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L’Inde exige que le Canada réduise son corps diplomatique à New Delhi

Une effigie du premier ministre indien Narendra Modi a été brûlée lors d'un rassemblement sikh devant le consulat indien à Toronto. (Photo d'archives)
Photo : Getty Images / AFP/COLE BURSTON
L’Inde a demandé à Ottawa de rapatrier une quarantaine de ses diplomates en poste à New Delhi, a rapporté mardi le Financial Times, citant des sources proches du dossier. Il y a deux semaines, l’Inde avait informé Ottawa de la nécessité de réduire son corps diplomatique pour une question de « parité » entre les deux pays.
Au moins 61 diplomates canadiens sont actuellement en poste en Inde, mais 41 d'entre eux devront quitter le pays d'ici le 10 octobre, exige le gouvernement indien.
L’Inde et le Canada sont en pleine crise diplomatique. Les tensions ont commencé le 18 septembre dernier, lorsque le premier ministre Trudeau a déclaré à la Chambre des communes que des « allégations crédibles » établissent un lien potentiel entre le gouvernement de l’Inde et l’assassinat d’un citoyen canadien (nouvelle fenêtre) d'origine sikhe, Hardeep Singh Nijjar. (nouvelle fenêtre)
Le ministère indien des Affaires étrangères avait réagi le jour même en qualifiant les accusations de M. Trudeau d’absurdes
.

Des militants de Shiv Sena Taksali mettent le feu à une banderole représentant le drapeau national du Canada lors d'un rassemblement dans une rue d'Amritsar, le 23 septembre 2023.
Photo : AFP / Narinder Nanu
Le lendemain, Justin Trudeau a déclaré qu’il ne voulait pas d’escalade avec l’Inde (nouvelle fenêtre), tout en invitant le gouvernement indien à prendre cette question très au sérieux
.
Mardi, M. Trudeau a affirmé prendre cette crise diplomatique extrêmement au sérieux
, tout en affirmant que son gouvernement continue à s'engager de manière responsable et constructive avec le gouvernement indien. Nous ne cherchons pas l'escalade
, a-t-il ajouté.
Le premier ministre n’a toutefois pas précisé si le Canada expulserait à son tour des diplomates indiens en représailles à la décision de l’Inde. Il a toutefois réitéré l’importance de garder les diplomates canadiens sur le territoire indien pour aider les Canadiens
dans ce pays et pour travailler à améliorer les relations canado-indiennes.
C’est une situation difficile que nous vivons avec le gouvernement indien, mais nous avons du travail à faire sur le terrain [...] pour faire avancer nos relations. Nous resterons fermes.
Nous ne cherchons pas à envenimer la situation, mais nous voulons rester sur le terrain
, a-t-il ajouté.
La ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, n'a quant à elle pas voulu confirmer les informations rapportées par le Financial Times. Elle a toutefois elle aussi souligné l'importance d'avoir une forte présence diplomatique en Inde
, tout en affirmant être en contact avec les autorités indiennes.
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L'ancien diplomate Ferry de Kerckhove, ex-ambassadeur du Canada en Indonésie et en Égypte, croit que le rapatriement de cette quarantaine de diplomates expulsés limitera le travail consulaire et ralentira le traitement des visas. C’est la communauté indo-canadienne qui va en souffrir le plus. Mais pour Narendra Modi [le premier ministre de l'Inde], les personnes qui quittent l’Inde comptent peu
, a estimé M. de Kerckhove en entrevue à l'émission Ça nous regarde sur ICI Première (nouvelle fenêtre).
L'ancien ambassadeur a aussi souligné l'intérêt qu'a Justin Trudeau à ce que la communauté indo-canadienne ne souffre pas trop, tant sur les plans électoral et humain que multinational ou multiculturel. Il y aura certainement des mesures de rétorsion, mais du un pour un ne répondrait pas aux intérêts profonds du Canada
, selon M. de Kerckhove, qui a ajouté que la réponse du premier ministre risquait d'être nuancée
.
Pas les premières expulsions de diplomates
Le Canada avait déjà expulsé, en septembre dernier, un diplomate indien (nouvelle fenêtre) du plus haut niveau, Pavan Kumar Rai. Le gouvernement indien avait répliqué en expulsant à son tour un haut diplomate canadien en poste en Inde.
Le 21 septembre, le gouvernement indien a annoncé qu’il suspendait le traitement des demandes de visa (nouvelle fenêtre) effectuées par des citoyens canadiens.
Ce jour-là, le porte-parole du ministère indien des Affaires étrangères avait par ailleurs affirmé, lors d’un point de presse, qu’Ottawa a été informé de la nécessité de réduire son personnel diplomatique à New Delhi. Le nombre de [leurs diplomates] en Inde est beaucoup plus élevé que le nôtre au Canada
, a dit Arindam Bagchi, affirmant que c’est une question de parité
.
Nous avons vu de l'ingérence diplomatique canadienne dans nos affaires intérieures
, a encore déclaré M. Bagchi lors d'un point de presse à New Delhi. C'est un facteur pris en compte pour rechercher la parité dans notre présence diplomatique dans les deux pays.
De son côté, Ferry de Kerckhove a expliqué que l'inégalité provient du service immigration considérable en Inde : nous avons une population indo-canadienne qui [frôle] les deux millions et il y a de nombreuses relations familiales [à gérer]
.
À son avis, il s'agit donc d'un service indispensable et ce sont, selon lui, les Indiens qui en souffriront bien plus que le Canada
. Le Canada étant un pays d’immigration, il y a très souvent des inégalités sur lesquelles d’autres pays peuvent jouer quand ils ont une rixe ou des débats difficiles avec nous
, a-t-il souligné.