Bruiteur
Réjeanne Leblanc exerce un métier fascinant : elle est bruiteuse.
C'est elle qui crée les effets sonores pour les émissions de
radio et de télévision. Une tâche qui demande avant tout
de la créativité et de l'oreille, mais aussi du discernement
et un don pour la comédie...
L'aventure de Réjeanne a commencé lors d'un voyage à Disneyland, en 1990 : alors qu'elle faisait la file pour entrer aux studios MGM, elle est choisie comme volontaire pour participer à la trame sonore d'un film. Sa responsabilité : simuler le souffle du vent. Réjeanne s'est tellement amusée qu'elle a décidé de gagner sa vie en faisant du bruit...
Tâche 1 : Lire le texte de la dramatique
ou visionner l'émission
Tâche 2 : Faire la recherche
Tâche 3 : Produire les sons
» Tâche 1 : Lire le texte de la dramatique
ou visionner l'émission
Radio-Canada présente souvent des dramatiques radiophoniques. Ces dramatiques
ressemblent à des pièces de théâtre. Pour savoir
quels sons il a à produire, le bruiteur lit les «didascalies»,
les indications que l'auteur de la dramatique donne pour situer les lieux
de l'action ainsi que les déplacements des comédiens. Une didascalie
peut ressembler à : «Les sirènes de police se font de
mieux en mieux entendre. Sans se presser, Éric continue de fouiller
la chambre». Le bruiteur prévoit donc deux sons : celui de la
sirène et celui d'objets que l'on brasse. Beaucoup d'autres s'ajouteront
à sa liste !
Pour ce qui est de la télévision, le bruiteur ne se fie pas au texte, mais à l'image : en observant les scènes, il se fait une idée des sons à produire.
» Tâche 2 : Faire la recherche
Pour certaines émissions de radio ou de télévision, le
bruiteur a un travail de recherche à faire. Dans le cas des séries
historiques, par exemple. Il faut que le son colle au lieu, à l'époque
et à l'action. Une automobile des années 40 ne produit pas le
même son qu'une autre des années 80. Une roue de bicyclette circulant
sur l'asphalte ne rend pas le même son qu'une autre roulant sur la terre
battue. Pour se renseigner, le bruiteur utilise des images d'archives. Il
a ainsi une idée de l'environnement, des matériaux en vogue
à l'époque, etc. Il fouille aussi dans des banques de sons.
Une fois que le bruiteur sait quel son il doit produire, la grosse question est de choisir avec quoi ! Premier réflexe : consulter les cédéroms. Ils contiennent des sons préfabriqués, classés par thèmes et numérotés. On y trouve presque tout, du croassement d'une grenouille au hurlement d'un homme qui tombe d'un édifice. Il y a aussi la pluie, le train entrant en gare, la fusillade... Le danger avec les banques de sons : limiter l'univers sonore. Réjeanne reconnaît la provenance de la plupart des sons qu'elle entend au cinéma et à la télévision. Elle peut même y affilier des numéros ! On imagine l'ennui... alors mieux vaut créer des sons de toutes pièces !
Dans son quotidien, le bruiteur est porté à faire faire du bruit aux objets qui l'entourent. Et à écouter, aussi, ce qui lui permet d'affiner son ouïe. Si les bouchons pour les oreilles n'existaient pas, Réjeanne passerait ses nuits à identifier des sons (audio : 39 s) !
» Tâche 3 : Produire les sons
Le bruiteur ne produit pas nécessairement le son avec l'objet réel.
Souvent, de fait, il n'a pas le choix d'inventer un autre moyen : l'objet
est inaccessible (de la neige en été, par exemple) ou le micro,
trop sensible (un bruit de pas dans la gravelle enregistré de trop
près prend des airs d'éboulis...). Le génie d'un bruiteur,
c'est de savoir utiliser les objets les plus banals pour produire les sons
les plus divers. Réjeanne a chez elle tout un bric-à-brac d'«au-cas-où».
Elle l'avoue : elle ne dédaignerait pas de vider les poubelles
pour trouver un bout de tôle ou de verre brisé...
Lors de l'enregistrement des dramatiques radio, le bruiteur s'installe dans le studio, à l'arrière des comédiens, avec ses objets. Il crée les sons que feraient les comédiens s'ils étaient vraiment en action. Des micros enregistrent les bruits, d'autres, la voix des comédiens. S'il y a plusieurs bruits à faire en même temps, comme dans le cas de la sirène et de la fouille, l'un de sons est préenregistré. Le tout est ensuite mixé à l'ordinateur.
Réjeanne a beau connaître les bruits préfabriqués et en créer un paquet elle-même, des trouvailles l'étonnent encore. Quand elle a visionné Parc jurassique, de Steven Spielberg, elle s'est demandé comment on avait fait pour rendre le son de l'éclosion des bébés dinosaures. Elle a fini par apprendre que la bruiteuse avait plongé la main dans un gros melon et écrasé la pulpe du fruit, pendant qu'un micro enregistrait. Comme quoi le métier est avant tout une affaire d'imagination...
Reportage : Jacinthe Bussières