Un pas en avant pour Juraj Slafkovsky
Juraj Slafkovsky et Jake Evans
Photo : The Canadian Press / Paul Chiasson
C’était un match serré, un match pour les colosses où les plus menus ont eu la vie dure, où le territoire se gagnait pouce par pouce, se vendait chèrement. Que Juraj Slafkovsky y ait brillé est révélateur.
Il y a les chiffres d’abord. Ils lui font une belle jambe dans ce duel serré contre les Flames de Calgary ultimement remporté à l’arraché 2-1 par le Canadien en tirs de barrage.
Huit tentatives de tirs, dont trois cadrés, quatre mises en échec et une superbe passe à l’origine du but égalisateur de l’autre costaud du son trio, Josh Anderson. Martin St-Louis ne lui a d’ailleurs jamais autant donné de temps de jeu depuis le début de sa carrière que les 15 min 22 s de lundi soir, même si les circonstances, nommément la perte à mi-chemin dans la rencontre de Cole Caufield, blessé, ont certainement servi sa cause.
Les statistiques avancées aussi sont flatteuses. Son équipe a obtenu quatre chances de marquer de qualité contre une seule lorsqu’il était sur la glace, 14 tentatives de tirs contre 5, bref, peu importe par quel angle vous l’abordez, c’était du travail bien fait.
Jake Allen, auteur de 34 arrêts dans le match, a estimé qu’il s’agissait de l’un de ses meilleurs matchs
.
St-Louis, pour sa part, s’est lancé dans un long monologue pour expliquer l’utilisation à la hausse de sa recrue, maintenant membre des trois premiers trios depuis six matchs, soit depuis le début du voyage dans l’Ouest canadien, qui coïncide aussi avec l’hécatombe, il faut bien le dire.
Ce n’est pas où il joue ni combien de minutes il joue. C’est quelle qualité il nous donne et les détails de sa game
, a expliqué l’entraîneur.
C’est dur de demander à un gars de 18 ans d’avoir beaucoup de détails dans sa game, parce que je pense que tu les apprends quand tu arrives ici. C’est un kid qui est très facile à diriger parce qu’il veut apprendre. Il ne pense pas qu’il sait tout, qu’il connaît tout. Il sait qu’il a des choses à améliorer. Quand on en parle, il essaie d’exécuter ça. Juste pour ça, je sais qu’avec cette mentalité-là, il va toujours progresser
, a-t-il ajouté.
St-Louis n’était pas là du temps de Jesperi Kotkaniemi, mais, après son départ, il a beaucoup été critiqué pour son attitude désinvolte, comme s’il croyait déjà détenir les clés du succès en dépit de son inexpérience. Il corroborait du même coup la maxime attribuée à Mark Twain qui aurait dit qu’il est dommage que la jeunesse soit gaspillée sur les jeunes
.
Peut-être parce qu’il n’aime pas l’auteur américain, Slafkovsky s’arrange pour prouver le contraire, foi de St-Louis.
Au-delà des jeux évidents, le Slovaque a réalisé quelques-uns de ces fameux détails
auxquels référait son patron.
Il a donné du bout du bâton une petite poussée à Johnathan Kovacevic pour que celui-ci arrive juste à temps dans son repli défensif pour briser une attaque des Flames à deux contre le gardien. Il s’est obstiné avec ardeur en échec avant pour récupérer la rondelle et pour la refiler à Anderson sur le but égalisateur.
Beaucoup de petits riens empreints d’une maturité nouvelle, aurait-on dit.
L’ailier format géant passe beaucoup de temps avec le gourou du développement du CH, Adam Nicholas. Il a vanté son travail après le match tout comme celui de son entraîneur des habiletés en Europe et de tous ceux qui lui ont donné un coup de main jusqu’ici. Vrai qu’il semble se promener les yeux grands ouverts et les oreilles à l’affût dans cet environnement unique et hostile de la Ligue nationale de hockey.
De son propre aveu, ce qui tournait si vite autour de lui en début de saison commence à prendre un autre rythme.
« En transition et sur mes entrées de zone, je dois encore m’améliorer, mais oui c’est plus lent qu’à mes débuts. Je me disais au début que c’était le hockey le plus rapide du monde, mais maintenant c’est un peu plus lent. »
C’est encore le hockey le plus rapide
, lui a fait remarquer un scribe.
Oui, mais c’est plus lent dans ma tête
, a renchéri Slafkovsky.
Nick Suzuki aussi l’a constaté.
Ça devient plus facile avec le temps. Ça devient plus normal et naturel. Il arrivait d’Europe, il se retrouve sur une glace plus petite contre des joueurs plus rapides et plus forts. C’est une transition, mais il la gère bien. Et avec les attributs physiques qu’il a déjà à 18 ans, il n’a pas trop à s’inquiéter
, a lancé le capitaine.
Et quand St-Louis dit qu’il veut toujours apprendre plus…
Même ma mère m’a dit par texto de lancer plus. Je dois vraiment lancer plus
, a dit en riant le colosse.
On ne sait pas ce que maman pense toutefois de cette nouvelle confiance en possession de la rondelle dans la zone offensive. Il a promis de lui passer un coup de fil sur le chemin du retour. On vous en donnera des nouvelles.
En rafale
Malgré quelques bons moments en sept occasions, l’avantage numérique du Canadien est rentré bredouille. Le Tricolore a eu droit à 1:40 à cinq contre trois et 4 minutes à quatre contre trois en prolongation, mais personne n’a trouvé la solution à l’énigme Jacob Markstrom, très solide avec 37 arrêts.
Joel Armia a joué plus de cinq minutes avec l’avantage d’un ou deux hommes sans parvenir à toucher la cible pour une première fois cette saison. Le voilà à 20 matchs d’affilée sans but si l’on remonte à la saison dernière. Parmi les autres poètes maudits de la rondelle, on compte Jake Evans (0 en 28), Evgenii Dadonov (2 en 24) et Kirby Dach (0 en 14).
De toute cette soirée, bien des observateurs pourraient ne retenir que la collision en apparence accidentelle entre Trevor Lewis, des Flames, et Cole Caufield. Le petit attaquant du CH a dû quitter la rencontre, probablement évalué pour des symptômes de commotion cérébrale. L’équipe n’a pas fourni plus de détails sur son état de santé si ce n’est qu’il sera évalué à nouveau mardi. On a compris entre les branches que son cas n’était toutefois ni blanc ni noir, et qu’il n’est pas exclu qu’il soit de la partie mercredi soir à Ottawa.