Vivaces (Rustic Oracle): le drame des femmes autochtones disparues

Un film fort et émouvant, à voir sur ICI Télé le vendredi 17 mars, à 23 h 05.
Quand tu es née, la première chose que j’ai ressentie, c’est une joie infinie. La deuxième, c’est la peur.
Son premier film, Le dep, s’aventurait avec intelligence et puissance du côté du polar pour mieux comprendre la réalité socioéconomique autochtone. Son deuxième, Vivaces, plonge dans le drame – beaucoup trop réel – des femmes autochtones disparues. De la suite dans les idées, Sonia Bonspille Boileau? Oui, mais pas seulement.

Une fiction aux accents de vérité
Si l’histoire de Vivaces – en 1996, une adolescente de 17 ans disparaît à Kanesatake; sa mère monoparentale, sa petite sœur et toute la communauté la cherchent – est fictive, elle reste inspirée de faits tragiquement réels.
De la police qui s’empresse d’évoquer une fugue, et ne procède à aucune fouille, aux médias qui ignorent l’affaire, le drame, filmé dans la communauté où la cinéaste a grandi, évoque bel et bien l’histoire de ces milliers de femmes disparues, longtemps dans une indifférence quasi généralisée.

Une jeune actrice bouleversante
Si bien sûr McKenzie Deer Robinson dans le rôle d’Heather ou Carmen Moore dans celui de la mère inquiète et déterminée à comprendre ce qui s’est passé restent crédibles et charismatiques, et si bien sûr la cinéaste a tenu à s’entourer d’une équipe principalement autochtone – comment ne pas comprendre cette volonté de filmer ce récit de l’intérieur
– ,
c’est bien la petite Lake Delisle qui emporte la mise, faisant passer ce personnage de petite fille de l’innocence à une gravité bouleversante, puisqu’elle est forcée de faire face à des enjeux qui la dépassent et la concernent intimement du même geste.

Un traitement juste et délicat
Sur un tel sujet, nombre de cinéastes auraient pu avoir la tentation d’aller vers le pathos, le spectaculaire, voire le racolage. C’est plutôt avec délicatesse et sensibilité que Bonspille Boileau l’aborde, aidée notamment par une direction photo lumineuse, une mise en scène cherchant davantage la poésie que le choc, et un regard foncièrement empathique posé sur cette cellule familiale complément chamboulée.
C’est une façon sensible et pertinente de rappeler que même si les femmes autochtones représentent 4 % de la population canadienne, elles constituent un quart des femmes disparues ou assassinées et la moitié des victimes du trafic humain.
Compléments:
Vivaces, à voir sur ICI Télé le 17 mars, à 23 h 05.
La bande-annonce (source : YouTube)
