On attribue aux rassemblements privés la légère hausse des cas de COVID-19 observée au Québec ces dernières semaines. Le déconfinement entraîne un relâchement qui n‘est pas sans conséquence. Vous serez peut-être surpris de vous reconnaître dans des situations à risque.
Comme vous, Stéphanie et Miguel, deux personnages fictifs au coeur de nos mises en situation, se déconfinent. Après plusieurs semaines passées à la maison et sans contact avec leurs proches, ils sont enthousiastes de les revoir.
Mais, sans se méfier, ils se placent dans des situations en apparence toute banale qui augmentent les risques de contracter la COVID-19, et même de propager la maladie autour d’eux. Regardez ce qu’ils ont fait et voyez si vous aussi avez baissé la garde.
Un dîner en famille
Les grands-parents de Stéphanie l’ont invitée à dîner avec sa soeur, qui vient d’avoir un enfant. Miguel les a rejoints après le travail.
Niveau de risque : élevé*
Ils sont six et proviennent d’un maximum de trois ménages. La petite cuisine ne leur permet toutefois pas de garder une distance entre eux de 2 mètres. Seuls les membres d’un même ménage (qui résident à la même adresse) n’ont pas à respecter l’éloignement physique.
Même si la chaleur est accablante à l’extérieur, il est préférable d’ouvrir la fenêtre pour assurer une bonne circulation d’air, plutôt que de mettre en marche l'air climatisé, qui projette un courant d’air directement au-dessus de la table où tout le monde est assis.
La nourriture à partager, placée au centre de la table et que tous peuvent manipuler, est à éviter. Une seule personne devrait assurer le service du repas.
Plus vulnérables à la maladie, les personnes âgées de 70 ans et plus devraient éviter, ou du moins limiter, les contacts avec d’autres personnes, dont les enfants en bas âge. Des moyens de communication alternatifs sont à privilégier pour garder contact avec les aînés.
Oubliez en outre les salutations d’usage, comme vous serrer la main et vous faire la bise.
La responsabilité de l’hôte
Recevoir chez soi n’est pas de tout repos.
La sécurité des invités repose entre les mains de l’hôte, qui doit d’abord s’assurer que ceux-ci se lavent les mains à leur arrivée et régulièrement par la suite.
La maison doit aussi être préparée en conséquence :
- nettoyez les surfaces souvent touchées, comme les poignées de porte et les interrupteurs;
- réservez si possible une salle de bain pour vos invités, ou désinfectez celle qu’ils utiliseront.
Gardez en note le nom de vos invités et la date de leur visite. Ces informations serviront à la santé publique si jamais l’un d’entre eux reçoit un diagnostic de COVID-19.
Une balade en voiture
Pour lui éviter de prendre le transport en commun, Stéphanie a proposé à son amie Naomi de la conduire à Terrebonne, où elle doit retrouver ses parents.
Niveau de risque : faible*
Le covoiturage entre personnes de foyers différents est déconseillé en raison de la proximité à l’intérieur d’une voiture. Il est sinon recommandé que le passager s’assoie à l’arrière ou que le couvre-visage soit porté par tout le monde à bord du véhicule.
La durée du trajet est aussi à prendre en considération. Plus il se prolonge, plus le risque augmente, d’où l'importance de privilégier l'ouverture des fenêtres plutôt que l’air climatisé, afin d’assurer une bonne circulation de l’air à bord.
Toutefois, le bruit d’un véhicule qui roule les fenêtres ouvertes et la musique à plein volume incitent à parler plus fort, et donc à projeter davantage de gouttelettes respiratoires possiblement infectées.
Une sortie à la plage
Stéphanie et Miguel ont loué un chalet au bord d’un lac pour la fin de semaine. Ils en ont profité pour inviter leurs amis à passer la journée avec eux à la plage.
Niveau de risque : modéré*
Ils ont fait erreur en pensant qu’ils pouvaient être plus de dix sur une plage privée, même si elle est suffisamment grande pour permettre l’éloignement physique recommandé (qu’ils ne respectent pas pour autant). Les rassemblements de plus de dix personnes ne sont permis que dans les lieux publics. Être à l’extérieur réduit toutefois les risques.
Les objets manipulés par plusieurs personnes, comme les ballons, la glacière, les jouets et les boissons, présentent un risque de contamination. Quant à la cigarette, comme fumer implique un contact fréquent entre les mains et la bouche et parfois le partage dans un contexte social, elle augmente aussi le risque de transmission du virus.
Enfin, tous ne pourront pas non plus dormir au chalet, puisque les recommandations limitent l’hébergement locatif à un maximum de dix personnes provenant de trois ménages.
En rappel
- Un rassemblement est la réunion de deux personnes qui n'habitent pas à la même adresse.
- Vous êtes témoin d’un rassemblement qui vous semble dangereux? Ne composez pas le 911. Vous pouvez toutefois communiquer avec les services policiers.
- Si vous avez reçu un diagnostic de COVID-19 ou si vous attendez le résultat d’un test, vous devez vous isoler et ne participer à aucun rassemblement
Une soirée karaoké
Amateurs de karaoké, Stéphanie et Miguel ont invité quelques amis à reprendre le micro le temps d’une soirée un peu arrosée.
Niveau de risque : très élevé*
Ils sont encore une fois entassés, cette fois dans le sous-sol, les fenêtres fermées et un courant d’air dirigé sur eux par un ventilateur sur pied. Ce rassemblement dans un environnement clos s'étalera sans doute sur quelques heures, ce qui peut représenter une exposition prolongée au virus.
Le micro risque aussi d’être passé tour à tour parmi les invités, qui chantent à gorge déployée, projetant autour d’eux de nombreuses gouttelettes respiratoires. Les grignotines à partager, où tout le monde pige dans le même plat, sont également à proscrire.
L’alcool a de plus l’effet indésiré de faire baisser la garde et d’oublier les règles de santé publique de base, comme la distanciation physique et le lavage fréquent des mains.
Une fête d’anniversaire autour de la piscine
Stéphanie et Miguel sont invités à célébrer l’anniversaire de la petite dernière d’un couple d’amis autour d’un barbecue et de la piscine.
Niveau de risque : modéré*
Ils sont un peu trop nombreux, même s’ils gardent leurs distances et se sont séparés par ménage, comme le recommandent les règles de santé publique. Les enfants de 16 ans et moins doivent aussi respecter la distanciation physique, même si celle-ci est réduite à 1 mètre pour eux. La distance entre les enfants et les adultes reste à 2 mètres.
Une seule personne manipule le barbecue et les aliments. C’est bien. Par contre, les condiments devraient l’être aussi, et non pas être placés en libre-service. Le plateau de crudités à partager et le gâteau d’anniversaire sur lequel on soufflera pour éteindre les bougies présentent un risque de contamination, et sont donc à éviter.
Par ailleurs, le risque de transmission du virus dans l’eau est faible, mais les objets gonflables dans les piscines peuvent devenir une source de contamination.
Le maître du barbecue
Aux fourneaux ou au barbecue, une seule personne devrait manipuler la nourriture et assurer le service du repas, après s’être lavé les mains correctement.
Cette même personne devrait également s’assurer que chaque invité a son verre (dûment identifié), ses couverts et des portions individuelles de sauces ou de condiments, et que rien n’est ensuite partagé entre eux.
Autour du feu
Miguel et des amis sont partis en camping pour la fin de semaine. Ils se réunissent autour du feu au crépuscule pour faire griller quelques guimauves.
Niveau de risque : faible*
La présence de quatre personnes de ménages différents augmente le risque de contracter le virus, mais un rassemblement extérieur l'atténue également.
Le partage du chocolat, des guimauves et de la branche pour les faire griller n’est pas recommandé. L'alcool peut aussi entraîner un relâchement des précautions. Il faut toutefois garder en tête en tout temps les mesures sanitaires de base, comme se laver les mains fréquemment (ou les désinfecter avec une solution à base d’alcool en plein air) et la distanciation physique, qui est plus contraignante quand on souhaite se rapprocher du feu.
Portez le masque quand vous ne pouvez pas garder une distance de 2 mètres. Et n'oubliez pas de toujours tousser ou éternuer dans le pli du coude!
L’importance des mises en situation
Dans le cadre de son travail, la Dre Caroline Quach, microbiologiste infectiologue au CHU Sainte-Justine, identifie là où il y a un bris de la norme en santé publique
, et où les gens, notamment les 15-34 ans, baissent la garde. Là où je remarque le plus de laisser-aller, c'est dans les domiciles privés, quand les gens ne respectent pas nécessairement le dix personnes de trois familles
, illustre-t-elle.
La microbiologiste infectiologue déplore des comportements, inconscients ou non, qui augmentent le niveau de risque, surtout lorsque nous sommes entourés de proches.
« Ce n’est pas parce que les gens ne veulent pas, c’est parce qu’ils oublient. On a l’impression que parce que ce sont des membres de notre famille ou des amis proches, c’est sûr qu’ils sont “propres”. Et donc, on ne fait pas attention. C’est là qu’il y a de la transmission. »
Les autorités de santé publique partagent les mêmes préoccupations et mises en garde. Elles laissent d’ailleurs planer la menace d’un reconfinement si la deuxième vague est accélérée par des rassemblements privés où les règles ne sont pas respectées.
*Le niveau de risque associé à chaque illustration a été évalué par la Dre Quach.