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L’aide médicale à mourir pourra être prodiguée dans un lieu au choix du patient
Le lieu choisi devra avoir été approuvé par un médecin ou une infirmière praticienne spécialisée du CISSS ou CIUSSS de la région.

L'aide médicale à mourir pourra être administrée en dehors d'un hôpital, d'une maison de soins palliatifs ou d'un domicile, au Québec, si le projet de loi 11 est adopté.
Photo : Getty Images / LPETTET
Au Québec, l'aide médicale à mourir pourra être prodiguée dans un salon funéraire, ou dans un autre lieu au choix du patient, grâce à l'adoption en commission parlementaire d'un amendement au projet de loi 11, qui vise à mettre à jour la Loi concernant les soins de fin de vie.
Le projet de loi 11 pourrait être adopté d'ici la fin des travaux à l'Assemblée nationale, le 9 juin.
J’ai déposé un amendement pour faire en sorte que l’aide médicale à mourir soit effectuée selon les désirs de la personne dans le lieu où elle le souhaite, donc selon la volonté de la personne
, a déclaré la ministre déléguée à la Santé et aux Aînés, Sonia Bélanger.
En vertu de la loi qui encadre actuellement l'aide médicale à mourir, il avait été convenu que les soins de fin de vie soient administrés en milieu hospitalier, dans une maison de soins palliatifs ou encore à domicile.
Mais, comme l'a décrit la ministre Bélanger, est-ce qu'on veut être une société qui oblige les gens à mourir dans un lieu précis? Plutôt qu’une société qui permet le libre choix et qui permet aux gens de choisir le dernier souvenir qu’ils veulent conserver?
Avec l'aide médicale à mourir, les patients veulent choisir une date, une heure et un endroit.
Le gouvernement du Québec prévient toutefois que le lieu choisi devra être autorisé par le médecin ou par l'infirmière praticienne spécialisée (IPS) dans le dossier. Ces derniers devront, eux, obtenir l'autorisation des gestionnaires du
CISSS ou du CIUSSS desservant le territoire en question.Pas de publicité
Il ne sera pas possible pour un salon funéraire, par exemple, de faire de la promotion ou de la publicité qui serait directement, ou indirectement, associée à l'aide médicale à mourir.
Le projet de loi prévoit une amende pouvant aller jusqu'à 50 000 $ pour toute personne qui contreviendrait à la loi, ou allant jusqu'à 150 000 $ dans les autres cas, comme un commerce.
En cas de récidive, les amendes seront doublées.
Avec cet élargissement de la loi, le gouvernement de François Legault entend baliser une pratique qui a déjà cours : à la mi-mai, La Presse avait rapporté qu'une personne avait reçu l'aide médicale à mourir dans un salon funéraire de la région du Haut-Richelieu.
En permettant à un patient de recevoir le soin de fin de vie dans un lieu à sa convenance, le gouvernement du Québec dit vouloir assurer le respect de la dignité et de l’autonomie de la personne ainsi que le caractère important de ce soin
.
Au Québec, plus de 7 % des décès découlent de l'aide médicale à mourir (nouvelle fenêtre) et plus de 5000 personnes pourraient y avoir recours cette année.
À ce chapitre, le Québec est au premier rang dans le monde (nouvelle fenêtre) : la province répond, toutes proportions gardées, à plus de demandes d'aide médicale à mourir que la Belgique ou les Pays-Bas.

Entrevue avec la ministre Sonia Bélanger
Prudence et questionnement
En étudiant le projet de loi, les membres de la Commission des relations avec les citoyens ont débattu des dérives que pourrait entraîner cet éventuel élargissement des lieux où l'on peut recevoir l'aide médicale à mourir.
La ministre Sonia Bélanger a parlé de la prudence
dont devaient faire preuve les parlementaires, tout en reconnaissant que la volonté de la personne devait primer sur tout
.
La députée libérale Jennifer Maccarone, elle, s'est dite en proie à un questionnement
.
Sans être pour ou contre
, la députée de Westmount–Saint-Louis a fait remarquer qu'on ouvrait la porte
aux soins de fin de vie dans d'autres lieux, parce qu'on a compris que ça se pratique quand même
(dans un salon funéraire, notamment).
Mais, a-t-elle objecté, va-t-on changer des choses à l'intérieur de nos lois chaque fois que quelqu'un va aller à l'extérieur de la loi?
Mourir au zoo? Ou encore au musée?
Jusqu'à présent, il n'avait pas été discuté de la possibilité d'administrer l'Peut-être parce que les gens pensaient que c'était quand même clair, dans la Loi sur les soins de fin de vie
, avance-t-elle.
Si quelqu'un souhaite le faire en paix, à côté d'un lac, dans un parc national, par exemple, comment allons-nous éviter qu'il n'y ait pas des témoins aux alentours?
La députée estime qu'il faut regarder de manière pratico-pratique
comment on répondra à la volonté des patients qui souhaiteraient recevoir l' AMM au zoo, ou au musée
, entre autres possibilités.
Mme Maccarone se questionne aussi à la perspective que des médecins ou des infirmières praticiennes spécialisées agissent tels des législateurs, en étant ceux qui disent : Oui, vous respectez les règles, c'est sécuritaire et c'est faisable
.
Tant Jennifer Maccarone que Joël Arseneau, du Parti québécois, se demandent en outre quelles règles les municipalités pourraient imposer. Certaines d'entre elles auront-elles à décider si elles permettent, ou pas, l'administration de l'aide médicale à mourir?
demande le député des Îles-de-la-Madeleine. Et si elles l'interdisent, jusqu'à quel point n'entrent-elles pas dans une pratique discriminatoire?
Une approche paternaliste
Le Dr Georges L'Espérance, président de l'Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité, salue l'élargissement qui est envisagé. Mais en entrevue mercredi à Tout un matin, sur ICI Première (nouvelle fenêtre), il a dit craindre que l'approche du gouvernement ne vienne bureaucratiser cette situation, qui s'est toujours passée dans le respect, la solennité et la sérénité, que ce soit à domicile ou en quelque autre endroit
.
Je ne sais pas ce qui fait peur aux gens.
Le Dr L'Espérance réprouve de plus le paternalisme
dont fait preuve le législateur, selon lui. C'est comme si on avait l'impression que tout le monde allait décider d'avoir l'aide médicale à mourir n'importe où, au milieu d'un centre d'achats. Ce n'est pas du tout, du tout comme ça que ça se passe
, dit-il.
Ne pas mourir à l'hôpital
En entrevue à l'émission Le 15-18 (nouvelle fenêtre), mardi, une auditrice a raconté à quel point il a été important, pour sa mère, de recevoir l'aide médicale à mourir dans un endroit calme, serein et adéquat.
Je ne [voyais] pas ma mère mourir à l’hôpital; elle n’a jamais été hospitalisée.
La mère de Nathalie Fournier avait reçu la confirmation à l’automne 2020 qu’elle était admissible à l’aide médicale à mourir. Son mari n’étant pas à l’aise avec l’idée qu’elle meure à la maison, il n’y avait que très peu d’options. De plus, quelques jours avant la date fixée, l'unité où la dame devait recevoir l'
AMM à l'hôpital était pleine.La famille a finalement trouvé un lieu approprié et elle souhaite encore aujourd'hui qu'il demeure secret.
Je n’ai aucun regret
, a déclaré Nathalie Fournier.