Souvenirs olympiques : la grande carrière de Benoît Huot

Benoît Huot a gagné 20 médailles en 5 Jeux paralympiques.
Photo : Getty Images / Friedemann Voge
À l'occasion du sixième épisode de Souvenirs olympiques diffusé samedi soir à 18 h 30 (HAE) sur ICI Télé, nous revenons sur les exploits du nageur Benoît Huot, gagnant de 20 médailles en 5 Jeux paralympiques. Son ami et ancien coéquipier Philippe Gagnon a bien voulu plonger dans le passé à la demande de Radio-Canada Sports.
Q. Philippe, quand il t’a vu nager aux Jeux du Canada en 1997, Benoît dit que sa vie a changé… Tu es ensuite devenu son mentor. Quel genre de relation vous unissait?
R. Au début, c’était une relation grand frère, petit frère. Benoît a quatre ans de moins que moi, presque jour pour jour. Rapidement, après les Championnats du monde de 1998, c’est devenu une relation de complices, d’amis, une relation profonde qui a évolué et qui dure encore aujourd’hui, bien qu’on ne se voie pas souvent parce que j’habite au Saguenay.
Mais chaque fois qu’on se parle ou qu’on se côtoie, c’est la poursuite de cette relation basée sur une fondation extrêmement solide.
Q. Vous avez vécu ensemble votre baptême du feu aux Jeux de Sydney en 2000. Dans ton cas, c'étaient aussi tes derniers, mais vous avez eu beaucoup de succès. Tu as remporté trois médailles d’or et une d’argent, et Benoît, six médailles, dont trois d’or. Raconte-nous cette expérience que vous avez partagée.
R. Ç’a été nos seuls Jeux ensemble et nous affrontions l’inconnu ensemble, dans un pays où la natation est reine. Nous avons avancé ensemble dans un milieu qui était éblouissant, mais aussi stressant. Nous nous étions mis beaucoup de poids sur les épaules. Alors, c’était plaisant de vivre ça à deux.
Et malgré que nous étions complètement intégrés à l’équipe canadienne, où ça se passe majoritairement en anglais, c’est sûr qu’une relation s’est bâtie parce que nous étions les seuls francophones.
Q. Ces images de vous deux, après votre victoire au 4 x 400 m 4 nages, qu’on voit dans le documentaire, c’est très beau. Parle-nous de cette belle réussite et des sentiments qui vous habitaient alors.
R. C’était notre dernière course du calendrier de compétitions. Chaque course individuelle apporte beaucoup d’énergie, à soi-même, à l’équipe et aux partenaires d’entraînement. Mais lorsqu’on fait un relais, c’est comme si on quadruplait cette énergie et cette joie de vivre.
Et ce dont il faut se rappeler, c’est que cette épreuve a permis au Canada de remporter le titre de meilleure nation des Jeux au total des médailles d’or. Donc, c’était plusieurs émotions dans un seul petit moment qui était grandiose.
Q. Benoît a poursuivi son parcours à Athènes et il a de nouveau gagné six médailles, dont cinq d’or, en plus d'établir trois records du monde. C’est là qu’il a véritablement consolidé sa réputation de grand athlète, n’est-ce pas?
R. Oui, et ce qui est impressionnant de sa carrière, c’est la longévité, à travers ses hauts et ses bas. À Pékin, les résultats n’ont pas été ceux qui étaient attendus (trois médailles de bronze). Il avait eu des ennuis de santé combinés aux performances du nageur brésilien Andre Brasil. À la suite de ces Jeux, il y a eu beaucoup de remises en question. Et il a vraiment su rebondir quatre ans plus tard à Londres (une médaille d’or, une d’argent et une de bronze), où il a été porte-drapeau à la cérémonie de clôture, un honneur exceptionnel.
Et ça s’est conclu à Rio avec une performance extraordinaire au 400 m libre, où il y avait deux nageurs ukrainiens qui dominaient la scène depuis le début des compétitions. Benoît s’est taillé une place sur le podium avec sa meilleure performance à vie dans une épreuve qui est extrêmement longue et dans laquelle on peut se remettre en question des dizaines de fois. Il a su toucher le mur au 3e rang.
Dans l’entrevue qui a suivi, c’était magnifique de voir tout cet accomplissement parce que ce sont des années de travail. C’est la fin qui approchait et il le savait. C’était vraiment émouvant à voir.
Q. Quelles ont été ses grandes forces pour durer si longtemps et connaître autant de succès?
R. La ténacité et la perspective de ne pas s’arrêter aux échecs et de voir sa carrière à long terme, à travers les grands cycles paralympiques de quatre ans. C’est difficile d’être performant sur une aussi longue période. D’avoir été en mesure de garder le cap pendant cinq Jeux, c’est extraordinaire.
Maintenant, je peux le dire, c’est moi qui l’admire Benoît, il est vraiment impressionnant. C’est tout un athlète et c’est une extraordinaire personne.
Q. Avec Chantal Petitclerc, Benoît a été un ambassadeur de grande classe. Il a donné une visibilité dont le mouvement paralympique ne jouissait pas auparavant.
R. C’est vrai. Chantal a vraiment ouvert la voie. C’est la première que les Québécois et les Canadiens ont reconnue dans la rue et à la télévision. Benoît a poursuivi avec cette visibilité-là et ç’a permis au mouvement paralympique d’être mieux connu.
Avec le passage de Benoît, on a aussi appris à connaître d’autres athlètes qui méritaient une grande reconnaissance, au même titre que les athlètes olympiques. Chapeau à Benoît qui a porté le flambeau pendant toutes ces années.
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