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Chronique

Après le flirt néo-zélandais, un travail colossal attend John Herdman

Il regarde la foule et lève le poing droit.

John Herdman et la sélection canadienne ont dominé le dernier tour des qualifications pour la Coupe du monde de 2022.

Photo : Dan Hamilton-USA TODAY Sports

Olivier Tremblay

À 16 h 30, mercredi, le journaliste d’Auckland Andrew Gourdie a conclu sa journée au bureau en publiant sa primeur : le sélectionneur canadien John Herdman a accepté de diriger l’équipe masculine néo-zélandaise.

Il était donc 22 h 30, mardi, dans l’est du Canada. En matinée, l’information avait fini de rejoindre tout le petit milieu du soccer d’ici.

Ce devait être un mercredi agréable à Canada Soccer : une journée d’annonce du préeffectif, appelons-le ainsi, de l’équipe féminine en vue de la Coupe SheBelieves.

À 13 h 56 (HNE), juste à temps pour le deuxième café de M. Gourdie à l’autre bout du monde, Canada Soccer publiait une déclaration de John Herdman : des offres lui sont parvenues, a-t-il dit, dont celle de la Nouvelle-Zélande, mais il les a refusées. Le secrétaire général Earl Cochrane enchaînait en précisant que le Britannique était sous contrat jusqu’en 2026.

L’épisode d’une quinzaine d’heures a engagé une réflexion plus ou moins entreprise depuis le lendemain de veille – car c’en était bien un – de la Coupe du monde au Qatar : la suite, pour John Herdman, quelle est-elle exactement? Est-il encore l’homme de la situation? Est-ce que l’entraîneur du Real Madrid s’en vient au Canada?

À Canada Soccer, la réponse semble catégorique. Selon Cochrane, Herdman est la bonne personne pour transporter notre pays vers de nouveaux sommets. Le conseil d’administration fait entièrement confiance à John Herdman, a ajouté le président Nick Bontis.

Le sélectionneur compte sur le soutien de son employeur et, selon toute vraisemblance, de ses joueurs. Après tout, trois matchs au Mondial devraient-ils effacer les progrès réalisés depuis 2018? Il aurait fallu tout un fiasco au Qatar pour que le torchon se mette à brûler, et même si, comme en 1986, le Canada n’a pas récolté le moindre point, son tournoi n’avait rien d’une catastrophe.

Ce qui avait souri aux Rouges dans leur campagne de qualification presque parfaite s’est évanoui au Qatar. Dans la CONCACAF, le Canada a profité des malheurs des États-Unis et du Mexique, moins en réussite que par le passé, pour les battre à domicile et leur arracher un point chez eux.

La Belgique, moins en réussite que par le passé, etc. On se souvient bien de comment ça s’est terminé. Une défaite aux points, mais une victoire morale qui avait inspiré Herdman : Nous allons f… la Croatie, avait-il dit à ses joueurs. Rien de mal à cela, si on ne va pas ensuite en parler à la télé.

Premier indice d’une certaine naïveté dans ce tournoi.

Herdman a-t-il vu son groupe plus beau qu’il l’était en réalité? Le but d’Alphonso Davies dès les premiers instants contre la Croatie a bien fait croire aux Canadiens qu’ils pourraient mettre la menace de Herdman à exécution.

Les Croates ont gagné 4-1. Très vite, ils ont déjoué la stratégie du Canada, muselé par la suite. Zlatko Dalic a remporté son duel avec Herdman haut la main, comme le Marocain Walid Regragui plus tard. De chez lui, le sélectionneur canadien a vu ses deux homologues atteindre les demi-finales pendant qu’il songeait, on le présume, aux enseignements à tirer de tout ça.

Habile sur le plan tactique en qualifications, Herdman a souffert au Qatar. Ses choix de titulaires ont parfois été discutables. Son acharnement à laisser Atiba Hutchinson sur la pelouse dans des situations de plus en plus délicates, notamment contre la Croatie, avait de quoi rendre perplexe le plus clément des observateurs, malgré tout le capital de sympathie (mérité) dont jouit le vétéran milieu de terrain.

S’il doit poursuivre l’aventure, il devra s’améliorer dans ce domaine ou aller chercher de l’aide ailleurs.

L'équipe tient le trophée à bout de bras.

Les Canadiens ont remporté la Gold Cup une fois, en 2000.

Photo : Getty Images / MIKE NELSON

Il est néanmoins encore tôt pour contester le bien-fondé d’un autre cycle de quatre ans avec Herdman à la tête de l’équipe. Le premier grand rendez-vous où le sélectionneur pourra mettre en œuvre ses apprentissages est la Gold Cup de cet été, pour laquelle le Canada doit finir de se qualifier en mars. Il se rendra à Curaçao et accueillera le Honduras dans la Ligue des nations de la CONCACAF.

Si Herdman s’est servi des qualifications de la dernière Coupe du monde pour élever le Canada au rang des autres puissances de la région que sont les États-Unis et le Mexique, il doit au moins viser les demi-finales de la Gold Cup, voire le podium.

Vient ensuite la belle surprise de la dernière semaine, la confirmation d’un partenariat entre la CONCACAF et sa confédération sœur en Amérique du Sud, la CONMEBOL, qui permettra l’organisation de la Copa América aux États-Unis en 2024.

Au moyen de la prochaine Ligue des nations, celle de 2023-2024, on déterminera 6 équipes de la CONCACAF qui se joindront aux 10 représentants sud-américains. S’il en fait partie, le Canada contournera deux importants problèmes : la quasi-disparition des rencontres à fort enjeu dans les prochaines années puisqu’il est déjà qualifié pour la Coupe du monde de 2026 à titre d’hôte, et la difficulté à organiser des matchs contre des adversaires redoutables de l’extérieur de sa région.

Ce serait la suite logique d’une évolution sans précédent pour l’équipe canadienne. Le chemin parcouru depuis 2018, jumelé au travail des clubs, a mené un nombre croissant de joueurs vers certains des plus grands championnats européens. On ne pourra jamais enlever à Herdman sa part de responsabilité dans ces réussites.

La dynamique peut-elle changer maintenant que ses moussaillons sont arrivés à bon port? Des pistes de réponse viendront sans doute à la Gold Cup et, souhaitons-le, à la Copa América, d’autant plus qu’on souligne constamment les qualités de Herdman comme meneur d’hommes. Il devra se signaler à cet égard au cours des mois à venir.

Recruteur non officiel de l’équipe nationale, Herdman devra aussi mener à bien un certain renouvellement de l’effectif canadien. Le gardien Milan Borjan, parfois chancelant au Qatar, aura 36 ans lors du Mondial de 2026. Steven Vitoria aura 39 ans, soit l’âge que Hutchinson aura encore jusqu’au 8 février quand il deviendra l’un des quadragénaires les plus en forme du monde.

Et au-delà de tout ça, qui dit qu’un journaliste européen n’assurera pas, à la fin d’un bel après-midi de l’été 2024, que John Herdman s’en vient diriger sa sélection nationale et que, cette fois, ce sera vrai?

Au moins, la journée sera encore jeune au Canada pour en discuter.

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