait été important pour lui et sa carrière. Il voulait le créer au théâtre, mais pour 1001 raisons, ça n’a pas eu lieu. Alors, lorsque Philippe Falardeau a entamé le processus des auditions, je lui ai parlé de Fellag. Et lorsqu’il m’a dit qu’il lui donnait le rôle, ça m’a vraiment fait plaisir. C’était un peu comme si la boucle se bouclait.

Vous souvenez-vous du moment où vous avez vu le film?
E.D.L.C.: J’avais suivi les différentes versions du scénario et le processus d’assez près. J’avais l’impression de bien connaître l’objet.
Mais alors qu’il ne restait que quelques étapes, comme la colorisation, Philippe Falardeau m’a fait voir le film. Nous étions tous les deux, chez lui. Et j’ai été extrêmement émue.
J’étais étonnée de constater à quel point le film parlait aussi de son réalisateur. Il y a beaucoup de lui dans cet objet, il y a eu une vraie métabolisation. Ce qui, à mon avis, assure la souveraineté et la plénitude du film. On me l’a souvent demandé, mais ça ne m’a jamais tenté d’évoquer les différences entre la pièce et le film. Pour moi, chacun d’eux est un objet clair. Je suis convaincue que c’est le signe d’une bonne adaptation.

Un dernier petit souvenir : quel a été votre moment préféré dans toute cette aventure?
E.D.L.C.: Lorsque j’ai tourné ma petite apparition dans le film. C’est devenu une sorte de mise en abyme très émouvante pour moi. Je jouais la mère d’Alice dans une scène où elle remercie Bashir. Et j’avais l’impression d’à la fois remercier comme personnage, mais aussi comme auteure le personnage et Fellag. C’est assez fort comme souvenir.
Monsieur Lazhar, sur ICI Télé, lundi 9, à 2 h
La bande-annonce (source : YouTube)
