Sur le chemin de la guerre, et de quelques grands films politiques

À l'occasion de la diffusion du passionnant Sur le chemin de la guerre, le dimanche 18 mars, à 1 h 53, sur ICI Radio-Canada Télé, petit retour sur quelques films marquants qui se déroulent dans les coulisses de la politique.
Comment se prennent les décisions d’intérêt général? Comment décide-t-on d’allouer tant ou tant de milliards de dollars à tel ou tel enjeu? Comment se préparent les guerres? Comment fonctionne le processus politique de l’intérieur? Depuis qu’il est né, le cinéma s’intéresse à ce que l’on n’a pas, en principe, le droit de voir ou de savoir, le fantasmant ou s’approchant parfois au plus près de la réalité. Pour une visite en règle des passionnantes coulisses du monde politique, nous avons choisi cinq films.

Le chemin de la guerre (Path to War), de John Frankenheimer (2002)
Produit par la chaîne HBO, ce téléfilm de grand prestige est basé sur un scénario qui a nécessité plus de 10 ans de recherches, et qui se révèle aussi aussi épique que passionnant. Car il se donne l’ambitieuse mission de raconter, de l’intérieur, comme en direct des bureaux de la Maison-Blanche, l’intervention américaine au Vietnam en détaillant à merveille les répercussions géopolitiques, humaines et personnelles des décisions d’une poignée d’hommes entourant le président Lyndon Johnson (qui tentait, au même moment, de mener combat pour l’égalité raciale). Le film de plus de 2 h 30 reste en mémoire. D’abord parce qu’il marquait la dernière réalisation du grand John Frankenheimer (The Manchurian Candidate, Seconds, Ronin…),. Ensuite aussi parce qu’il a réuni pour interpréter ces hommes d’envergure des acteurs d’une solidité et d’un charisme épatants : le Britannique Michael Gambon, extraordinaire dans le rôle tragique du président qui, en quatre ans, passera du statut de sauveur à celui d’homme haï; Donald Sutherland (récompensé pour ce rôle de Clark M. Clifford d’un Golden Globes), et Alec Balwin (qui joue Robert McNamara), et qui rendent ces discussions sur le bien-fondé de la guerre absolument palpitantes.

Les marches du pouvoir (The Ides of March), de George Clooney
Comment devient-on président? Si quelques documentaires ont pu relater à merveille ces intenses moments que sont les campagnes présidentielles américaines (comme Primary, film inouï sur la campagne de Johhn F. Kennedy), c’est la version fictionnelle et shakespearienne (le titre du film est d’ailleurs tiré du Jules César du dramaturge anglais) qu’en livrait Clooney, peut-être dans son meilleur film, en suivant un jeune conseiller (Ryan Gosling) qui devra peu à peu abandonner son honnêteté et son idéalisme pour réussir. Nourri aux idées politiques de Machiavel, sombre, cynique et même teinté d’amertume, mais aussi brillant et rythmé, le film est une charge efficace contre la cruauté du système politique, qui transforme, par habitude autant que par nécessité, les hommes en loups.

Des hommes d’influence (Wag the Dog) de Barry Levinson (1998)
Deux ans après Sleepers, que l’histoire aura moins retenu, le cinéaste Barry Levinson retrouvait ses deux acteurs, Robert De Niro et Dustin Hoffman, pour une collaboration au sommet entre un président candidat à sa réélection, mais éclaboussé par un scandale, et un producteur aux idées pour le moins intenses pour redorer son blason. Satire qui tape extrêmement juste, d’un propos toujours tristement actuel, Des hommes d’influence, Ours d’argent au Festival de Berlin, nous fait sérieusement nous demander jusqu’à quel point la fiction, même la plus folle, peut dépasser la réalité. Rires jaunes garantis.

Dr Folamour ou : comment j'ai appris à ne plus m'en faire et à aimer la bombe (Dr. Strangelove or: How I Learned to Stop Worrying and Love the Bomb), de Stanley Kubrick (1964)
Un général fou persuadé que les Russes veulent empoisonner l’eau potable, des bombardiers B-52, un président essayant de ramener le monde entier à la raison… Dr Folamour n’est pas qu’un film, il est peut-être LE film le plus riche, le plus drôle, le plus terrifiant, le plus inspiré et brillant sur le fonctionnement, plus ou moins pervers, de l'échiquier géopolitique mondial, et plus particulièrement l’angoisse nucléaire qui a saisi le monde durant la guerre froide. En plus d’avoir valu à Peter Sellers une nomination à l’Oscar pour les trois rôles qu’il y interprète et d’avoir imposé dans l’imaginaire de tous l’image folle d’un homme chevauchant une bombe. Un classique qui porte extrêmement bien son titre.

Frost/Nixon, l’heure de vérité, de Ron Howard
En 1977, durant quatre soirées, le journaliste David Frost interviewait l’ancien président Richard Nixon à la télévision. Un marathon où les deux hommes se sont affrontés comme deux boxeurs, notamment au sujet du Watergate, et qui a profondément changé les contours du genre entrevue-confession. En adaptant la pièce de théâtre de Peter Morgan (scénariste entre autres de The Queen), Ron Howard retraçait avec profondeur et puissance ces quatre jours, mais également la préparation en coulisses de ce moment d’anthologie. Profondément humain, tout en se situant entièrement dans le monde des idées et des mots, observant avec lucidité la force de la télévision dans le façonnage des pensées collectives, le film, nommé pour cinq Oscar (dont celui du meilleur film) fait découvrir ce qui arrive lorsque les masques tombent et que les projecteurs s’éteignent, notamment grâce aux compositions passionnantes de Frank Langella et Michael Sheen, qui jouaient déjà ces « personnages » dans la pièce.
Sur le chemin de la guerre est diffusé le dimanche 18 mars, à 1 h 53, sur ICI Radio-Canada Télé