Petit pays : la guerre à hauteur d’enfants

Une adaptation sensible du puissant roman de Gaël Faye
Dans les cours et les jardins noyés de soleil, les enfants jouent et rient avec insouciance, presque imperméables à cette marche du monde, toujours plus brutale chaque jour. Mais la haine et la violence ont ceci de pervers qu’elles plantent leurs graines dans les cœurs les plus purs et y poussent comme de la mauvaise herbe.
Nous sommes au Burundi, voisin du Rwanda, dans les années 90. C’est là que Gaby, un jeune garçon, vit heureusement avec sa mère rwandaise (Isabelle Kabano, émouvante) et son père (Jean-Paul Rouve, étonnant), un entrepreneur français. Oui, nous sommes des décennies plus tard, mais les traces de la colonisation sont encore vives. La domination a beau ne plus être officialisée, le processus démocratique a beau avoir été enclenché, les réflexes – et les préjugés – n’ont pas disparu.
Et c’est dans ce contexte pour le moins complexe qu’éclate la guerre. Celle qui entrera dans les livres d’Histoire, sans mention de la terreur bien réelle qu’elle distille dans les rues. La famille de Gaby, reflet d’une mixité qui fait peur à plusieurs et résiste bien mal à toutes ces pressions, pourra-t-elle y échapper?

Si la réalisation d’Éric Barbier (La promesse de l’aube) ne brille pas par sa subtilité ou sa retenue, reste que Petit pays touche droit au cœur. Car avant d’être ce film, ce récit est né sous la plume du surbrillant Gaêl Faye, inspiré par sa propre vie (il a quitté le Burundi à l’âge de 13 ans), matière forte d’un roman à l’humanité bouleversante. Et ceci, le film le comprend bien.
Dans ce climat où tout n’est que menace et crainte, empesé encore par un sens de la fatalité étouffant, Gaby, partagé entre ses deux cultures, mais aussi entre l’enfance et l’âge adulte, subit les délires d’un monde plus grand que lui.
Mais le récit refuse avec intelligence tout manichéisme pour plutôt observer, avec une grande émotion, les conséquences concrètes des situations géopolitiques les plus complexes sur les hommes et les femmes qui les vivent. Et sous les yeux de Gaby, formidablement interprété par Djibril Vancoppenolle (lumineux et intense, au milieu d’actrices et d’acteurs non professionnels toujours justes), c’est plus qu’un monde qui se désagrège, c’est toute sa vie.
Rarement, le mariage entre l’intime et le politique aura été si poignant, si nuancé, si paradoxalement solaire. Petit pays, grand destin.
La bande-annonce (source : YouTube)

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