Gianni Infantino, un président plus fort que jamais

Gianni Infantino
Photo : afp via getty images / CYRIL NDEGEYA
Indétrônable, Gianni Infantino a été réélu jeudi à la tête de la FIFA pour au moins quatre ans!
C’est sans surprise, car il était le seul candidat en lice, que les 211 fédérations réunies à Kigali pour le 73e congrès de la FIFA l'ont réélu par acclamation à la présidence de la fédération internationale.
Je vous aime tous. Être président de la FIFA est un honneur incroyable, un privilège incroyable, et c'est aussi une grande responsabilité. Je suis vraiment honoré et touché par votre soutien, et je vous promets que je continuerai à servir la FIFA, à servir le football partout dans le monde et à servir les 211 associations membres de la FIFA
, a-t-il déclaré en guise de remerciement.
Élu une première fois en février 2016 après les scandales de corruption entourant l’ancien président Sepp Blatter, Infantino se présentait comme l’homme du renouveau. Son mandat devait se terminer en 2027.
Quand il s’est fait élire en 2016, Gianni Infantino a réussi à faire voter une prolongation jusqu’à trois mandats pour le président. L’an dernier, il a convaincu, avec astuce, les membres du comité exécutif que, finalement, ce serait son deuxième mandat et non son troisième s'il est réélu. Il pourrait donc rester à la tête de la FIFA jusqu’en 2031
, a expliqué Laurent Favre, journaliste suisse pour le quotidien Le Temps, à Radio-Canada Sports.
Sous son règne, il a fait de la FIFA une fantastique machine à imprimer de l’argent. Dans son dernier bilan 2019-2022, l’organisation à but non lucratif a annoncé un chiffre d'affaires de plus de huit milliards de dollars, avec un fonds de réserve de plus de quatre milliards.
C’est sans compter que le tiroir-caisse du ballon rond mondial va encore exploser. La prochaine Coupe du monde – qui aura lieu au Canada, aux États-Unis et au Mexique – promet d'enrichir davantage la fédération internationale puisqu'on parle de 40 jours de compétitions, avec maintenant 48 équipes au lieu de 32, et surtout 104 rencontres au lieu de 64. La manne financière est déjà estimée à plus de 10 milliards de dollars avec la billetterie.
Ce bilan a largement contribué à sa réélection sans opposition.
L’absence d'opposition à la FIFA, c’est sa culture. Quand quelqu’un sort du bois, c’est qu'il estime avoir des chances d’être élu. Par contre, s'il perd, il devient un opposant et les gagnants ont la mémoire longue, affirme Laurent Favre qui est présent à Kigali. Lors de son allocution à Kigali, Infantino a déclaré : "Quand je suis arrivé en 2016, nous avions un milliard de dollars, 4 ans plus tard, 4 milliards et le dernier bilan est de 7,5 milliards." Ces chiffres étourdissants suffisent à convaincre les fédérations présentes qui voient un retour sur bénéfices.
L’unanimité, pas vraiment!
Si Gianni Infantino a été élu par acclamation, sans d’ailleurs que l’on connaisse le résultat final détaillé, une seule voix discordante s’est fait entendre avant le vote, celle de Lise Klaveness, de la fédération norvégienne.
Elle a dit publiquement qu’elle ne soutiendrait pas Infantino pour deux raisons. Tout d’abord, elle réclame une indemnisation pour les personnes victimes de violation de leurs droits. On pense évidemment aux travailleurs qui ont perdu la vie durant la construction des stades au Qatar. De plus, elle demande que les prochaines attributions des Coupes du monde soient faites en fonction du respect des droits de la personne dans les pays candidats.
Des demandes qui n’ont pas l’air de sensibiliser le président réélu, qui n’est pas à un paradoxe près. Il faut se souvenir que quelques semaines avant le début de la Coupe du monde au Qatar, Gianni Infantino avait fait une déclaration pour le moins surprenante, pour justifier son soutien indéfectible aux organisateurs d’une Coupe du monde pour le moins controversée. Il disait se sentir arabe, africain, gai, handicapé, comme un travailleur migrant
, parce qu'il a été discriminé en tant qu'enfant italien et roux en Suisse.
Infantino est un habitué des déclarations surprenantes qui découragent son service des communications et, cette fois-ci encore, il a récidivé.
Encore une fois, Infantino a mis les pieds dans le plat et ses gens des communications essayent de se dire qu’il n'a pas dit ça. Lors de son discours de remerciement, il est revenu sur sa première campagne présidentielle en 2016. Il a déclaré devant les membres des fédérations, mais aussi ceux du gouvernement rwandais : "Je me souviens des moments de découragement lors de ma campagne afin de devenir président. J’étais venu au Rwanda avec l’intention d’abandonner. Mais quand j’ai vu la résilience du peuple rwandais après le génocide, cela m’a redonné confiance de continuer"
, raconte Laurent Favre.
Au grand dam des gens qui essayent de lui rédiger des discours! Infatino a ajouté, poursuit le journaliste suisse encore quelque peu médusé par ses propos : La Coupe du monde à 48 équipes va aussi permettre d’avoir plus de pays africains. Cela va permettre aux Africains de ne plus traverser la Méditerranée.
Infantino repart donc pour un mandat de quatre ans encore plus indéboulonnable qu’avant. Fort de son bilan, personne ne viendra le questionner sur le fait qu’il partage maintenant sa vie entre Zurich et le siège social de la FIFA, et l’île de Pearl et ses quartiers luxueux, non loin de Doha, où il a déménagé sa famille. Il est vrai qu’il a dépeint le Qatar comme un véritable paradis.