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La mixité et le parasport : pour le meilleur et pour le pire

Une première équipe féminine de rugby en fauteuil roulant représentera le Canada à un tournoi à Paris, en mars.

Elle est dans son fauteuil roulant, accompagnée de son coéquipier, qui a le ballon. Elle est la seule fille sur la photo.

Mélanie Labelle en action avec Équipe Québec

Photo : Julie Marcotte

Il existe peu de sports olympiques qui réunissent hommes et femmes, mais sur la scène paralympique, quelques disciplines ouvrent une fenêtre intéressante sur la mixité, ses avantages et ses limites.

La mixité s’est invitée dans quelques sports paralympiques par la force des choses : le bassin d’athlètes étant plus petit, il était souhaitable d’ouvrir des sports aux deux genres. Au curling en fauteuil roulant, chaque équipe doit avoir en tout temps au moins une joueuse sur la glace. Même dans les sports plus robustes, comme le rugby en fauteuil roulant, on note une présence féminine.

Le parahockey est également un sport mixte, en théorie.

Et peut-être en théorie seulement : aux Jeux de Pékin, une seule hockeyeuse a participé au tournoi paralympique, une Chinoise. Dans l’histoire, elles sont peu nombreuses. La Québécoise Raphaëlle Tousignant, qui s’exerce avec l’équipe de développement canadienne, aspire à être la prochaine.

Sur le banc lors d'un match, elle se tourne pour regarder l'action.

Raphaëlle Tousignant lors du Défi sportif en 2019

Photo : Jean-Baptiste Benavent

Elle pourrait faire partie de la formation canadienne aux prochains Jeux paralympiques, en Italie. En parallèle, elle caresse le rêve de mener une équipe entièrement féminine au cours d'une compétition paralympique à laquelle on aurait ajouté un volet féminin.

La hockeyeuse n’est d'ailleurs pas convaincue que la mixité soit la meilleure voie pour développer le sport au féminin.

Dans le meilleur des mondes, le développement du sport féminin passerait par une division féminine. Notre sport est mixte, mais juste en théorie. C’est un règlement qui n’est pas mis en avant. C’est une note de bas de page.

« Ça crée un double défi pour les femmes au cours des camps. On doit non seulement se prouver comme athlètes, mais aussi prouver qu’on a notre place avec les hommes. »

— Une citation de  Raphaëlle Tousignant, joueuse de parahockey

La présence féminine, aussi limitée soit-elle, comporte aussi de nombreux avantages, nuance-t-elle.

Mettre des talents féminins à l’avant-plan comme ça, dans les grands tournois, ça fait connaître le sport, ça montre à des filles qu’elles peuvent accéder à ce sport.

Mélanie Labelle, pionnière du rugby en fauteuil roulant au Canada, est du même avis.

Aux Jeux de Tokyo, il y avait quatre femmes dans le tournoi, en tout. Quelques mois après, lors des mondiaux, il y en avait 13. Quand il y a un spotlight, même s’il est éphémère, c’est assez pour créer une étincelle, pour donner le goût à d’autres femmes d’essayer le sport.

Mélanie Labelle est la seule femme dans l'équipe canadienne de rugby en fauteuil roulant. Elle a aidé la formation nationale à remporter l'argent aux Jeux parapanaméricains en 2019. Et à quelques mois des Jeux de Paris, elle touche presque à son rêve paralympique.

Si on enlève le volet féminin en ce moment, on se tire dans le pied. On enlève le mixte et je perds ma place à Paris. Est-ce qu’on veut diviser? Si oui, on fait comment?

Comme solution, Mélanie Labelle avance l’idée d’un tournoi ouvert à tous, aux Jeux paralympiques, en attendant le développement d’autres volets à différents niveaux.

On pourrait avoir une catégorie junior, une catégorie féminine, une catégorie par pointage (selon le handicap). Mais est-ce qu’on a les gens pour ça en ce moment? Pas du tout.

Mélanie Labelle sait de quoi elle parle : elle est l’instigatrice de la toute première équipe canadienne de rugby en fauteuil roulant qui participera à un tournoi féminin, du 8 au 12 mars à Paris.

Une réalisation qui n’aurait pas été possible à ses débuts dans le sport qu’on appelait autrefois le murderball. Quand j’ai commencé avec les Machines de Montréal, on était deux femmes, se rappelle-t-elle.

Elle s'apprête à recevoir une passe dans son fauteuil roulant.

Mélanie Labelle mènera une équipe canadienne entièrement féminine à l'occasion d'un tournoi de rugby en fauteuil roulant à Paris.

Photo : Julie Marcotte

Mais au fil des années et des tournois, elle a été en mesure de constater qu'il y avait un nombre grandissant de participantes d’un océan à l’autre.

En tournoi avec l’équipe nationale, au Danemark, elle discute avec les arbitres, qui s’avèrent aussi être les organisatrices de la Coupe féminine. Après plusieurs éditions annulées, la compétition va finalement reprendre à Paris.

Mélanie Labelle s’est immédiatement mise à compter dans sa tête le nombre de joueuses qu’elle connaissait. Huit, onze, treize… Elle aurait même assez de volontaires pour former deux équipes, constate-t-elle.

Finalement, c’est une seule formation qui s’envolera vers la France, mais cela reste un exploit étant donné que les joueuses qui ont embarqué dans le projet n’avaient aucune certitude quant à un financement potentiel. Elles ont accepté de se joindre à l’aventure en sachant qu’il était fort possible qu’elles doivent assumer une bonne partie du coût.

« Notre motivation était au maximum. Rapidement, une personne de notre entourage nous a dit qu'elle pourrait être notre manager. Une autre, notre entraîneuse. C’était toutes des femmes qui acceptaient de faire ça bénévolement, juste par passion pour le sport féminin. »

— Une citation de  Mélanie Labelle, joueuse de rugby en fauteuil roulant

Devant le sérieux de l’entreprise et le niveau de compétition qui est attendu sur les parquets parisiens, la Fédération canadienne de rugby en fauteuil roulant a finalement décidé de financer entièrement le voyage et la préparation.

Il ne nous reste plus qu’à aller chercher l’or, lance la vétérane.

Un exemple pour le parahockey

Le parahockey a connu une réussite semblable en août dernier avec la tenue d’un premier tournoi entièrement féminin, aux États-Unis. Le Canada était alors bien représenté.

Raphaëlle Tousignant est envieuse en voyant à quel point le rugby féminin se développe vite. Elle envisage une trajectoire semblable pour son sport, et rapidement.

Au tournoi l'été dernier, il y avait seulement trois nations représentées. La Finlande pourrait s’ajouter prochainement, dit-elle.

Une étape importante a été franchie afin que cette discipline devienne un sport paralympique.

Je pense que ce sera le cas d’ici 2032, à tout le moins en démonstration. Mais rendu là, j’aurai dans la fin vingtaine. Est-ce que je jouerai encore? Je ne le sais pas.

Entourée d'hommes, elle manie le disque sur sa luge.

Raphaëlle Tousignant avec l'équipe canadienne

Photo : Gracieuseté : Raphaëlle Tousignant

En attendant, elle vit auprès des hommes une expérience des plus bénéfiques. Sans cette option, elle aurait possiblement abandonné le sport.

Comme joueuse, j’ai atteint le maximum que je pouvais atteindre au niveau féminin. Je suis membre de l’équipe depuis 14 ans. Je suis une des meilleures joueuses du monde. J’ai atteint mon max. Si je n’avais pas eu l’occasion de jouer avec des hommes, j’aurais arrêté, ajoute-t-elle.

En allant avec les gars, au niveau provincial ou national, je m’entraîne avec les meilleurs du monde. J’apprends, ça me motive. Sinon, être seule au top, c’est lassant. Avec les hommes, c’est un nouveau défi. Je suis entraînée par des anciens de la LNH qui m'apportent des connaissances auxquelles je n'aurais pas eu accès avec des filles.

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