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Le hockey sous le ciel du Pacifique aux Philippines

Le banc des joueurs de l'équipe nationale des Philippines

Le hockey progresse à petits pas sur l'une des quatre patinoires existantes aux Philippines

Photo : Yuka Fukuma - Facebook - Philippine Ice Hockey Snapshot

Jean-François Chabot
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.

Difficile, voire impensable, d’associer le hockey sur glace à un pays baigné par les eaux chaudes du Pacifique. Et pourtant, notre sport national s'y est fait sa place au soleil dans des circonstances improbables.

On est en 1992. Le film The Mighty Ducks arrive sur les écrans du monde entier. Au même moment, les propriétaires d’une chaîne de centres commerciaux aménagent les deux premières patinoires sur le territoire philippin.

Dans un pays où le basketball est roi depuis le passage des Américains durant la Deuxième Guerre mondiale, ça reste une goutte d’eau dans l’océan.

Pour François Gautier, fils d’un père français et d’une mère philippine, c’est le coup de foudre. Il veut absolument essayer ce sport qui le séduit tant par sa vitesse que par les habiletés qu’il exige.

Il a alors 6 ans. Son frère aîné et une bande de copains s’exercent peu à peu aux rudiments du hockey avec pour tout équipement des patins et des gants usagés, des bâtons et des rondelles que leur mère a rapportés d’un voyage aux États-Unis.

Ils se réunissent une ou deux fois par semaine pour jouer au hockey, un sport qui n’est pas accessible à toutes les bourses, encore moins dans l’archipel aux 7600 îles.

Encore aujourd’hui, impossible d'y trouver un pro-shop pour s’approvisionner en équipement de hockey. L’apparition des commandes en ligne s'avère une bénédiction, même s’il faut parfois patienter quelques mois afin de dédouaner la précieuse marchandise. Un programme de la Fédération internationale de hockey sur glace (IIHF) a récemment permis de livrer 60 équipements complets qui seront mis à la disposition de jeunes moins bien nantis souhaitant pratiquer le hockey , explique François Gautier, joint au téléphone au moment où il venait de quitter la patinoire au terme d'un entraînement.

Il était presque 23 h aux Philippines, preuve que le temps de glace est rare là-bas aussi.

Avec l’élan de la passion

Après un séjour en France pour des études supérieures, François Gautier rentre à la maison. On est en 2006 et il constate que le hockey stagne aux Philippines. Il décide alors de prendre les choses en main.

En l’espace de quelques années, le nombre de joueurs est passé d’une trentaine à plus de 330, garçons et filles confondus (70 % de garçons), selon le plus récent recensement effectué par la Fédération de hockey sur glace des Philippines, dont Gautier est membre fondateur.

Sur la scène nationale, une ligue à quatre équipes regroupe les meilleurs éléments masculins au sein d'un championnat ouvert aux ressortissants étrangers vivant dans cet État insulaire. La plupart d'entre eux résident dans le secteur de Manille. Des compétitions ont aussi lieu dans les autres catégories, tant chez les hommes que chez les femmes.

Cette fédération a vu le jour en 2015. Elle est associée à la Fédération internationale (IIHF). Grâce à la présence d’une poignée de joueurs possédant une double nationalité, les progrès enregistrés ont vite été encourageants.

Certains joueurs sont nés de parents philippins, mais ont grandi loin de leurs terres ancestrales. L’un d’eux, Carl Montano, est originaire de Vancouver et dirige depuis 2011 le programme de hockey mineur.

Il patine au centre de la glace.

François Gautier dans son rôle d'attaquant au sein de l'équipe nationale des Philippines

Photo : Yuka Fukuma - Facebook - Philippine Ice Hockey Snapshot

Sur la scène internationale, François Gautier et sa petite bande de passionnés commencent à récolter les fruits de leur travail acharné.

En 2017, à Kuala Lumpur, en Malaisie, la sélection nationale a signé la plus grande victoire de sa courte histoire. Elle a décroché la médaille d’or aux Jeux de l’Asie du Sud-Est (SEA Games) avec des victoires face à l’Indonésie, Singapour, et surtout un gain de 5-4 contre la Thaïlande en finale.

Dans cette région du monde, les Thaïlandais représentent la grande puissance du hockey.

Aux dires de François Gautier, cette victoire pour l’équipe des Philippines était leur propre version du « Miracle on Ice », réalisée par cette bande d'universitaires américains contre la machine de l’Union soviétique aux Jeux olympiques de Lake Placid en 1980.

Les Philippins seront les hôtes de ce même tournoi en novembre prochain. L’équipe aura l’occasion de défendre son titre devant ses partisans, une perspective importante aux yeux de Gautier.

L’apport étranger

En plus du fait que l’entraîneur de l’équipe nationale soit Tchèque, le hockey philippin compte encore beaucoup sur les influences externes pour assurer sa progression.

Comme tous les autres dirigeants de l’équipe nationale, Daniel Brodan agit en tant que bénévole. Il travaille à temps plein au sein d’une société de crédit établie dans la capitale, Manille.

Quand il n'agit pas comme courtier au sein de l’entreprise de son père spécialisée en assurances, François Gautier vit, respire et mange hockey.

« Honnêtement, nous ne sommes que quatre à bosser pour faire vivre notre fédération. J’ai beaucoup de chapeaux. Je suis à la fois vice-président, arbitre en chef, je suis joueur au sein de l’équipe nationale, je suis entraîneur des juniors, je suis organisateur de tournois et d’événements. Il ne me manque plus que de conduire la Zamboni... (rires) »

— Une citation de  François Gautier

Nous sommes une jeune fédération. Nous avons tout à apprendre. Il y a encore beaucoup à faire. Tous les ans, je vais au congrès de l’IIHF. Je parle avec tout le monde, avec toutes les grandes fédérations. Je découvre ainsi ce qui fonctionne ou ce qui fonctionne moins bien. Leur avis est important pour nous.

C’est dans cet esprit que François Gautier a rencontré Michel Brind’Amour, président du conseil d’administration et directeur du développement à Hockey Canada, au récent Championnat du monde, à Bratislava, en Slovaquie.

« Nous avons discuté d’une possible collaboration pour organiser la préparation de notre équipe nationale en vue de la défense de la médaille d’or aux Jeux de l’Asie du Sud-Est, en novembre. On étudie des options pour tenir des entraînements plus intenses. Rien n’est confirmé pour l’instant, mais les discussions ont cours. Ça reste une question de budget et de disponibilité du côté canadien. »

— Une citation de  François Gautier

Question d’assurer ses arrières, il a aussi entamé des pourparlers avec la Fédération finlandaise.

Ça tombe très bien parce qu’ils viennent de gagner le Championnat mondial contre le Canada. On a aussi quelques joueuses de notre sélection féminine qui habitent et jouent en Australie, ce qui facilite les contacts entre nos fédérations , renchérit-il pour démontrer les moyens mis en œuvre pour rehausser le niveau de jeu.

Les joueurs sont réunis pour la photo d'équipe.

L'équipe des Philippines, médaillée d'argent au Challenge Cup of Asia en avril dernier

Photo : Yuka Fukuma - Facebook - Philippine Ice Hockey Snapshot

Objectifs ambitieux

Au-delà de la défense du titre aux Jeux de l'Asie du Sud-Est, François Gautier pense que les Philippines pourront bientôt rivaliser avec des pays comme le Koweït, la Malaisie et le Kirghizstan pour se tailler une place au sein du Groupe IV au niveau mondial.

Il voit encore plus loin et plus grand.

J’espère que d’ici trois à cinq ans nous pourrons être en division 2B. Je pense que c’est faisable. Je connais les équipes qui jouent en 3A et 3B et je pense qu’on est au même niveau , indique celui qui à 35 ans est le joueur le plus âgé de sa sélection nationale. Le plus jeune a 16 ans.

La division 2B de l’IIHF est composée d’Israël, qui passera en 2A en 2020, de l’Islande, de la Nouvelle-Zélande, de la Géorgie, du Mexique et de la Corée du Nord.

En même temps, j’espère que notre équipe féminine sera aussi impliquée dans un championnat mondial. J’espère pouvoir recruter plus de filles pour y parvenir. C’est vrai qu’il a quand même un sacré niveau.

Soulignons que l'équipe philippine féminine n'a pas encore atteint la plus faible division à l'échelle mondiale.

Gautier vise surtout davantage de stabilité au sein du programme national philippin.

Nous en sommes encore à l’étape des essais et des erreurs, dit-il. On fait pour le mieux avec ce que l’on a. On espère un peu plus de soutien. Notre gouvernement nous aide par l’entremise de la Commission nationale du sport. Le président de notre fédération, Christopher Sy, y contribue de façon importante, surtout parce qu’il en a les moyens. Mais il serait bien d’avoir plus d’engagements de la part du privé.

Monsieur Sy possède et/ou dirige de nombreuses entreprises dans des domaines aussi variés que la sécurité internet, la restauration, le commerce du café et les postes de distribution d'essence.

L'équipe féminine de hockey des Philippines

L'équipe féminine de hockey des Philippines

Photo : Courtoisie Yuka Fukuma - Facebook - Philippine Ice Hockey Snapshot

Bien branché

En attendant, François Gautier et plusieurs de ses amis adeptes du hockey s’intéressent de près aux activités de la LNH.

Mercredi soir, le 12 juin (jeudi matin là-bas), journée de l’indépendance nationale aux Philippines, Gautier a déjeuné en regardant le septième match de la finale de la Coupe Stanley entre les Bruins de Boston et les Blues de Saint Louis, remporté par les Blues.

Abonné à l’application de la LNH, Gautier a vibré en même temps que nous, de son côté de la planète hockey.

Il ne prenait pour ni l'une ni l'autre des deux équipes. Il reste partisan des Ducks d'Anaheim, équipe qu'il a vue au grand-écran en 1992 quand elle s'appelait Mighty Ducks et qui a éveillé sa passion pour le hockey.

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