ChroniquePlaidoyer pour plus de compassion et de plaisir au Sommet du sport de Montréal

Des leçons sont à tirer du modèle norvégien, selon le DG de l'organisme Sport'aide.
Photo : getty images/istockphoto / vejaa
Au Sommet du sport de Montréal, le panel Pour une culture éthique et bienveillante a été l'occasion d’une réflexion sur le changement de la culture sportive.
Animé par Sylvain Croteau, le directeur général de l’organisme Sport'Aide, les panélistes ont parlé de leurs diverses expériences.
L’ancienne patineuse artistique olympique Julianne Séguin a parlé de redonner sa juste place à l’athlète et surtout d’être à son écoute. Elle a avoué qu’elle aurait été une tout autre sportive de haut niveau si son entraîneur l’avait un peu plus écouté et qu’elle aurait pu ainsi éviter des commotions cérébrales à répétition.
Le témoignage de Jocelyn Thibault, ancien hockeyeur professionnel et maintenant directeur général de Hockey Québec, était curieusement axé sur la notion de plaisir.
Quand Radio-Canada Sports lui a demandé si le plaisir pouvait être compatible avec la performance, sa réponse était sans équivoque. Une équipe a plus de chance de gagner si les athlètes ont du plaisir
, a-t-il dit.
Il a même apporté une statistique qui est le fruit d’une association du hockey junior avec une étude de HEC Montréal, une équipe qui a la meilleure dynamique relationnelle à 70 % de chance de gagner.
L'ancien gardien de la LNH a insisté sur la notion d’un sport plus juste et plus équitable. Questionné sur le traitement des joueurs dans la LHJMQ qui ont des exigences dignes de joueurs professionnels, Jocelyn Thibault a reconnu que l’on en demandait peut-être un peu trop. On pourrait réduire le calendrier des matchs, tout en gardant une certaine rigueur
, a-t-il affirmé.
Jean-Paul Richard, ancien entraîneur des sœurs Dufour-Lapointe en ski acrobatique, a sans doute été celui qui proposait l’une des voies les plus intéressantes. En parlant des entraîneurs qui sont souvent laissés à eux même, il a lancé cette phrase : Laissez-vous aider.
Il a précisé que la performance à tout prix n’était pas une fin en soi. L’entraîneur doit être conscient du pouvoir qu’il a et qu’il est parfois difficile pour lui de donner plus d’autonomie à l’athlète
.

Les soeurs Chloé (à gauche), Justine (au centre) et Maxime (à droite) Dufour-Lapointe sur le podium à la Coupe du monde de Val Saint-Côme le 23 janvier 2016
Photo : La Presse canadienne / Paul Chiasson
Un monde de Calinours
L’animateur des débats, Sylvain Croteau, a fait bondir les trois panélistes en parlant de l’univers du sport qui pourrait être un peu plus Calinours. Il s’en est expliqué à Radio-Canada Sports.
Aujourd’hui, les acteurs de l’écosystème du sport pourraient traiter notre approche d’idéaliste, mais nous avons prouvé que le plaisir, l’inclusion, la bienveillance, l’entraide sont des qualités humaines importantes pour nos individus, les êtres humains que l’on développe. Alors, pourquoi ne pas profiter du vecteur sportif pour inculquer ces valeurs-là et qu’on les intègre au quotidien.
Le directeur général de Sport'Aide avance l’exemple de la Norvège, où la notion de plaisir est au cœur du développement des sportifs de haut niveau. Pourquoi ne pas faire la même chose ici?
Quand on regarde les derniers résultats des Jeux olympiques d’hiver, qui on retrouve parmi les premiers? La Norvège, qui a une population similaire au Québec. Ce n’est pas utopique de conjuguer le bien-être, le plaisir et la pratique sportive et la performance. Quand ils sont jeunes, laissons-les avoir du plaisir. Si ensuite ils veulent se lancer dans la performance, ce sera leur choix. Pas le choix des parents ou des entraîneurs.
Il y a deux semaines, Sylvain Croteau et son organisme ont témoigné devant une commission parlementaire. Ils ont remis en question À nous le podium, un programme fédéral qui axe son financement exclusivement sur les sports qui performent. Un contraste total avec la mission de Sport'Aide, qui dénonce le pouvoir de l’argent.
Aujourd’hui, l’argent est un problème dans le monde du sport. On dénonce l’obsession de l’argent dans le contexte sportif, car cet argent ne va pas aux bons endroits. On se doit de se questionner sur quel rôle a l'argent dans le sport.
Un tribunal du sport au Québec
Dans ce contexte où toutes les bonnes idées sont les bienvenues, il y a une proposition intéressante qui a émané d’un autre panel. Celle de Vincent Dubuc-Cusick, avocat en droit du sport au cabinet Patrice Brunet Avocats. Il était question de trouver des solutions face aux dernières révélations sur les abus et les violences dégradantes.
Devant l’impuissance des fédérations sportives à régler les problèmes dans leurs structures de manière complètement indépendante, l’avocat propose de mettre sur pied un tribunal du sport au Québec. Un tribunal arbitral indépendant qui mettrait en place des mécanismes qui rendraient imputables tous les acteurs de ces fédérations.
Ce tribunal indépendant de toutes structures sportives permettrait également de libérer plus facilement la parole des victimes. Un peu à l’image du Centre des règlements des différends sportifs du Canada créé il y a plus de 20 ans pour gérer les problèmes au sein des fédérations nationales.
Alors, qu'est-ce qu'un Calinours? Le Calinours est une personne stéréotypée faisant preuve d'une compassion optimiste, naïve et mièvre, notamment sur les questions politiques
.
Peut-être que la solution aux problèmes du sport dans notre société réside dans la compassion optimiste plutôt que de se perdre dans les dédales de la politique.