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Maude Charron dénonce un avantage indu pour les Nord-Coréens

Elle donne une conférence de presse à Rimouski.

Maude Charron à son retour des Jeux de Tokyo.

Photo : Radio-Canada / Sébastien Ross

Au moment où l’on rentre de plain-pied dans une année préolympique, Maude Charron, médaillée d’or des Jeux de Tokyo, est au nombre des haltérophiles qui s’insurgent face à ce qu’ils considèrent comme un passe-droit inacceptable pour les athlètes de la Corée du Nord.

Jointe à son domicile de Sainte-Flavie où elle peaufine sa préparation pour le Grand Prix IWF de Cuba qui se déroulera du 8 au 18 juin, Charron a exposé les motifs qui irritent sa communauté sportive.

Elle a expliqué que les haltérophiles nord-coréens sont restés à l’écart de toutes les compétitions internationales depuis la fin de 2019, dans le but de s’isoler pour contrer l’éclosion de la pandémie de la COVID-19.

La Fédération internationale d’haltérophilie (IWF) est impuissante face à cette situation. Il n’existe aucun règlement disant qu’un pays qui n’a pas été présent dans les dernières années ne peut pas revenir en compétitions sans avoir été assujetti à des tests antidopage, a d’abord précisé la championne olympique et panaméricaine en titre chez les 64 kg.

Car c’est là où ça passe de travers dans la gorge de ceux et celles qui, comme Maude Charron, se sont soumis à des tests inopinés, pratiquement chaque mois, pour prouver qu’ils sont propres.

Éthiquement parlant, c’est frustrant. Si quelqu’un n’est pas frustré de ça, c’est qu’il n’a pas suivi les dernières années de l’haltérophilie.

Une citation de Maude Charron, haltérophile

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Plusieurs personnes de dos, les mains en l'air, célèbrent un jeu de football à la télévision.

Selon les données de l’IWF, les trois quarts des tests positifs amassés depuis 2019 l’ont été hors compétitions officielles.

Il faut également savoir qu’en prévision de Paris 2024, l’haltérophilie est en sursis et que sa présence aux Jeux de Los Angeles en 2028 est encore loin d’être assurée.

On est au pied du mur avec le CIO pour 2028. Il faut démontrer que l’on travaille fort contre le dopage et que l’on fait tout pour avoir les athlètes les plus propres possibles. Au Canada, il faut montrer qu’on est plus blancs que blancs.

En ce qui a trait à la Corée du Nord, trois de ses athlètes avaient été disqualifiés des mondiaux 2015 pour dopage, incluant Kim Un Guk, champion olympique des Jeux de Londres en 2012. Trois autres membres de la sélection nationale ont aussi été bannis entre août 2014 et avril 2015.

Même le Comité international olympique (CIO) n’a pas le pouvoir d’intervenir.

Maude Charron se demande pourquoi les Nord-Coréens pourraient revenir en compétitions sans avoir subi de tests antidopage depuis quatre ans.

Une question d’équité

Maude Charron ne compte plus le nombre de tests auxquels elle a dû se conformer afin de respecter les exigences de l’Agence mondiale antidopage (AMA) et de la Fédération internationale.

Je me suis fait tester au moins une fois par mois, sans préavis, après mes compétitions, tandis qu’eux (les Nord-Coréens) sont partis en 2019 et on ne sait pas ce qu’ils ont fait depuis 2019. Et là, ils arrivent en compétition.

L’AMA est censée organiser des tests dans les pays qui participent aux compétitions. Mais comme ils [les Nord-Coréens] se sont retirés, personne n’est allé là-bas pour tester ces athlètes-là, a expliqué Charron. D’où la récente levée de boucliers des haltérophiles de nombreuses autres nations.

En entrevue avec le site Internet spécialisé en olympisme Insidethegames.biz le très expérimenté entraîneur australien Paul Coffa a estimé que les effets de certains produits dopants pouvaient se faire sentir de six mois à un an après le dernier usage, même si la détection dans le sang ou dans l’urine devient alors quasi impossible.

Charron a souhaité relater une situation à laquelle elle a récemment été confrontée et qui illustre à quel point les tracasseries administratives s’insèrent dans son quotidien.

Pour chaque journée de calendrier, comme tous les athlètes fédérés, elle doit fournir un horaire détaillé de ses entraînements, de ses déplacements, des endroits où elle dort et, surtout, une disponibilité quotidienne pour que l’on puisse lui rendre visite afin de procéder à des tests antidopage.

Or, en dépit de tout cela, les choses ne se passent pas toujours comme on le pense.

La dernière fois, ils sont venus chez moi à 20 h 30 alors que j’étais à l’extérieur pour un souper. J’indique toujours le matin pour ma disponibilité pour les tests. Ils sont venus en dehors des heures que j’ai fournies. Ils sont donc revenus le lendemain matin et on a pu procéder.

Une ou deux semaines plus tard, j’ai reçu un avis de l’AMA indiquant que je n’avais pas respecté ma disponibilité [Apparent Wherabout Failure, NDLR]. Ceux qui étaient venus me voir avaient déjà rapporté mon absence. L’Agence mondiale n’a pas tenu compte que j’avais subi mon test le lendemain.

J’ai dû écrire une lettre, prendre des captures d’écran de mon calendrier, des lieux où j’étais pour démontrer que je n’avais pas manqué à mes obligations, que j’étais à telle adresse et que l’on avait procédé aux tests à tel moment. Il faut que j’aille m’obstiner pour montrer pourquoi j’étais à l’extérieur pour un souper alors que j’étais en dehors des heures que j’avais données. Mais qu’un Nord-Coréen arrive en compétition après une absence de quatre ans, ça va passer?

Sans être aigrie, Charron souligne ainsi à grands traits ce qui lui apparaît, comme à tant d’autres, une injustice.

Et même si elle a un siège au sein de la Commission des athlètes du CIO, celui-ci n’a pas de pouvoir décisionnel en la matière. Charron a tout de même écrit au président de ce groupe, le Ghanéen Christopher Forrester, lui-même haltérophile, pour savoir ce qui pouvait être fait.

Le fait est que nous représentons tous les athlètes. Est-ce qu’on veut représenter les Nord-Coréens? Pour le moment, rien ne les empêche de compétitionner. Mais on veut aussi représenter les droits de tous les autres athlètes du monde. Je lui ai demandé si on pouvait faire quelque chose, mais je n’ai pas eu de retour.

Une citation de Maude Charron

La balle est donc dans le camp de l’AMA, du comité antidopage de la l’IWF et de l’International Testing Agency (ITA).

Dans trois semaines, Charron s’envolera pour Cuba où elle sera en compétition chez les 64 kg et non chez les 59 kg pour laquelle elle souhaite se qualifier pour les JO de Paris.

Elle et son entraîneur ont fait le choix de préserver sa santé en raison de la météo et de l'alimentation dans la grande île des Caraïbes.

Son prochain grand rendez-vous se déroulera aux Championnats du monde qui se tiendront à Paris, en septembre.

Maude Charron est présentement classée 5e au monde chez les 59 kg, alors que les 10 meilleures seront invitées aux Jeux olympiques.

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