3 questions à Léa Pool

La Cinémathèque québécoise consacre une rétrospective à la grande cinéaste, du 17 au 31 mai
Depuis plusieurs décennies, Léa Pool a imposé son nom parmi ceux des cinéastes qui comptent, même si à l’époque de ses débuts, s’imposer comme femme dans ce métier n’était pas chose aisée. Conceptrice d’une œuvre où l’identité et l’intimité sont creusées à travers des personnages féminins forts et complexes, elle est donc à l’honneur durant ce mois de mai à la Cinémathèque québécoise, où ses films seront présentés en sa présence, parmi lesquels les célébrés La femme de l’hôtel, Anne Trister, Emporte-moi et La passion d’Augustine.
Complément :
Nous avons rencontré Léa Pool.

La rétrospective s’appelle Figures mouvantes. Trouvez-vous que cela caractérise bien votre cinéma?
Léa Pool : Je crois que c’est un jeu de mots avec émouvant
, puisque l’on dit que mon cinéma en est un d’émotions, mais aussi mouvantes
parce que j’ai plusieurs cinématographies qui s’entremêlent : une ligne principale, plus proche de moi, intime et profondément personnelle, et des projets arrivés par le biais et qui complètent ou parfois vont à l’encontre d’un chemin que j’ai tracé, mais qui m’ont enrichie et ouverte à des choses que je n’aurais pas nécessairement abordées.
Mouvantesencore parce que mes personnages sont toujours en mouvement ou sont dans des moments changeants, de transformation, puisque j’ai l’espoir qu’on peut bouger de l’intérieur à cause de l’extérieur. J’ai toujours dit qu’on avançait uniquement lorsqu’on doit se remettre en question.
Aujourd’hui, on se préoccupe beaucoup de la représentation des femmes devant et derrière la caméra. Vous êtes une pionnière de cet enjeu. Êtes-vous à l’aise avec cela, et trouvez-vous qu’on évolue dans le bon sens?
L.P. : Je n’aime pas les catégories en général. Lesbienne, féministe, pionnière, oui, mais tout ensemble! Il y a eu des pionnières avant moi, il y en aura d’autres après, dans d’autres domaines, mais
j’étais à un moment charnière de la place des femmes dans le cinéma, surtout au Québec, c’est vrai. On était très peu. Avec Micheline Lanctôt, Paule Baillargeon, Mireille Dansereau et Anne-Claire Poirier, on a ouvert le chemin.
Pionnière
est un grand mot, mais parfois, les grands mots font plaisir. Aujourd’hui, c’est très encourageant; il y a tellement de talent dans la jeune génération, avec des univers très variés et une visibilité plus grande. Je pense que les Réalisatrices Équitables ont fait un travail formidable.

Vous allez être présente lors de cette rétrospective. Quel film avez-vous le plus hâte de présenter ou représenter au public?
L.P. : Emporte-moi. C’est le plus personnel, le plus intime, le plus proche de ma famille. Puis la structure, les clins d’œil à Godard, Karine Vanasse, la musique, ce début d’amour un peu trouble avec son amie, son frère, les années 60… C’est un film dont je suis fière et qui a été bien reçu, donc je me dis tout le monde va l’aimer (rires).Sinon, À corps perdu, même si le personnage principal est masculin, parce que sa modernité m’étonne encore; ça n’a rien de traditionnel. J’aime beaucoup Maman est chez le coiffeur, aussi. Il y en a plusieurs que j’aime beaucoup, en fait.
Rétrospective Léa Pool à la Cinémathèque québécoise, du 17 au 31 mai.