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Huit personnes périssent dans un naufrage à Akwesasne

Une équipe de recherche sur un bateau.

Deux corps supplémentaires ont été repêchés vendredi après-midi à Akwesasne, en plus des six corps découverts à l'aube.

Photo : La Presse canadienne / Ryan Remiorz

RCI

Les corps de deux personnes ont été repêchés vendredi du fleuve Saint-Laurent, près d'Akwesasne, portant le bilan total des victimes à huit depuis jeudi soir, a indiqué la police mohawk. Les victimes, qui tentaient de se rendre aux États-Unis de manière illicite, sont issues de deux familles. Quatre étaient originaires de l'Inde et les quatre autres de la Roumanie.

Deux autres corps ont été repêchés des eaux, dont un enfant d’origine roumaine et une femme adulte originaire de l’Inde, a affirmé vendredi Shawn Dulude, chef de la police d'Akwasasne lors d’un point de presse.

Selon lui, l’enfant retrouvé vendredi possédait également la nationalité canadienne. Un autre enfant de moins de 3 ans, qui avait été retrouvé jeudi (nouvelle fenêtre), est lui aussi canado-roumain.

Les six autres victimes sont des adultes.

La macabre découverte coïncide avec des recherches déclenchées à la suite de la disparition d'un membre de la communauté mohawk âgé de 30 ans, vu pour la dernière fois mercredi soir à bord d'une petite embarcation de couleur bleu clair.

C'est d'ailleurs dans le cadre de ces recherches qu'un hélicoptère Griffon de l'Aviation royale canadienne (ARC) a localisé les corps ainsi qu'un bateau submergé, jeudi après-midi, à proximité de l'île Saint-Régis, ont indiqué les Forces armées canadiennes (FAC).

Un homme barbu portant une casquette.

Casey Oakes a été vu pour la dernière fois mercredi vers 21 h 30.

Photo : Service de police mohawk d'Akwesasne

L'homme de 30 ans ayant disparu de la communauté mercredi se nomme Casey Oakes. Il demeure recherché, a fait savoir en point de presse la cheffe adjointe du service de police, Lee-Ann O'Brien, vendredi matin. Toute personne sachant où il se trouve ou croyant l'avoir vu est priée de communiquer avec nous, a-t-elle déclaré.

Le bateau retrouvé hier après-midi par l'Aviation royale canadienne pourrait être le même que celui dans lequel Casey Oakes a été aperçu mercredi soir, puisque, selon la cheffe adjointe O'Brien, l'embarcation en question correspond à la description que les témoins en ont faite.

Le temps était mauvais, les conditions venteuses, mercredi soir, a-t-elle noté. Ce n'était pas le bon moment pour être sur l'eau.

Vendredi après-midi, le chef de la police mohawk a tenu à dire que « rien n'indique que Casey Oakes est lié au naufrage. [...] L'enquête, qui est toujours en cours, va nous le dire ».

Les recherches ont été suspendues vendredi à la tombée de la nuit, mais M. Dulude a affirmé qu'elles se poursuivront dans les prochains jours, « aussi longtemps que nécessaire ».

Des renforts demandés

Les policiers d'Akwesasne ont sollicité l’aide de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), de l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), de la Police provinciale de l'Ontario (PPO) et de la Sûreté du Québec (SQ) pour la suite de l’enquête.

Plus précisément, on pourrait voir l'hélicoptère, des plongeurs ainsi que des reconstitutionnistes porter assistance à nos collègues, a expliqué la porte-parole de la Sûreté du Québec, Audrey-Anne Bilodeau.

Cela dit, il y a du terrain à couvrir, prévient son ancien collègue policier François Doré, aujourd'hui retraité. Le territoire d'Akwesasne est particulièrement vaste, a-t-il souligné en entrevue à ICI RDI vendredi matin.

Dans ce contexte, le rôle des reconstitutionnistes sera essentiel au succès de l'enquête, selon M. Doré. Leur rôle, a-t-il expliqué, sera d'établir la chronologie des événements, d'où l'événement part, et vers où se dirigeaient [les personnes impliquées dans le naufrage].

Pour ce faire, les reconstitutionnistes devront vérifier le terrain, en espérant pouvoir retrouver des éléments de preuve, des pistes, des traces, des choses qui ont été laissés par les gens qui ont circulé, qui sont passés là.

Un hélicoptère survolant un plan d'eau.

L'hélicoptère de la SQ pouvait être aperçu dans le ciel d'Akwesasne, vendredi matin.

Photo : Radio-Canada / Karine Bastien

Le service de police local affirme travailler en partenariat avec Immigration Canada afin d'identifier les victimes et de prévenir leurs proches.

Le Conseil mohawk d'Akwesasne, de son côté, a allumé un feu de condoléances au centre récréatif Tsi'Snaihne. Les membres de la communauté et les premiers intervenants sont invités à se rassembler, à manger et à se soutenir mutuellement pendant cette période difficile, a-t-il fait savoir sur Facebook.

« Rien à voir avec la fermeture » du chemin Roxham

Le territoire d'Akwesasne est connu comme un point de transit pour la traite de personnes en raison de sa situation géographique. Depuis janvier, 48 incidents impliquant 80 personnes ont été recensés par la police locale, a indiqué M. Dulude vendredi après-midi. La plupart impliquaient des personnes originaires de la Roumanie et de l'Inde, avait précisé plus tôt la cheffe adjointe O'Brien.

La raison pour laquelle les gens veulent se rendre aux États-Unis nous échappe, mais ce que nous savons, c’est que les [passages illégaux] sont facilités par des gens d’ici, souvent des jeunes vulnérables qui veulent faire de l’argent rapidement. Ils sont exploités, ni plus ni moins, par des réseaux criminels de Montréal, de Toronto ou d'Ottawa.
Une citation de Shawn Dulude, chef de la police d'Akwesasne

Mme O'Brien a de son côté affirmé que ce drame n’est pas lié à l’entente conclue entre le Canada et les États-Unis pour la fermeture du passage illégal de Roxham. Pour le moment, ce que je peux vous dire, c'est que cela n'a rien à voir avec cette fermeture, a-t-elle déclaré. Cette fermeture concerne des migrants qui quittent les États-Unis en direction du Canada. Les personnes [dont les corps ont été retrouvés à Akwesasne] tentaient d'entrer aux États-Unis. C'est complètement le contraire.

Le phénomène n'est pas nouveau (nouvelle fenêtre) à Akwesasne. En avril 2022 par exemple, un passeur a été arrêté et accusé de trafic d'êtres humains aux États-Unis après un naufrage au cours duquel six migrants indiens qui ne savaient pas nager ont été secourus in extremis.

Une carte d'Akwesasne.

La communauté d’Akwesasne chevauche les frontières de l’Ontario, du Québec et de l’État de New York.

Photo : Radio-Canada

Pour tenter de régler le problème, des ressources supplémentaires (nouvelle fenêtre) ont été allouées l'an dernier par le gouvernement du Québec au service de police d'Akwesasne. Cela dit, ce dernier ne dispose que de 49 agents pour surveiller 37 îles et autant de kilomètres de berges donnant sur le fleuve Saint-Laurent.

Des nouvelles bouleversantes, un drame horrible

De passage à Moncton, au Nouveau-Brunswick, le premier ministre Justin Trudeau s'est montré troublé par cette affaire, mais il a évité de s'avancer sur les circonstances.

Il y a une enquête en cours et je ne veux pas sauter sur les [conjectures] et les faits non confirmés qui circulent à présent. Il va falloir qu'on comprenne bien ce qui s'est passé pour pouvoir prendre les meilleures mesures afin de protéger les gens vulnérables.
Une citation de Justin Trudeau, premier ministre du Canada

Son ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, a pour sa part qualifié les nouvelles en provenance d'Akwesasne de bouleversantes sur Twitter.

J'ai contacté le grand chef Abram Benedict pour lui exprimer nos condoléances, a-t-il ajouté. En attendant de plus amples informations, mes pensées vont aux proches des victimes.

Le premier ministre du Québec, François Legault, a également qualifié le drame d'horrible sur Twitter, tandis que son ministre de la Sécurité publique, François Bonnardel, a fait savoir que son équipe et lui suivaient la situation de près.

Avec les informations de CBC, de La Presse canadienne, de l'Associated Press et de Pascal Robidas

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