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Une ferme régénérative à l’Î.-P.-É. où les animaux travaillent le sol

Antoine Robillard pose pour la photo devant des poules.

Originaire du Québec, Antoine Robillard et sa famille élèvent des animaux depuis plusieurs années, avant tout pour se nourrir eux-mêmes.

Photo : Radio-Canada / Laurent Rigaux

Laurent Rigaux

À Launching Place, une communauté rurale de l'est de l'Île-du-Prince-Édouard, Antoine Robillard, 39 ans, nourrit ses animaux. Il vient de revenir de l'école francophone La-Belle-Cloche, où il travaille comme enseignant à plein temps, et doit se dépêcher avant que la nuit n'arrive.

Vaches, cochons, poules et chèvres composent son troupeau. Les animaux sont répartis sur les 60 acres de la ferme. Ce sont eux qui travaillent le sol, qui transforment la paille et leurs déjections en compost. Antoine Robillard pratique l'agriculture régénérative, avec pour objectif de produire sur place tout ce dont la ferme a besoin.

Un homme en train de nourrir des cochons.

Antoine Robillard est enseignant à plein temps. Il nourrit ses animaux en rentrant de l'école, chaque soir.

Photo : Radio-Canada / Laurent Rigaux

Cette approche-là, ça prend des animaux pour mettre sur la terre, commence le fermier, tout en déballant un ballot de paille.

Les animaux travaillent

Sans animaux sur un sol, on doit faire beaucoup d'apports, que ce soit de l'engrais, des produits chimiques pour contrôler les parasites, les champignons, les insectes, les mauvaises herbes. Alors que ça peut être géré avec des animaux, détaille-t-il.

Des porcs.

Antoine Robillard élève des races rustiques de porcs, à croissance lente.

Photo : Radio-Canada / Laurent Rigaux

L'organisme Canadian Organic Growers explique sur son site Internet que ce type d'agriculture emploie des pratiques qui favorisent la densité nutritionnelle des cultures vivrières plutôt que le rendement.

Dans la ferme d'Antoine Robillard, les porcs et les bœufs sont déplacés au cours de l'année. Ils travaillent le sol, sur lequel Antoine Robillard peut ensuite planter des graines, des légumes, du kale, des betteraves, navets, carottes, des courges, du maïs . Des légumes qui nourrissent sa famille, mais aussi ses bêtes.

Antoine Robillard devant des meules de foin.

Antoine Robillard est enseignant à temps plein à l'école francophone La-Belle-Cloche, à Rollo Bay.

Photo : Radio-Canada / Laurent Rigaux

Ce jour-là, Antoine Robillard dépose une meule de foin dans chaque enclos, de quoi nourrir les bêtes pendant plusieurs jours. Originaires du Québec, lui, son épouse et leurs trois enfants n'en sont pas à leur début en agriculture.

Au Québec, on avait des chèvres, on avait des lapins et des poules et on a fait un peu d'aquaponie, donc avec des poissons, raconte-t-il.

Des races rustiques

La famille s'était lancée dans l'aventure pour autoproduire son alimentation, et a choisi de s'installer à l'île car les terres y seraient plus abordables que dans la Belle Province.

Les vaches et les cochons se sont ajoutés, mais la perspective est restée la même, celle d'élever des animaux qui seraient les meilleurs possibles pour la santé.

Porcs Berkshire, bœufs Galloway ou chèvre nigériane, les races choisies par l'éleveur sont rustiques, à croissance lente, réputées pour leur capacité à vivre à l'extérieur, même en hiver.

Les porcs dont Antoine Robillard est le plus fier sont les Mangalitza, des porcs laineux résistant aux maladies et au froid, mais aussi très doux, très gentils.

Des porcs en train de manger.

Les cochons de race Mangalitza sont « l'image de marque » de la ferme d'Antoine Robillard. Ce sont des animaux connus pour leur robustesse et leur viande de qualité.

Photo : Radio-Canada / Laurent Rigaux

Ce sont des cochons exceptionnels!
Une citation de Antoine Robillard

Antoine Robillard insiste sur l'aspect écologique de sa démarche, à l'heure où les appels à manger moins de viande, voire à bannir l'élevage, se multiplient.

En agriculture régénérative, les recherches démontrent qu'au lieu de polluer, on va emmagasiner du carbone dans le sol, affirme-t-il.

Un bilan carbone positif

Les animaux peuvent aider, si c'est géré correctement, à créer un sol capable de gérer finalement beaucoup de carbone, donc c'est un atout pour l'environnement, assure l'agriculteur.

Des boeufs.

Antoine Robillard élève des bœufs de race Galloway, connus pour leur rusticité et la qualité de leur viande.

Photo : Radio-Canada / Laurent Rigaux

Surtout, Antoine Robillard soutient que sa ferme est plus efficace qu'une ferme industrielle.

Une ferme où il y a de la diversité, de la biodiversité, est capable de nourrir beaucoup plus qu'une ferme industrielle, même si on a moins d'animaux, soutient le jeune homme.

Dans une agriculture industrielle, on est toujours en train d'amener de la nourriture, qui vient d'ailleurs d'autres champs, pour les amener dans la grange où on a nos animaux. En réalité, ça prend des milliers d'acres pour nourrir une grange avec 1000 cochons, développe-t-il.

Prouver sa valeur

Le fermier dit aimer l'Île, un bel endroit. Malgré sa motivation, son intégration dans la communauté agricole ne se fait pas sans défi. Les agriculteurs de la région sont surpris par son modèle.

On est francophones, donc c'est déjà un défi en soi!
Une citation de Antoine Robillard

Le jeune fermier vient de se lancer dans la vente directe aux particuliers, en proposant un modèle original de vente en gros. Les clients peuvent, par exemple, commander un demi-cochon ou un quart de bœuf, ce qui réduit le coût au poids.

Un enclos avec une maison à l'arrière plan.

Antoine Robillard et sa famille construisent également une maison écologique à côté de la ferme.

Photo : Radio-Canada / Laurent Rigaux

Ça reste que je travaille à temps plein, donc je ne peux pas me permettre de faire de la vente au détail, justifie Antoine Robillard.

Son objectif à long terme n'est pas forcément d'atteindre la rentabilité avec la vente de viande, mais d'aller vers un modèle écotouristique, où des visiteurs dormiraient à la ferme en consommant la viande et les légumes produits sur place.

Le soleil a déjà presque disparu. Antoine Robillard a juste le temps de montrer du doigt la maison écologique et passive qu'il construit avec sa femme et leurs enfants sur le terrain de la ferme. Vivre cette aventure en famille est un défi, mais aussi une belle expérience, assure-t-il. C'est moins pire que ça en a l'air, rigole le fermier.

Laurent Rigaux

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