Certaines images dans ce reportage pourraient être choquantes pour certains lecteurs.
La maladie débilitante chronique des cervidés a fait son apparition au Manitoba en 2021. La première saison de chasse depuis cette triste découverte s'est ouverte, il y a quelques semaines, et c'est un véritable branle-bas de combat dans la province pour éviter que cette maladie mortelle ne devienne endémique.
La vétérinaire Erika Anseeuw tue tous les animaux qu’elle mange, que ce soit les dindons et les cochons qu’elle élève ou les cerfs de Virginie sauvages.
Depuis ses études, cette adepte de la chasse est préoccupée par la maladie débilitante chronique qui touche les cerfs. En plus de son doctorat en médecine vétérinaire, elle détient une maîtrise en microbiologie médicale.
À la fin des années 1990, quand j’ai obtenu mon diplôme, c’est là que la maladie débilitante chronique des cervidés est apparue au Canada. Je la suis depuis, en quelque sorte. Heureusement, au Manitoba, nous avons eu notre premier cas seulement l’an dernier. J’étais furieuse lorsque c’est arrivé
, dit-elle.
En 2021, la maladie a été découverte chez cinq cerfs mulets au Manitoba, le long de la frontière avec la Saskatchewan. Erika Anseeuw estime que cela signifie que la province est au bord du désastre
.
La maladie débilitante chronique des cervidés est toujours mortelle. Les premiers cas ont été découverts en 1996, dans une ferme de wapitis, en Saskatchewan. Depuis, la maladie s’est propagée dans les populations sauvages de cerfs en Saskatchewan et en Alberta.
Il s’agit d’une encéphalopathie spongiforme transmissible (EST), comme la maladie de la vache folle. Les cervidés, tels que les cerfs, les orignaux, les caribous et les wapitis y sont sujets. Bien qu’il n’y ait aucune preuve de transmission de cette maladie aux humains, Santé Canada recommande de ne pas manger de viande d’un animal infecté.
Certains chercheurs croient que la maladie pourrait se propager aux humains, tout comme la maladie de la vache folle, comme l’explique le biologiste spécialisé en santé de la faune sauvage du gouvernement du Manitoba Richard Davis.
Il raconte un épisode d’un projet de recherche de l’Agence canadienne d'inspection des aliments : On a infecté des macaques en leur donnant à manger de petites portions de viande de cerf de Virginie infectés, l’équivalent d’un burger par semaine.
Ces macaques ont développé la maladie débilitante et sont morts. Les macaques sont l’espèce la plus proche des humains que l’on peut utiliser comme animaux de recherche
, poursuit le biologiste.
Outre le risque que pourrait présenter cette viande pour les consommateurs, la maladie débilitante chronique des cervidés pourrait nuire aux populations de cervidés. Ces espèces ont une importance primordiale pour les peuples autochtones de la province, que ce soit pour la chasse de subsistance ou pour des raisons culturelles.
Quand de jeunes bêtes sont infectées, elles meurent à ce qui correspond à l’âge idéal pour la reproduction. Ces animaux ne peuvent plus se reproduire, ce qui va provoquer un déclin de la population. Il y aura de moins en moins de grands mâles adultes
, explique Richard Davis.
Pour le caribou, si ça se rend dans cette population, alors l’enjeu de la sécurité alimentaire [des communautés autochtones de chasseurs de subsistance du nord] entre en jeu, poursuit-il, l’air pensif. Ça fait peur.