« J’ai joué la meilleure game de ma vie, mais je ne m’en rappelle pas… »
Jeremy Gouin-Gosselin, ex-joueur de football de 17 ans
Jeremy Gouin-Gosselin, ex-joueur de football de 17 ans
Le football, c’est plus qu’une passion pour quelque 30 000 jeunes Québécois.
C’est aussi un sport où le risque de commotions cérébrales est très élevé, autant sinon plus qu'au hockey. Au point où des joueurs doivent ranger leurs crampons, trop blessés.
Pourtant, ni le Réseau du sport étudiant du Québec (RSEQ) ni Football Québec - les deux organismes chargés de les encadrer - n’ont la moindre idée du nombre de commotions que les joueurs subissent. Même si les écoles sont censées les déclarer.
Le RSEQ, qui compte environ 186 000 élèves-athlètes, n'emploie aucun responsable de la sécurité, a appris une équipe de l'émission Enquête.
Quant à Football Québec, son « Règlement de sécurité » ne contient pas une seule ligne sur l’obligation pour les équipes de se doter d’un protocole de détection et de gestion des commotions cérébrales. Pas plus que celle de respecter un protocole de retour au jeu sécuritaire.
Le directeur général de Football Québec, Jean-Charles Meffe, n'a aucune idée du nombre de commotions cérébrales qui se sont produites au sein des équipes membres de sa fédération.
Jean-Charles Meffe, directeur général de Football Québec
Du côté des écoles, où le football est en pleine expansion, les mesures prises sont inégales. Nous avons fait des demandes d’accès à l’information dans une trentaine d'écoles ayant des équipes de football dont celles des 20 équipes de division 1 et 1b qui, en principe, constituent l’élite du football scolaire québécois.
Nous voulions savoir de quelle information les écoles disposaient pour gérer les commotions cérébrales. Selon les experts, il est essentiel qu'une école ait une documentation écrite adéquate.
Les résultats selon la documentation reçue
Selon la documentation reçue, le Collège Notre-Dame fait partie des écoles les mieux outillées. Et on constate que mieux les écoles le sont, plus leur nombre de commotions cérébrales est élevé. Ce qui signifie probablement, selon nous, qu’elles détectent mieux les commotions, et non que leurs joueurs en font plus.
Le Collège Notre-Dame fait partie des écoles les mieux outillées pour gérer les commotions cérébrales.
Dr Dave Ellemberg, auteur du livre Les commotions cérébrales dans le sport
Étude réalisée de 2008 à 2010 par une équipe du Research Institut au Nationwide Children’s Hospital de Colombus, en Ohio, dans des écoles secondaires américaines. L’étude portait sur la pratique de 20 sports en particulier.
À NOTER : Cette étude ayant été réalisée aux États-Unis, il est normal que le hockey y soit sous-représenté en raison de la moins grande popularité de ce sport chez les jeunes américains.
Aux États-Unis, près de la moitié des victimes de commotions cérébrales liées au sport chez les jeunes sont âgées de 12 à 15 ans.
Source : Ferguson RW. Safe Kids Worldwide Analysis of CPSC NEISS data, 2013
Il y a les commotions, mais il y a aussi les sous-commotions. Des chocs qui ne sont pas assez importants pour provoquer une commotion cérébrale, mais qui s’accumulent, fragilisent le cerveau et finissent à long terme par avoir les mêmes impacts qu'une commotion.
Ces coups à répétition, Étienne Boulay dit en avoir reçu au moins 1000 fois.
Lors d’un choc, le cerveau se déforme et les fibres nerveuses se rompent en heurtant les parois internes du crâne.
L'activité chimique et électrique dans le cerveau est alors perturbée pendant plusieurs jours, voire des semaines.
On les détecte par plusieurs symptômes, mais souvent, les dommages causés au cerveau par les commotions ne sont pas décelés par les radiographies et autres examens du genre.
Risques à long terme
Une personne qui a déjà subi une commotion cérébrale est cinq fois plus à risque d’en faire une nouvelle.
Des commotions cérébrales mal soignées ou répétées peuvent entraîner des séquelles graves et permanentes même des années plus tard.
La force d’accélération moyenne nécessaire pour causer une commotion cérébrale chez un humain est de 80 à 100 g, soit l’équivalent d’une voiture qui frappe un mur de briques à 60 km/h.
Un « g » correspond à l’accélération d’un objet soumis à la gravité terrestre.
des commotions cérébrales ne sont pas diagnostiquées, selon plusieurs experts.
Après avoir reçu un coup à la tête lors d'un match de football, Jeremy Gosselin-Gouin, 17 ans, raconte quels ont été les symptômes qui ont poussé ses proches à l'amener à l'hôpital.
Signes extérieurs
Symptômes rapportés par la personne
Source : Hôpital de Montréal pour enfants
Les symptômes d’une commotion se manifestent parfois plus de 48 heures après le choc.
Le jeune François Rocheleau en sait quelque chose : une semaine après avoir subi une commotion, ses symptômes l'ont poursuivi jusqu'en classe, où il avait de la difficulté à se concentrer.
Appelez une ambulance si…
Elle perd connaissance, a de la difficulté à respirer, se plaint de faiblesse ou d’engourdissement ou est en convulsion.
Rendez-vous à l’hôpital…
Si la personne présente l’un des symptômes suivants, même après avoir vu un médecin :
Source : Hôpital de Montréal pour enfants
Le temps de repos qu’il faut en général avant que le cerveau guérisse d'une commotion cérébrale. Il s'agit du seul traitement efficace.
Repos du corps…
Et de l’esprit!
À l’école…
Et si je ne le fais pas?
Lorsqu'on a eu trois commotions, nos probabilités d'avoir des maladies neurodégénératives comme la maladie d'Alzheimer augmentent par un facteur de 10, selon le Dr Dave Ellemberg.
Étienne Boulay, ex-maraudeur des Alouettes de Montréal et des Argonauts de Toronto
Documents pertinents
Études scientifiques et statistiques (en anglais)
À regarder…
Livre
Ellemberg, Dave. Les commotions cérébrales dans le sport. Une épidémie silencieuse. Montréal, Les Éditions Québec-Livres, ISBN 9782764022207, 2013, 392 pages