ChroniqueFinale de la Coupe Stanley : le destin est parfois difficile à expliquer

Alec Martinez, Carter Verhaeghe, Adin Hill et Ben Hutton
Photo : Getty Images / Ethan Miller
En temps normal, il serait sans doute assez facile de prédire l’issue d’une finale de la Coupe Stanley opposant la 4e équipe de la Ligue nationale de hockey (LNH) à celle au 18e rang. Mais ce n’est pas le cas. Cette année, l’utilisation du mot « normal » pour qualifier l’allure des séries nécessiterait un trésor d’imagination.
Sur papier, les Golden Knights de Vegas ont tout ce qu’il faut pour vaincre les Panthers de la Floride.
L’expérience est souvent un facteur déterminant dans les séries. Or, même si l’équipe du Nevada n’existe que depuis six ans, elle en est déjà à sa deuxième participation à la finale. Vegas revendique par ailleurs deux autres présences dans le carré d’as depuis son arrivée dans la LNH.
Miser sur une défense d’excellente qualité est une condition sine qua non pour remporter la coupe. Encore là, les Golden Knights sont nettement mieux équipés que les Panthers.
En défense, ils sont extrêmement costauds, et il est difficile de s’approcher de leur filet. Le plus petit défenseur des Knights, Alec Martinez, fait 1,85 m (6 pi1 po) et pèse 94,8 kg (209 lb). Cette caractéristique rappelle la brigade défensive du Lightning de Tampa Bay lors de ses deux récentes conquêtes.
Les deux premiers défenseurs de Vegas, Martinez et Alex Pietrangelo, ont déjà remporté la Coupe Stanley. Au bas de la hiérarchie, Nicolas Hague et Zach Withecloud ont respectivement été utilisés 18 min 25 s et 18:51 par match, en moyenne, depuis le début des séries. Certains observateurs estiment qu’ils forment le meilleur troisième duo de la LNH.
En attaque, le portrait est un peu le même. Les Golden Knights misent sur une impressionnante profondeur. Leur quatrième trio, composé de William Carrier, Nicolas Roy et Keegan Kolesar, peut jouer contre n’importe qui, en plus de contribuer sur le plan offensif. Sur le banc adverse, Paul Maurice n’a pas ce luxe et doit essentiellement miser sur trois trios.
Par ailleurs, lorsqu’on décortique les trois premiers trios des Panthers, on constate que Maurice compte essentiellement sur trois joueurs, Carter Verhaeghe, Matthew Tkachuk et Sam Reinhart, pour animer l’attaque. Du côté de Vegas, Bruce Cassidy jouit d’une force de frappe deux fois plus diversifiée. À titre d’exemple, le troisième centre des Golden Knights, William Karlsson, affiche plus de buts depuis le début des séries (10) que l’immense héros des Panthers Matthew Tkachuk (9).
Au bout du compte, la position de gardien est la seule où l’on pourrait arguer que les Panthers jouissent d’un avantage sur les Golden Knights. Les Floridiens ne présentaient cette saison que la 14e défense de la LNH, mais Sergei Bobrovsky est parvenu à gommer cette faiblesse au cours des dernières semaines.
Son taux d’efficacité de ,935 est bien sûr excellent, mais celui du portier des Golden Knights Adin Hill s’élève à ,937. Cependant, le taux de Bob
ne dit pas tout.
Les statistiques avancées indiquent qu'il a jusqu’à présent empêché l’adversaire de marquer 14,52 buts depuis qu’il a fait son entrée dans le tournoi printanier. Selon Natural Stat Trick, au cours des 12 dernières années, seul Tim Thomas a empêché l’adversaire de marquer davantage de buts (20,72). Son brio avait d’ailleurs grandement aidé les Bruins à soulever la coupe.
En temps normal, donc, on pourrait presque faire livrer la coupe à Vegas sans trop se poser de questions.
Le hic, c’est que des analyses du même genre auraient pu être faites lors des trois autres séries des Panthers depuis le mois d’avril.
Les hommes de Paul Maurice ont d’abord éliminé les Bruins de Boston, qui venaient de connaître l’une des deux meilleures saisons dans l’histoire de la ligue. La défense des oursons était la plus efficace de la LNH et leur attaque pointait au 2e rang. Malgré cela, sept matchs plus tard, Boston était en vacances.
Les Maple Leafs de Toronto présentaient la 7e défense et la 9e attaque de la LNH. Et pouf! Ils étaient pourtant éliminés en cinq matchs, et leur directeur général Kyle Dubas a perdu son emploi.
Les Hurricanes de la Caroline, dont la défense était la deuxième de la ligue et dont la brigade d'arrières était aussi fort imposante, se sont fait découper en pièces en seulement quatre rencontres. Comme si de rien n’était.
Lorsqu’on tient compte des immenses dégâts causés par les Panthers parmi la crème de la LNH, les Golden Knights semblent beaucoup moins intimidants. Leur défense était 11e cette saison et leur attaque s’est classée 14e. Sur papier, c’est presque comme si les Panthers terminaient leur parcours éliminatoire avec les hors-d’œuvre après s’être offert trois plats de résistance!
Les Panthers ne semblaient pas destinés à tout rafler cette année. Comment pouvez-vous rêver à la coupe quand vous vous qualifiez pour les séries par un maigre point, grâce à une victoire miraculeuse des pauvres Blackhawks de Chicago?
Les Mets de New York de 1969, le Canadien de Montréal de 1986, les Blues de Saint Louis de 2019 et Rocky Balboa (dans Rocky II) n’étaient pas destinés à accomplir de grandes choses non plus. Et pourtant, ils l’ont fait.
Pour toutes ces raisons : les Panthers en six.