« En ne voulant pas être dans la politique, le sport se marginalise » - Richard Legendre

Richard Legendre
Photo : Photo/Jean-François Poirier
Prenez note que cet article publié en 2021 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Richard Legendre dirigeait les Internationaux de tennis du Canada lorsqu’il a été approché par le Parti québécois en 2001. « On voudrait que tu deviennes ministre du Loisir et du Sport dans 10 jours », lui a lancé sans détour le directeur de cabinet de Bernard Landry. Cette proposition, totalement inattendue, a fait dévier le cours de sa vie professionnelle. Après une réflexion rapide, il a décidé de plonger.
De ses six années en politique, deux ans au gouvernement et quatre dans l’opposition, Richard Legendre se souvient d’avoir été un cas d’espèce sur la colline Parlementaire. D’ailleurs, il a été le premier issu du milieu sportif à devenir ministre du Loisir et du Sport au Québec.
Il n’y avait pas beaucoup de gens autour de moi qui étaient au courant du sport, qui étaient touchés par le sport. J’étais un peu "différent" dans le groupe. Et un peu divertissant aussi parce que les gens ne me voyaient pas vraiment comme un personnage politique, mais plutôt comme un personnage sportif. Ça m’a aidé dans mon implication comme ministre du Loisir et du Sport
, explique l’homme de 68 ans.
L’ancien député de Blainville sait très bien que sa décision de faire le saut en politique, de surcroît au Parti québécois, alors qu’il travaillait pour une fédération canadienne, en a surpris plus d’un.
Malheureusement, il y a longtemps eu cette perception, qui existe encore un peu, que le sport devrait être apolitique. Je n’ai jamais compris ça et je crois que c’est une erreur de le penser. La politique, c’est la vie en société, c’est la vie citoyenne. Et le sport, en ne voulant pas être dans la politique, il se marginalise. Il se met en dehors des débats de société. Et moi, c’est ce que je déplore. D’ailleurs, ça fait 20 ans que j’y suis allé et il n’y en a pas tant qui l’ont fait après.
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L’exception et non la règle
La présence d’Isabelle Charest, ancienne patineuse de vitesse sur courte piste devenue ministre du Loisir et du Sport, et d’Enrico Ciccone, ancien hockeyeur devenu leader de l’opposition libérale en la matière, aide certainement la cause à Québec. Toutefois, selon Richard Legendre, la représentation sportive est encore nettement insuffisante à l’Assemblée nationale.
Maintenant on est plus, mais on est des cas d’exception plutôt que la règle, ce qui n’aide pas, je crois, à l’avancement politique du sport. Le sport a besoin de prendre du poids sur le plan stratégique et sur le plan politique. On n’est pas là encore.
À titre d’exemple, il compare le budget du Sport à celui de la Culture.
La Culture, qui en réclame plus et qui devrait en avoir plus, c’est un milliard de dollars de budget au gouvernement du Québec. Le Loisir et le Sport, c’est 100 millions de dollars, donc 10 fois moins. Le budget total, c’est au-dessus de 100 milliards de dollars, précise Richard Legendre. Aussi, on a une ministre, mais on n’a pas de ministère. Le Loisir et le Sport, c’est un petit secteur du ministère de l’Éducation. Et là, ce n’est pas un blâme au gouvernement actuel, c’est pour tous les gouvernements.

Richard Legendre en 2005 alors qu'il briguait la direction du Parti québécois.
Photo : La Presse canadienne / JACQUES BOISSINOT
L’homme de tennis croit que rien ne changera s’il n’y a pas davantage de personnes issues du milieu sportif à s’immiscer dans le monde politique. Il le souhaite d’ailleurs ardemment.
C’est en plaidant de l’intérieur qu’on peut y arriver. Si on ne se mêle pas de politique, la politique ne se mêle pas de nous.
Selon lui, plus que jamais, le sport pourrait faire évoluer les choses dans la vie des Québécois et engendrer de réels bénéfices sur le plan social.
À une époque où on parle de santé, d’éducation, de persévérance scolaire, d’intégration sociale, il y a un moyen extraordinaire pour tout ça, et c’est le sport, plaide-t-il. C’est une culture du sport, de l’activité physique et du plein air qu’on devrait développer au Québec. Pour y arriver, il faut que les gens qui sont touchés par ça, de façon passionnée, aillent partager leur passion avec la population. Et ça, ça ressemble pas mal à faire de la politique.
(Avec les informations de Jean-François Poirier)