Le trésor d’ICI Tou.tv : Guy, d’Alex Lutz

Chaque vendredi, nous vous faisons découvrir un petit bijou de la programmation cinéma d’ICI Tou.tv.
Le faux documentaire est un genre assez génial dont le cinéma québécois s’est fait un joyeux spécialiste (de La moitié gauche du frigo à Jimmywork en passant par une bonne partie du cinéma de Robert Morin). Mais lorsqu’un humoriste français se l’approprie, cela peut aussi donner un résultat pour le moins séduisant.
Compléments
Cet acteur, humoriste et réalisateur, c’est Alex Lutz, un des rares à pratiquer son art sous l’angle de la transformation et du jeu physique (en son temps, l’immense Peter Sellers en avait fait sa spécialité), ce que plusieurs avaient découvert et adoré dans la série télévisée de Canal Plus Catherine et Liliane. Mais cette fois, c’est en version longue qu’il s’amuse à soumettre son apparence aux exigences de son histoire. Et le défi est de taille. Car Lutz est Guy, un vieux chanteur de variétés dont la popularité fut intense entre les années 1960 et 1990 et qui vit, entre albums de reprises et concerts dans des salles communautaires, dans une propriété en province.

C’est cette ancienne gloire fanée que vient interviewer un jeune journaliste qui tient secret ce que sa mère lui a révélé juste avant de mourir : Guy est son père! Revanche, amertume, blessure mal cicatrisée? Toujours est-il que le jeune journaliste ne filme que le plus laid, le plus négatif : les accès de colère et les crises d’ego du chanteur, sa nouvelle compagne – une jeune actrice adepte de l’astrologie canine –, les moments embarrassants où le monde lui rappelle qu’il est démodé... Et Guy finit par s’en rendre compte.
Pseudo-entrevues, scènes de concerts, documents d’archives conçus de A à Z… L’arsenal des outils du faux documentaire, censé nous mystifier, est efficace et bien pensé.
Mais surtout, dans Guy, ce qui plaît, c’est ce récit, capable de susciter autant d’étonnement que d’émotion.
Car Alex Lutz ne recule devant aucune rupture de ton, passant avec un beau sens de l’équilibre de l’humour vache à une tendresse saisissante.
Et ce portrait d’un vieux chanteur, qui chez d’autres n’aurait sûrement été que moqueur, devient alors bouleversant, ne cachant ni le pathétique, ni le ringard, certes, mais le piquant sans cesse de mélancolie, d’humour et de joliesse. Mieux.
Joué par le quarantenaire Lutz lui-même (doté d’un sens de l’observation des autres hallucinant, il faut le souligner), Guy devient alors le vecteur attachant d’une réflexion profonde et passionnante sur le merveilleux monde du spectacle, le temps qui passe et la fonction de l’art.
Guy, sur ICI Tou.tv Extra. La bande-annonce (source : YouTube).
