Paris s’ouvre aux judokas à un peu plus d’un an des Jeux olympiques

85 pays seront représentés au grand chelem de Paris 2023. Parmi eux, le Canada présente une délégation de sept judokas.
Photo : IJF
La première de deux années de qualification olympique est déjà bien entamée. Les judokas canadiens auront l’occasion de se familiariser avec le décor de l’été prochain des Jeux olympiques de Paris puisque, samedi et dimanche, la capitale française sera le théâtre de son toujours très populaire grand chelem de judo.
Ce tournoi baromètre pour l’équipe canadienne est un arrêt prisé pour son prestige et pour la crème des judokas qui y font escale. Cette année, il sera encore plus intéressant pour ceux qui voudront un aperçu des prochains Jeux olympiques d’été, dans un peu plus d’un an.
Il n’y a pas eu de préparation particulière sur ce tournoi parce qu’il est à Paris et que les Jeux y seront dans un an et demi, mais c’est plutôt un des tournois les plus relevés. On veut y être pour se mesurer aux meilleurs et aller chercher des points pour la qualification
, a dit l’entraîneur de l’équipe canadienne Antoine Valois-Fortier.
Les entraîneurs aiment bien offrir une idée des habitudes que devront développer les athlètes une fois rendus dans la bulle olympique.
On a trouvé intéressant de faire une visite des lieux importants pour leur permettre de prendre des points de repère et avoir une idée de ce que sera le fonctionnement, où se trouve le village des athlètes, comment se situer par rapport aux restes des installations.
C’est une pratique courante que Valois-Fortier appréciait durant ses années d’athlète, même si certaines visites offrent une meilleure idée de l'avenir que d’autres. Comme à Londres, en 2012, des mois avant qu'il remporte sa médaille de bronze chez les -81 kg.
On avait fait un long séjour en Europe et Nicolas [Gill] nous avait fait visiter ce qui était à l’époque un gros tas de terre [rires] et il nous l’avait pointé en disant : "C’est là qu’on compétitionne." On l’avait fait probablement un peu trop tôt, mais somme toute ça m’avait plu. Et je pense que c’est pourquoi Nicolas et toute l’équipe, on voulait retravailler de cette manière-là.
Des débuts intimidants
François Gauthier-Drapeau devait participer à ses premières compétitions dans les rangs seniors lorsque la pandémie a frappé. Puis, 2021 est arrivé, et c’est à Paris qu’il a pu enfin poser les mains sur ses premiers adversaires du circuit World Tour. Il était d’ailleurs du tout premier combat du tournoi.
Je n’avais participé à absolument aucun tournoi pendant au moins un an et demi et, en plus, j’étais le premier combat de la journée. J’étais super stressé.
À Paris, les gradins sont remplis, et les spectateurs sont vraiment investis durant les combats
, explique le jeune espoir. Ils encouragent, ils crient. C'est vraiment cool.
Le Québécois de 25 ans se souvient très bien de cette courte journée d’octobre 2021, bouclée en deux combats, dont son dernier chaudement disputé contre un médaillé de bronze des Jeux de Tokyo, le Belge Matthias Casse.
Son nom figure maintenant au 15e rang mondial chez les moins de 81 kg. Une position qui lui permettrait de prendre part aux JO de Paris s’ils étaient déclenchés aujourd’hui, puisque les 17 premiers combattants du classement mondial de chaque catégorie obtiennent une invitation.
Malgré sa courte expérience sur la scène internationale, Gauthier-Drapeau n’a pas à rougir de sa feuille de route. Il compte deux médailles de bronze en grand chelem, mais aussi quatre participations à des finales pour le bronze, dont une à Paris, la saison dernière.
J’ai vraiment le niveau pour aller concurrencer les meilleurs, mais c’est souvent au niveau stratégique que je fais des erreurs. Ils sont un peu plus futés pendant un combat, ils vont me faire prendre une pénalité alors que ça n’en prenait pas beaucoup pour que je l’évite. À force d’analyser plusieurs combats, tranquillement, tu réalises qu’ils ne sont pas très loin de toi.
Un contexte gagnant
Une expression suggère qu’on choisisse nos combats pour être en mesure de les mener à terme. Il a été difficile pour Catherine Beauchemin-Pinard d’en faire autant après avoir remporté sa toute première médaille aux mondiaux.
La Québécoise sort à peine la tête de l’eau depuis son titre de vice-championne du monde en octobre dernier, à Tachkent, en Ouzbékistan. C’est que la vie fait parfois mal les choses.
J'avais pris un bon congé après les Championnats du monde. Après, j'étais en fin de session, c'était la fin de mon baccalauréat. J'ai aussi eu quelques problèmes avec ma nouvelle maison. Il y a eu plusieurs choses en même temps qui ont fait que j'ai eu plus de difficulté à me concentrer sur les compétitions.
La fatigue expliquerait donc ses résultats en demi-teinte des derniers mois. Rien d’alarmant, mais la tête n’y était tout simplement plus. D’un commun accord avec son entraîneur, il fallait qu’elle souffle un peu.
Je ne me sentais pas très motivée au retour des Fêtes. J'ai dit à mon entraîneur : "Je sais qu'on est juste à la moitié de la semaine, mais je vais prendre congé pour le reste." Ça m'a vraiment fait du bien. Je suis revenue le lundi, on a fait un plan ensemble et je me sentais mieux pour attaquer la compétition.
Je réalise plus maintenant ce que j'ai accompli aux Championnats du monde, même si sur le coup j'étais déçue d'avoir perdu la finale. Maintenant, quand je perds, je me rends compte que ce n'était pas si facile de gagner quatre combats de suite. Je l'apprécie plus.
Toujours en quête d’un premier podium à Paris, Beauchemin-Pinard compte faire oublier son dernier passage en 2022. Elle s’était fait barrer la route dès son premier combat par la Coréenne Lee Ju-yeon. Elle effectuait à ce moment un retour à la compétition après une longue pause de sept mois qu’elle s’était offerte après sa médaille de bronze aux Jeux olympiques de Tokyo.
Je vois cette compétition-là comme la suite des choses après les Championnats du monde. J'ai le goût d'aller chercher ma médaille ici. Et si je me concentre sur le processus et que j'ai une bonne préparation, ça devrait bien se passer.
Elle a aussi flirté avec le podium à deux reprises, mais elle a été chaque fois vaincue dans le combat pour le bronze.
La force du nombre
Jessica Klimkait (-57 kg), Beauchemin-Pinard (-63 kg), Arthur Margelidon et Shady El-Nahas (-100 kg) représentent les plus beaux espoirs de médaille. Étienne Briand sera aussi du tableau chez les moins de 81 kg, alors que Marc Deschênes défendra les couleurs canadiennes chez les plus de 100 kg.
Christa Deguchi (-57 kg) et Kyle Reyes (-100 kg) ont connu un bon début de sélection et ont décidé de faire l’impasse sur le tournoi parisien pour se concentrer sur une autre compétition, le grand chelem de Tel-Aviv, en Israël, dans deux semaines. Deguchi sera toutefois du camp d’entraînement qui suivra la compétition.
C'est un luxe que lui procurent ses récents succès. Cela lui permet de planifier soigneusement ses compétitions en fonction de son niveau de forme et de l’état de sa préparation. Miser sur la qualité plutôt que sur le volume.
Le reste du groupe est en bonne forme, la santé y est, mais maintenant, il faut faire le travail
, a conclu Antoine Valois-Fortier.
Le contexte était idéal pour que se dessine, chez les 57 kg, un possible duel canadien entre Deguchi (no 1 mondiale) et Klimkait (no 8), mais ce n’est que partie remise, puisque l’Ontarienne sera aussi de l’arrêt à Tel-Aviv.
Il faut rappeler que Klimkait s’était assuré l’unique billet canadien de la catégorie aux Jeux de Tokyo avec sa victoire aux Championnats du monde de 2021, à Budapest, un mois seulement avant la cérémonie d’ouverture. Elle y avait d’ailleurs gagné la première de deux médailles de bronze canadiennes, une récolte record à des Jeux olympiques.
Un dénouement particulièrement douloureux pour Deguchi, qui rêvait d’une première expérience olympique sur la terre de ses ancêtres maternels.
Le plus grand événement de l’année demeure les Championnats du monde, à Doha, au Qatar, en mai prochain. Les points à l’enjeu permettraient un bond de géant si la performance est à la hauteur. Pour s’y préparer, rien de mieux qu’un passage au pied de la tour Eiffel pour faire le plein de motivation, et de quelques médailles.