Photo : Lewis Benjamin Foote/University of ManitobaDROITS DES TRAVAILLEURS
La grève générale de Winnipeg
« La révolte de 1919 a laissé dans son sillage des traces mitigées. La répression de la grève générale de Winnipeg et des centaines d'autres conflits au pays démoralisèrent les travailleurs. […] Il a fallu attendre une autre génération avant que le mouvement ouvrier ne retrouve la popularité dont il avait joui à l'époque. »
- Musée canadien d’histoire
Près de 30 000 travailleurs de Winnipeg déclenchent une grève générale le 15 mai 1919, sur fond de chômage massif, d’agitation sociale et de syndicalisme militant. Des grèves de solidarité sont déclenchées dans une trentaine de villes, ailleurs au pays. Au cœur des revendications : la reconnaissance syndicale et une augmentation des salaires. Le comité antigrève, formé d’hommes influents de Winnipeg, qualifie les grévistes de bolcheviques et « d'ordures étrangères », et la grève, de conspiration révolutionnaire. L’arrêt de travail dure six semaines et se solde par les événements tragiques du Bloody Saturday. Ce jour-là, le 21 juin, la GRC charge les manifestants venus protester contre l’arrestation, quelques jours plus tôt, de 10 chefs grévistes. Bilan : deux morts et 30 blessés. Les grévistes retournent au travail sans avoir obtenu gain de cause.
Pour Dominique Clément, la grève de 1919 est déterminante, même si, au départ, elle a fait reculer les droits. Il rappelle qu’elle a mené à la création de règles particulièrement restrictives qui ont limité les droits d’association et de parole. Il mentionne les amendements à la loi sur l’immigration permettant de déporter toute personne née à l’extérieur du Canada et accusée de sédition. Cette grève, dit-il, est tout de même « l’ancêtre » des premières organisations de défense des droits civils au Canada. Ces groupes, dit-il, étaient menés par des ouvriers, qui n’ont pas oublié la dure répression de la grève de Winnipeg.
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DROITS DES FEMMES
La cause de Thérèse CasgrainPhoto : Radio-Canada (1963)
« Il a fallu batailler ferme. Nous sommes allées 15 fois à Québec présenter des projets de loi avant de vraiment obtenir le droit de vote et l’éligibilité pour les femmes. »
- Extrait d’une entrevue diffusée à radio-canada le 7 juin 1963
Cette politicienne et féministe montréalaise se bat sans relâche dès 1921 pour obtenir le droit de vote des femmes au Québec. Elle se bute à l’opposition non seulement des politiciens et du clergé, mais aussi à celle de nombreuses femmes qui, selon Mme Casgrain, « ne croyaient pas aux vertus du suffrage féminin et refusaient de déroger aux lois de l’Église et de leurs maris ». Elle obtient gain de cause le 25 avril 1940, avec l’adoption par le Parlement du projet de loi 18, qui donne aux Québécoises le droit de vote et d’éligibilité. Autre victoire en 1945 : Thérèse Casgrain convainc le gouvernement canadien de verser les chèques d’allocations familiales aux femmes plutôt qu’aux maris. Elle est aussi la première femme à diriger un parti politique dans l’histoire canadienne. En 1951, elle est élue chef de l’aile québécoise de la Fédération du commonwealth coopératif (CCF), l’ancêtre du Nouveau Parti démocratique (NPD). Elle préside la Ligue des droits de la femme de 1928 à 1942. Elle fonde la Fédération des femmes du Québec en 1966 et est nommée sénatrice en 1970.
Les Manitobaines sont les premières à obtenir le droit de vote au pays, en janvier 1916. Les Québécoises sont les dernières. Au niveau fédéral, les femmes ont le droit de vote depuis 1918.
Selon Lucie Lamarche, le droit de vote des femmes est la plus grande expression de l’égalité citoyenne entre les deux sexes. Ce droit n’a pas réglé toutes les inégalités dont elles sont victimes, précise-t-elle, mais il leur a permis d’exister et d’agir dans l’espace public et politique : « Le droit de vote des femmes, c'est un « droit-outil » à forte portée symbolique ».
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- Entrevue avec Thérèse Casgrain diffusée à Radio-Canada en juin 1963
Photo : PC/Blaise Edwards (1988)DROIT À L’AVORTEMENT
Le combat d’Henry Morgentaler
« Je suis prêt à laisser ma peau même pour cette lutte parce que je trouve que c'est une lutte pour la justice, pour la dignité des femmes. »
- Henry Morgentaler
En 1967, le Dr Henry Morgentaler déclare devant un comité des Communes sur l’avortement illégal que toute femme devrait avoir le droit de mettre fin à sa grossesse sans risquer la mort. Par la suite, il se consacre à la lutte pour l’avortement légal et sécuritaire. En 1968, il ouvre une première clinique d’avortement à Montréal, alors que l’interruption de grossesse est passible d’une peine d’emprisonnement à vie. En 1973, il avoue avoir pratiqué 5000 avortements. II est poursuivi à plusieurs reprises, et purge une peine de 10 mois de prison en 1975. Malgré de nombreuses embûches juridiques et des menaces, il continue d’ouvrir des cliniques dans tout le pays. Finalement, en janvier 1988, la Cour suprême du Canada lui donne raison. Le plus haut tribunal au pays, avec l’arrêt Morgentaler, décriminalise l’avortement.
Lucie Lamarche explique que l’accès à l’avortement est encore aujourd’hui un enjeu majeur dans plusieurs provinces canadiennes et hors des grands centres. « Dans le contexte canadien, souligne la juriste, la décision Morgentaler cristallise l'essence de l'expression “droits des femmes à la santé reproductive”. Ou dit autrement, le droit de choisir ses grossesses de manière sécuritaire sans être soumise au jugement moral du corps médical et au risque d'une accusation criminelle. La position du Canada est unique et il faut la protéger.
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Photo : Maurice Duplessis, lors de son procès l'opposant à Frank Roncarelli. Photo : Radio-CanadaLIBERTÉ DE RELIGION
Duplessis contre les Témoins de Jéhovah
« La sympathie que cet homme démontre pour les Témoins de Jéhovah, de façon aussi flagrante, répétée et effrontée, constitue une provocation de l'ordre public et de l'administration de la justice, et contrevient aux objectifs de la justice. »
- Maurice Duplessis, cité par Jacques Lacoursière dans Histoire populaire du Québec: 1896 à 1960
En 1946, sous le régime de Maurice Duplessis, des centaines de Témoins de Jéhovah sont arrêtés pour avoir distribué des brochures considérées comme diffamatoires et séditieuses par les autorités. Frank Roncarelli, propriétaire d’un restaurant florissant de la rue Crescent à Montréal, paye la caution de plusieurs centaines de Témoins de Jéhovah. En réaction, le premier ministre et procureur général, Maurice Duplessis, donne l’ordre d’annuler le permis d’alcool du restaurateur. Ce dernier porte alors plainte contre M. Duplessis. En 1959, Roncarelli obtient gain de cause devant la Cour suprême. Le tribunal conclut que le premier ministre a outrepassé ses fonctions, et il condamne Duplessis à verser au restaurateur 46 000 $ en dommages et intérêts.
Selon Dominique Clément, la Cour suprême n’avait pas l’habitude jusque-là d’intervenir dans la défense des droits de la personne. Avec l’affaire Roncarelli, explique-t-il, le plus haut tribunal au pays a utilisé son pouvoir pour protéger le droit à la religion au Canada et pour forcer le premier ministre Duplessis à arrêter les recours abusifs. D’après l’historien, la Cour suprême envoie ainsi un message aux premiers ministres des provinces et du Canada : « Si vous commettez des abus si évidents, nous allons intervenir! Vous ne pouvez pas profiter ainsi de vos pouvoirs! »
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Photo : Radio-Canada (1995)DROITS DES HOMOSEXUELS
L’affaire Egan et l’orientation sexuelle
« L'orientation sexuelle est une caractéristique profondément personnelle qui est soit immuable, soit susceptible de n'être modifiée qu'à un prix personnel inacceptable et qui, partant, entre dans le champ de protection de l'art. 15 parce qu'elle est analogue aux motifs énumérés. »
- Extrait de la décision de la Cour suprême
James Egan vit en couple avec John Nesbit depuis une trentaine d’années lorsqu’il commence à recevoir en 1986, à l’âge de 65 ans, la pension de sécurité de la vieillesse. À 60 ans, John Nesbit demande alors l’allocation de conjoint. Sa demande est rejetée, car en vertu de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, le conjoint est défini comme une personne du sexe opposé. Le couple entame une poursuite en vertu de l’article 15 (droits à l’égalité) de la Charte canadienne des droits et libertés. Ils perdent en première instance et en Cour d’appel, et l’affaire se retrouve devant la Cour suprême. En 1995, ce tribunal conclut d’une part que la définition de conjoint dans la Loi sur la sécurité de la vieillesse est constitutionnelle. Mais du même souffle, les neuf juges s’entendent sur le fait que la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle est interdite en vertu de l’article 15 de la Charte. L’orientation sexuelle entre ainsi dans le champ de protection de la Charte.
Le Québec est la première province à interdire dès 1977 la discrimination basée sur l’orientation sexuelle. Les autres provinces et territoires feront de même au cours des années suivantes.
D’après Dominique Clément, l’affaire Egan est un des premiers cas juridiques qui reconnaît le droit des gais et des lesbiennes de vivre à l’abri de la discrimination. Il s’agit là, croit-il, d’un moment symbolique pour l’un des mouvements sociaux les plus importants au Canada. Un mouvement qui a commencé dans les années 70, et qui est encore bien vivant aujourd’hui, souligne l’historien.
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- L’orientation sexuelle en quelques chiffres - Parlement du Canada
DISCRIMINATION RACIALE
« On ne sert pas les gens de couleur ici »
« Les éléments de preuve indiquent que le refus des employés du défendeur (la taverne) de vendre de la bière à l’appelant (Fred Christie) s'est fait calmement, poliment et sans faire de scène et sans émoi. Si l’appelant a attiré l’attention à cette occasion, c’est parce qu’il a persisté à demander de la bière malgré qu’on ait refusé de le servir et qu’il est allé jusqu’à appeler la police, ce qui était entièrement injustifiable dans les circonstances. »
- Extrait du jugement de la Cour suprême
Fred Christie, un chauffeur privé d’origine jamaïcaine, vit depuis une vingtaine d’années au Québec. Ce partisan du Canadien va souvent au Forum de Montréal. En 1936, il entre dans la taverne du Forum avec deux amis et commande trois bières, mais on refuse de le servir. Le barman et le gérant adjoint lui expliquent que l’établissement ne sert pas les gens de couleur. Fred Christie appelle la police en pure perte. M. Christie poursuit la taverne York pour 200 $ en dommages pour l’humiliation subie. Il obtient gain de cause en première instance, et le juge lui accorde 25 $ tout en ordonnant à la taverne de payer ses frais juridiques. La taverne fait appel de la décision en arguant qu’une entreprise privée a le droit de faire ce qu’elle veut pour protéger ses intérêts commerciaux. La taverne gagne son appel, et Fred Christie porte sa cause devant la Cour suprême. En décembre 1939, ce tribunal conclut que la liberté d’entreprise est le principe général de la loi au Québec. Ainsi, précise la Cour, pourvu que le commerçant ne viole pas la loi et ne va pas à l’encontre des bonnes mœurs et de l’ordre public, il est libre de refuser tout membre du public. Autrement dit, ne pas servir les gens de couleur faisait à l’époque partie de bonnes mœurs.
Selon Dominique Clément, l’affaire Christie reflète parfaitement le racisme omniprésent au Canada à l’époque tant dans la société que dans le système juridique. Il fait remarquer que pas un juge ni même l’avocat de Fred Christie n’a suggéré que cela ne dérangeait pas les Blancs de côtoyer des Noirs dans un restaurant. « On a tenu pour acquis que les Blancs ne voulaient pas être dans un restaurant avec un Noir ». On assiste à l’époque, selon l’historien, à la naissance d’un mouvement antidiscrimination pour défendre Fred Christie, qui regroupe des Juifs, des Noirs et des syndicats.
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Photo : Radio-Canada (1983)DISCRIMINATION CONTRE LES AUTOCHTONES
L’affaire Lovelace ou la double oppression
« Nous, les femmes autochtones, croyons que personne n'a le droit de subir de la discrimination. Je pense que même Dieu serait d'accord avec moi. »
- Sandra Lovelace (1983)
Sandra Lovelace, une Malécite du Nouveau-Brunswick, épouse un aviateur américain en 1970 et s’établit en Californie. En se mariant avec un non-Autochtone, elle perd son statut d’Indienne. En revanche, un homme n’aurait pas perdu son statut en épousant une non-Autochtone. Son mariage prend fin quelques années plus tard, et elle retourne dans sa communauté malécite, au Nouveau-Brunswick. Ni elle ni ses enfants n’ont accès au logement, aux soins de santé et à l’éducation puisqu’ils n’ont pas le statut d’Indien. Sandra Lovelace présente alors en 1977 une plainte officielle contre le Canada au Comité des droits de l’homme des Nations unies, pour dénoncer la discrimination fondée sur le sexe inscrite dans la loi canadienne sur les Indiens. Le Comité lui donne gain de cause en 1981, et juge que l’article 12 de la Loi sur les Indiens est discriminatoire envers les femmes, en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (article 27). Le Canada a finalement modifié la Loi sur les Indiens en 1985, en redonnant le statut d’Indien aux Amérindiennes mariées à des non-Autochtones et à leurs enfants.
Lucie Lamarche constate que, même si la Loi des Indiens a changé, tout n’est pas réglé pour autant. « Pour plusieurs, la question de l’acquisition et de la transmission du statut d'Indien régie par le droit des Blancs constitue un acte historique et progressif de génocide culturel », explique la juriste. « Le droit pose des limites à la transmissibilité de ce statut, ajoute la chercheuse. Plus qu'une question de droit à l'égalité, nous sommes ici confrontés au problème du colonialisme canadien qui tente de limiter le décompte du nombre d'Indiens sur le territoire. Le droit des Autochtones à l'autodétermination est donc atteint. »
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- L’affaire Lovelace - International Network for Economic, Social and Cultural Rights (en anglais)
Photo : Radio-Canada (1993)DROITS DES PERSONNES HANDICAPÉES
L’affaire Latimer ou tuer par compassion
« Par ses actes et ses paroles, il (Robert Latimer) soutient que certaines personnes handicapées représentent tellement un fardeau pour le reste de la société qu'on devrait, en toute légitimité, mettre fin à leur vie. »
- Marie White, alors présidente du Conseil des Canadiens avec déficience (mars 2006
En octobre 1993, Robert Latimer, un fermier de la Saskatchewan, tue sa fille de 12 ans, Tracy, en l’empoisonnant au monoxyde de carbone. L’enfant, atteinte de paralysie cérébrale, ne pouvait ni parler, ni marcher, ni s’alimenter seule. Durant une longue saga judiciaire qui le mènera en Cour suprême, Robert Latimer explique qu’il a enlevé la vie à sa fille pour la soulager de ses souffrances. Reconnu coupable de meurtre au deuxième degré, il est condamné en 2001 à une peine d’emprisonnement à perpétuité. Il obtient la libération conditionnelle complète en décembre 2010. Cette affaire a suscité tout un débat au pays sur l’euthanasie, qui a vivement inquiété de nombreux défenseurs des personnes handicapées. Ces derniers ont réalisé que, pour bien des citoyens, le geste de Robert Latimer était justifiable parce que la victime était lourdement handicapée et n’avait pas une bonne qualité de vie. Pour le Conseil des Canadiens avec déficience, une telle conviction menace les personnes handicapées et contrevient à leurs droits constitutionnels.
Selon Dominique Clément, la Cour suprême a clairement établi, dans cette affaire, qu’on n’a pas le droit de tuer quelqu’un parce qu’il est handicapé. Le débat sur l’éthique en fin de vie se poursuit encore aujourd’hui, et les groupes de défense des personnes handicapées y participent activement, notamment en s’opposant au suicide assisté.
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Photo : AFP/AFP/John MooreDROIT À LA JUSTICE
La détention de l’enfant-soldat Omar Khadr
« Le Canada a activement participé à un processus contraire aux obligations internationales qui lui incombent en matière de droits de la personne et a contribué à la détention continue de l'intimé, de telle sorte qu'il a porté atteinte à son droit à la liberté et à la sécurité de la personne que lui garantit l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, et ce, de manière incompatible avec les principes de justice fondamentale. »
- Communiqué de la Cour suprême (janvier 2010)
En 2002, Omar Khadr, un Canadien âgé de 15 ans, est arrêté en Afghanistan pour le meurtre d’un militaire américain. L’enfant-soldat est expédié sans procès à la prison de Guantanamo. En 2010, le jeune homme plaide coupable à cinq chefs d’accusation de crimes de guerre, dans le cadre d’une entente entre ses avocats et le gouvernement américain. Il est finalement rapatrié au Canada en 2012, où il purge sa peine dans une prison fédérale à sécurité moyenne de l’Alberta. De l’avis des tribunaux canadiens, le droit d’Omar Khadr à la justice a été violé pendant toutes ces années. En avril 2009, la Cour fédérale conclut que le Canada a l’obligation de protéger Omar Khadr et de veiller au respect de ses droits fondamentaux, notamment ceux reconnus par la Convention relative aux droits de l’enfant. Selon la Cour fédérale, le Canada doit exiger le rapatriement du jeune homme. En août 2009, la Cour d’appel fédérale confirme le jugement de la Cour fédérale. En janvier 2010, la Cour suprême du Canada conclut à l’unanimité que les autorités canadiennes ont violé les droits d’Omar Khadr, mais le tribunal ne réclame pas son rapatriement.
Lucie Lamarche cite un article de La Presse dans lequel on souligne que si Omar Khadr avait été jugé au Canada, il aurait eu droit à un traitement adapté à son âge. La juriste retient de cette histoire « infiniment triste et politique » que « les enfants, y compris les enfants-soldats, ont des droits, dont celui d'être protégé par le système judiciaire, même en ces temps troublés par le terrorisme et la raison d'État ».
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- Pas de rapatriement exigé - article de ICI.Radio-Canada.ca
Photo : Radio-Canada (2002)DROIT DE VOTE DES DÉTENUS
La croisade judiciaire de Richard Sauvé
« Le retrait du droit de vote fondé sur une supposée absence de valeur morale est incompatible avec le respect de la dignité humaine qui se trouve au cœur de la démocratie canadienne et de la Charte »
- extrait du jugement de la Cour suprême (juge en chef Beverley McLachlin)
Richard Sauvé, un motard du club Satan's Choice, est condamné à 25 ans de prison en 1978 pour complicité dans le meurtre d’un membre d’une bande rivale. Il entreprend en prison sa lutte devant les tribunaux pour obtenir le droit de vote pour les détenus des pénitenciers fédéraux. Un combat qu’il poursuivra longtemps après sa remise en liberté en 1994. Il soutient que la Loi électorale du Canada contrevient à plusieurs articles de la Charte canadienne des droits et libertés. En 1993, il obtient gain de cause devant la Cour suprême du Canada. Cette même année, le Parlement accorde le droit de vote seulement aux détenus purgeant des peines de moins de deux ans. Richard Sauvé retourne devant les tribunaux pour contester de nouveau la loi électorale. La Cour suprême du Canada lui donne raison en 2002. Par un vote serré de cinq contre quatre, le plus haut tribunal au pays statue que voter est un droit fondamental, et que la loi électorale contrevient à la Charte. À partir de ce moment, tous les détenus des pénitenciers fédéraux ont le droit de voter aux élections et aux référendums fédéraux, peu importe la durée de leur peine.
Lucie Lamarche explique que pendant des années, dans tout le pays, des ONG, dont l’Office des droits des détenus, ont fait des pressions afin d’obtenir le droit de vote pour les détenus de juridiction fédérale. Ainsi, ajoute-t-elle, Richard Sauvé et les autres détenus n’ont pas mené la bataille seuls. Et aujourd’hui, « ce droit ne peut être limité ou nié pour des raisons morales (les criminels héritent des conséquences du vieux concept victorien de mort civique) ou de convenance (c'est trop compliqué d'organiser le vote dans les prisons) ».
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