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Marc Miller veut faciliter le passage des frontières pour les Autochtones

La communauté d'Akwesasne est divisée entre l'Ontario, le Québec et les États-Unis. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Jonathan Dupaul
Le ministre de l'Immigration, Marc Miller, a déclaré vouloir faciliter le franchissement par les populations autochtones des frontières internationales qui divisent leurs terres et leurs familles depuis des générations.
Dans une entrevue accordée à CBC News, M. Miller a déclaré que le Canada devrait reconnaître que les peuples autochtones ont un droit inhérent à franchir librement les frontières internationales.
Je pense que c'est une chose que nous devons régler en tant que pays. Cela prendra du temps, mais c'est une de mes priorités
, a déclaré M. Miller.
Une source gouvernementale haut placée a indiqué que le gouvernement envisage à la fois une directive ministérielle et des amendements à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés qui exempteraient les Autochtones des exigences en matière d'immigration.
Le gouvernement fédéral souhaiterait présenter une solution l'année prochaine.
L'engagement de M. Miller fait partie de la feuille de route du gouvernement fédéral pour la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
M. Miller, qui a été transféré du portefeuille des relations entre la Couronne et les Autochtones à celui de l'Immigration au cours de l'été, a déclaré qu'il y a une immense résistance institutionnelle au sein du gouvernement fédéral mais qu'il est déterminé à faire ce qu'il faut.
Kenneth Deer estime que le retour des Autochtones des États-Unis au Canada devrait être bien plus simple. (Photo d'archives)
Photo : Ka’nhehsí:io Deer/CBC
C'est encourageant et nous attendons maintenant que des mesures soient prises
, a déclaré Kenneth Deer, membre du comité des relations extérieures des Haudenosaunee, qui s'occupe des questions frontalières.
Kenneth Deer, dont le nom traditionnel mohawk est Atsenhaienton, s'identifie comme haudenosaunee et non comme canadien. Il est originaire du territoire mohawk de Kahnawá:ke, au sud de Montréal, et son peuple fait partie de la Confédération haudenosaunee.
La frontière entre les États-Unis et le Canada divise le territoire de ce peuple. Ce territoire compte des parties au Québec, en Ontario et dans l'État de New York.
M. Deer, qui voyage avec un passeport haudenosaunee, a déclaré qu'il était plus facile pour lui d'entrer aux États-Unis que de retourner au Canada. Au Canada, il doit souvent expliquer ses droits aux agents frontaliers et, parfois, fournir des documents supplémentaires.
C'est incroyablement frustrant et c'est humiliant pour le gouvernement du Canada de dire que nous ne pouvons pas traverser librement dans notre propre pays. Cela nous retarde lorsque nous essayons de passer la frontière
, a déclaré M. Deer.
Le mariage constitue une autre complication, selon lui. Les Mohawks du côté américain doivent obtenir le statut d'immigrant reçu au Canada pour pouvoir vivre avec leur conjoint au nord de la frontière.
C'est absolument ridicule
, a-t-il déclaré.

Les États-Unis reconnaissent les clauses historiques du traité de Jay, signé par le Royaume-Uni et les États-Unis en 1794, soit avant la création de la Confédération canadienne. (Photo d'archives)
Photo : La Presse canadienne / Rob Gurdebeke
M. Deer souhaite que M. Miller adapte la loi afin de garantir leurs droits et que ceux-ci soient reconnus et jamais annulés.
Nous avons besoin de quelque chose de permanent [...] pour que nos enfants, nos petits-enfants et nos arrière-petits-enfants aient toujours accès à leur terre natale
, a déclaré M. Deer.
Les Haudenosaunee ne sont pas les seuls dont les terres autochtones sont divisées par des frontières internationales.
Le territoire inuit de l'Inuit Nunaat, qui s'étend dans l'Arctique, est divisé par les frontières modernes du Canada, du territoire autonome danois du Groenland, des États-Unis et de la Russie.

Marc Miller (à gauche) et Natan Obed, président de l'Inuit Tapiriit Kanatami.
Photo : (Sean Kilpatrick/The Canadian Press)
Natan Obed, président de l'Inuit Tapiriit Kanatami, a déclaré que les Inuit demandent à Ottawa de travailler sur cette question depuis des décennies. Il a personnellement lancé cet appel aux ministres de l'Immigration précédents.
Jusqu'à présent, le gouvernement canadien n'a pas pris cette question au sérieux. Je suis heureux que le ministre Miller soit désormais disposé à s'attaquer à ce problème
, a-t-il déclaré.
Dans de nombreux cas, a expliqué M. Obed, les Inuit ont des familles élargies, des zones de chasse communes et des lieux de gestion marine dans d'autres pays auxquels ils n'ont pas accès.
Il est presque impossible pour les gens d'aller rendre visite à leur famille pendant une période prolongée ou si les gens se marient et veulent vivre à un endroit particulier
, a déclaré M. Obed.
Les Inuvialuit de l'Arctique occidental canadien, par exemple, ont des liens familiaux étroits avec les Inuit de l'Alaska, appelés Iñupiaq. Les Inuit du nord de Baffin, au Nunavut, ont des liens familiaux avec des habitants du Groenland.

Le territoire des Inuit chevauche plusieurs pays. (Photo d'archives)
Photo : La Presse canadienne / Sean Kilpatrick
M. Obed a déclaré que les Inuit souhaitaient des révisions spécifiques de la Loi sur l'immigration qui donneraient aux Inuit du Groenland et des États-Unis un statut de citoyen qui contournerait la loi actuelle sur les citoyens étrangers venant au Canada.
Cette mesure créerait une nouvelle catégorie de citoyens autochtones et permettrait aux familles inuit du Groenland et de l'Alaska de voyager librement au Canada.
Cela contribuerait grandement à reconstituer notre nation telle que nous l'avons toujours connue
, a-t-il déclaré.
Le Canada rattrape son retard
M. Miller reconnaît que les États-Unis sont en avance sur le Canada dans leur approche en matière de droits des Autochtones et de mobilité frontalière.
Les États-Unis reconnaissent les clauses historiques du traité de Jay, signé par le Royaume-Uni et par les États-Unis en 1794, soit avant la création de la Confédération canadienne.
Ce traité stipule que les Autochtones peuvent franchir librement les frontières internationales et que les Autochtones du Canada ont le droit d'entrer librement aux États-Unis pour y travailler, étudier, prendre leur retraite, investir ou immigrer.
Le Canada ne reconnaît pas ces droits.
Les frontières ont scindé les territoires autochtones traditionnels. (Photo d'archives)
Photo : La Presse canadienne / Darryl Dyck
M. Miller a déclaré qu'il n'avait pas l'intention de reconnaître le traité de Jay. Selon lui, le problème de ce traité réside en partie dans le fait qu'il ne s'applique qu'aux personnes ayant au moins 50 % de sang amérindien
, une règle qu'il qualifie de fondamentalement raciste.
Nous devons reconnaître quelque chose d'un peu plus fondamental que le traité de Jay
, a déclaré M. Miller.
Nous devons d'abord commencer par faire le travail qui nous incombe en vertu de ce traité, c'est-à-dire reconnaître le droit des peuples autochtones à franchir librement les frontières.
Paul Williams, avocat des Six Nations, travaille avec le Canada pour aider environ 200 familles haudenosaunee qui ont un conjoint de chaque côté de la frontière.
M. Williams, qui fait également partie du Comité des relations extérieures des Haudenosaunee, a déclaré que les conjoints autochtones au Canada n'ont pas de couverture médicale, ne peuvent pas travailler au Canada et ne peuvent pas retourner aux États-Unis sans risquer d'être interdits de retour au Canada.
C'est toute une série de problèmes avec lesquels ces familles sont aux prises
, a déclaré M. Williams.
Selon M. Williams, M. Miller a le pouvoir, en tant que ministre, de régler ce problème en modifiant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés ou en émettant une directive ministérielle pour exempter les peuples autochtones en tant que groupe, ce qui a été fait de manière limitée pour les étudiants de Hong Kong, pour les réfugiés afghans et pour les Ukrainiens qui fuient la guerre.
Cela fait longtemps qu'on l'attend
, a déclaré M. Williams.
D'après un texte d'Olivia Stefanovic, de CBC