Le Québec, paradis du vélo à pneus surdimensionnés d'hiver

Deux cyclistes pratiquent le vélo à pneus surdimensionnés l'hiver.
Photo : Getty Images / vm
La pratique du vélo à pneus surdimensionnés (VPS) l’hiver est en nette augmentation au Québec. La Belle Province offre naturellement des conditions intéressantes pour le « fat bike » et est en voie de devenir la destination de choix pour ses adeptes. Portrait d'un sport en plein essor.
Un texte de Josie-Anne Taillon
Des montagnes pas trop hautes, de la neige bien damée, du froid et beaucoup de bénévoles enthousiastes pour s’occuper des sentiers : c’est ce qui semble être la recette de l’explosion de la pratique hivernale du VPS au Québec.
« Il se passe vraiment quelque chose de spécial au Québec avec la neige. Aux États-Unis, le fat bike est pratiqué autant sur la neige que sur le sable, sur les plages. Ici au Québec, on a une ressource naturelle six mois par année [...] Les gens ont vraiment embarqué là-dedans, les bénévoles dans les centres, les organisations ont vu le potentiel que le fat bike avait. Comme il y a de beaux sentiers, il y a des gens qui viennent, c’est une roue qui tourne. »
Le Québec compte près de 90 endroits, répartis dans plusieurs régions de la province, où les sentiers sont aménagés et entretenus pour la pratique du VPS l’hiver. Une situation qui semble se démarquer en Amérique du Nord. Selon un portrait de l’industrie commandé par le centre Empire 47 à Lac-Delage, près de Québec, l’offre hivernale pour les amateurs de vélo à pneus surdimensionnés reste embryonnaire dans le reste du Canada et même aux États-Unis.
Trop de neige poudreuse dans l’Ouest canadien et des dénivelés un peu trop raides compliquent l’éclosion du sport ailleurs au pays. Le nombre de sentiers, leur entretien, leur proximité et le fait que plusieurs pistes soient dédiées exclusivement au VPS hivernal au Québec semble faire toute la différence.
C’est le cas pour Fabien, un adepte rencontré lors d’une course amicale tenue à Rawdon. Il souligne que les sentiers sont situés « pratiquement dans sa cour » et que ça lui permet de faire du vélo toute l’année. Isabelle, une Montréalaise qui pratique le VPS depuis trois ans, affirme découvrir de nouveaux endroits continuellement : « Ça n’arrête pas de grandir, c’est la frénésie ».
Pour le propriétaire de Docteur Vélo à Sainte-Ambroise-de-Kildare, Bruno Laporte, tout est « interrelié ». « Dès que tu as des sentiers, tu as des endroits pour pratiquer. Tu influences tes amis. Les gens essayent et tombent mordus. »
L’intérêt pour ce sport hivernal se fait ressentir auprès des regroupements de cyclistes. Le club Vélo Épic s’adresse aux passionnés de vélos de montagne. Il y a quelques années, les sorties amicales avaient lieu principalement entre mai et octobre, mais, maintenant, à la demande des membres, elles ont lieu toute l’année, selon Isabelle Hébert, ex-présidente du club.
Pour Gilles Morneau, c'est l’accessibilité des vélos qui a lancé la vague.
Depuis six ans environ, la plupart des manufacturiers offrent des modèles de VPS. « Ça s’apparente à une position et des sentiers de vélo de montagne sauf que, comme la neige est bien damée, au lieu d’être un sentier d’obstacles parsemé de racines et de roches, c’est comme un tapis tout doux, dit-il. Des fois, ça ressemble à de l’asphalte, mais si l’on tombe, ça fait moins mal parce que l’on tombe dans la neige molle, c’est beaucoup plus facile que le vélo de montagne. »
Qui fait du vélo à pneus surdimensionnés l’hiver?
On ne se mentira pas, les adeptes du VPS sont la plupart du temps des cyclistes qui pédalent toute l’année. Même si plusieurs enfourchent leur vélo de montagne durant la belle saison, les cyclistes sur route répondent aussi à l’appel du vélo à pneus surdimensionnés.
Brigitte, 59 ans, se cherchait une solution de remplacement au ski de fond. Un élément exprimé par plusieurs adeptes de vélos à pneus surdimensionnés. « Je faisais déjà du vélo de montagne, j’ai essayé le fat bike et je suis tombée en amour. Quand les conditions des pistes sont moins belles pour le ski de fond, je vais en fat bike. »
Ce sport en plein essor est complémentaire aux autres activités hivernales, selon Gilles Morneau. « C’est un sport d’hiver à part entière, explique-t-il. Quand les conditions de neige ne sont pas belles pour le fat bike, elles sont bonnes pour le ski de fond ou la raquette, et vice versa. »
Selon Bruno Laporte, il n’y a pas que les cyclistes qui sont attirés par le VPS. L’aspect ludique du vélo, avec ses pneus dodus, intrigue plusieurs néophytes qui se cherchent une activité hivernale. « La fourchette d’âge est très variée, ça va des enfants de 7 ou 8 ans, et j’en ai vendu à des gens de 70 ans. »
Du plaisir aussi pour les plus compétitifs
Pour ceux qui aiment se mesurer à leurs pairs, le volet compétitif s’est développé au cours des dernières années. Selon la Fédération québécoise des sports cyclistes (FQSM), le nombre de participants aux compétitions hivernales de VPS a triplé en quatre ans. Dans la province, on compte une dizaine d’événements du genre au cours d’une saison qui commence généralement à la mi-janvier pour se terminer à la mi-mars. En 2015, environ 250 personnes dans tout le Québec avaient participé à des courses lors de la saison froide. En 2019, c’est près de 900 cyclistes qui se sont inscrits à des compétitions hivernales de VPS.
Autre preuve que ce sport est pris au sérieux, la FQSC a homologué les premières compétitions de VPS au Québec en 2014. Cette année, les Championnats québécois de vélo à pneus surdimensionnés auront lieu lors de La traversée du Lac-Saint-Jean à vélo. Un défi de 32 kilomètres où les cyclistes doivent affronter le vent, la neige, la glace, la pluie et quelquefois tous ces éléments en même temps.
Sur les 250 participants cette année, 10 % viennent de l’étranger.
« L’événement est un peu spécial, un peu fou, c’est ce qui fait des souvenirs immortels, la visibilité sur le lac; c’est un désert de neige. C’est l’image qui attire les touristes et les concurrents. »