Lance Stroll est-il (seulement) un pilote du dimanche?

Le pilote canadien Lance Stroll au Grand Prix du Canada.
Photo : La Presse canadienne / Paul Chiasson
Prenez note que cet article publié en 2019 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
BILLET - Le Québécois Lance Stroll a été encensé par la presse britannique après sa performance électrisante lors du Grand Prix du Canada au circuit Gilles-Villeneuve.
Deux heures après la course, Lawrence Stroll était au téléphone.
Au moment de quitter le circuit, j’ai simplement levé mon pouce en le saluant de loin. Il m'a répondu par un grand sourire, et lui aussi a levé son pouce.
Son fils a sauvé l’équipe Racing Point du naufrage, après un samedi noir.
Le moteur Mercedes-Benz du Québécois est parti en fumée et en flammes dans la dernière séance d'essais libres (FP3), forçant l'équipe à installer pendant la pause du dîner un moteur usagé de spec 1 n'ayant pas la même puissance que le moteur spec 2 utilisé actuellement.
En déficit de puissance, de 2 dixièmes au tour, a précisé Stroll, il a terminé la Q1 à plus de 2 secondes du temps de la pole position et a été relégué dans le groupe des exclus.
La séance de qualification a été désastreuse pour Stroll et son coéquipier Sergio Pérez, et les mines étaient basses dans le garage de Racing Point.
Dimanche, Stroll a fait ce qu'il nous a habitués à faire, soit de réussir à se faufiler entre les voitures parties devant lui pour gagner des places. Il en a dépassées trois dans le premier tour.
« Typical » (typique), ai-je entendu dans la salle de presse. Selon moi, ça sonnait comme un compliment.
Et il ne s'est pas arrêté là. Il a été particulièrement brillant devant ses partisans.
Contrairement à 2018, les amateurs qui avaient rempli le gradin portant son nom à la sortie de l'épingle côté est ont pu le voir à 70 reprises, soit du premier au dernier tour.
Et ils ont suivi sa progression de la 17e à la 9e position.
Les commentaires des Britanniques, durs samedi, ont été dimanche dithyrambiques. Et les notes, excellentes.
« Fantastic on Sunday. Extremely impressive » (fantastique le dimanche, extrêmement impressionnant) : 8 sur 10.
« Boy, is he great on race day » (qu’est-ce qu’il est bon en course) : 8,5 sur 10.
Malgré un moteur Mercedes-Benz usagé, de spec 1, avec un déficit de puissance, il a réussi à se faufiler au sein du peloton pour entrer dans les points, bien appuyé par une stratégie osée. Il a quand même roulé avec le même train de pneus (durs) pendant 46 tours…
Ses dépassements sur son coéquipier Sergio Pérez, sur Antonio Giovinazzi, et surtout sur Carlos Sainz fils ne sont pas passés inaperçus.
« Bold moves » (manœuvres osées) est l’expression qu'ont choisie les Britanniques. Des manœuvres qui lui ont permis de marquer deux points grâce à sa 9e place.
Tout comme en 2017, il est parti de très loin, de la 17e place sur la grille de départ, et a réussi à gagner 8 positions en 70 tours.
Lawrence Stroll n’est pas homme à se contenter d’une 9e position, mais compte tenu des circonstances difficiles du week-end, il ne pouvait pas bouder l’exploit de son fils sur le circuit Gilles-Villeneuve.
Il sait aussi que le meilleur est à venir en raison du travail qu'on abat à l’usine de Silverstone en ce moment pour sortir le plus vite possible une évolution de la voiture. Le soulagement était donc palpable dans le clan Racing Point après la course.
L’équipe a prévu faire rouler la RP19B à la fin juillet, en Allemagne, ou au pire en Hongrie juste avant la pause estivale obligatoire.
En attendant la RP19B, Lance Stroll tente en vain de tirer tout le potentiel de performance de sa voiture le samedi. Mais il en est incapable.
Il n’a brillé qu’une fois en qualification, c’était sur le circuit ultra rapide de Monza, en Italie, sous la pluie en 2017 dans une Williams. On a loué son courage ce jour-là. Il avait inscrit le 4e chrono.
Le jeune homme de 20 ans doit trouver le moyen de faire (nettement) mieux le samedi. En salle de presse, les journalistes font même des blagues à son endroit. Mais il ne s’énerve pas quand on lui pose la question.
« Ça va venir, dit-il calmement, quand on aura tous les éléments en main. »
Son calme est un signe évident de maturité… et de sérénité. Celle du pilote qui sait qu’il gardera son volant à la fin de la saison quoi qu’il arrive.
À Montréal, sans cette casse de moteur en FP3, il avait enfin la possibilité de passer en Q2. Mais une fuite hydraulique dans le bloc en a décidé autrement.
Il reste qu’il n’a pas encore réussi cette saison à passer le stade de Q1, soit la première portion de la séance qui élimine les cinq plus lents. Il a toujours été battu par son coéquipier Sergio Pérez (7-0).
Pas question d’inclure ses résultats de 2018 pour noircir le tableau. Il ne roulait pas dans la même voiture ni pour la même équipe.
Seuls ses résultats de cette saison comptent, et le samedi, en qualification, c’est mauvais.
C’est là-dessus qu’il doit travailler en priorité, avec son ingénieur, pour se débarrasser au plus vite de cette étiquette de « pilote du dimanche ».