
Du côté de chez Catherine
Insatiable curieuse, Catherine Perrin est à l'écoute des gens pour comprendre la société et découvrir de nouveaux horizons.
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Avec Catherine Perrin
Des manifestants sont descendus dans les rues d'Alger pour dénoncer la tentative du président Abdelaziz Bouteflika de briguer un cinquième mandat.
Photo : Associated Press / Fateh Guidoum
Inédite et historique parce qu'elle touche l'ensemble du pays, qu'elle est plus pacifiste que jamais, qu'elle est non partisane et qu'elle est portée par une jeunesse connectée sur le monde, la révolte des Algériens contre le président Bouteflika s'affirme et devient de plus en plus forte. Nos invités Akli Aït Abdallah, Lamine Foura, Sara Nacer et Nadia Zouaoui croient qu'un renouveau complet du système politique algérien est nécessaire pour apaiser cette tempête.
Ces manifestations sont sans précédent en Algérie à plusieurs égards. Elles sont d'ampleur nationale, elles s'appuient sur des slogans neutres réclamant le pacifisme et la démocratie. Elles rassemblent une jeunesse ultra-connectée, qui est la génération la plus ouverte sur le monde que ce pays ait connu, et qui ne peut plus laisser l’Algérie baigner dans la corruption comme elle l'a toujours fait.
Pour nos invités, la réélection probable de Bouteflika est la goutte qui a fait déborder le vase. Le président est amoindri par la maladie, ne parle plus depuis sept ans et laisse son pays être dirigé par une élite « nébuleuse », souvent qualifiée d'« oligarchie endémique ». Pour les jeunes, cette situation ne peut plus durer.
C'est le cri de révolte d'une « génération sacrifiée », avance Sara Nacer, productrice montréalaise d'origine algérienne, issue de la même génération que la plupart des manifestants prenant d'assaut les rues d'Alger ou d'Oran. La meilleure manière, selon elle, de résumer leur situation est de reprendre l'un des percutants slogans sur leurs pancartes : « J’ai 30 ans, j'ai vécu 10 ans de terrorisme et 20 ans de Bouteflika. » Ils sont les représentants d'une « jeunesse algérienne perdue », ajoute-t-elle.
La documentariste Nadia Zouaoui, qui a séjourné plusieurs mois en Algérie récemment, évoque aussi les problèmes du système d'éducation algérien, qui ne donne pas aux élèves les outils critiques pour appréhender le monde actuel. Les gens qu'elle a rencontrés sur le terrain sont déterminés, selon elle, à transformer profondément le système scolaire.
« Et les révoltés ne sont pas tous jeunes, loin de là. Je pense que la colère actuelle est celle de toute une population. La corruption empêche le pays de fonctionner et engendre une révolte généralisée. »
« C’est le mandat de trop », commente le journaliste Akli Aït Abdallah. Déjà, pour permettre à Bouteflika un quatrième mandat en 2014, il avait fallu amender la Constitution. « Les Algériens sont fatigués d'être humiliés et d’être représentés par ce personnage. Ils n'acceptent plus d'être dirigés par une nébuleuse formée de militaires, d'hommes d'affaires et de gendarmes dont personne ne connaît la réelle identité. Ils se disent qu'ils valent mieux que ça. »
Nos invités s'entendent pour dire que la crise actuelle ne pourra être résolue sans un changement radical du système politique algérien. « Il faudra davantage qu'une opposition de façade, dit Amine Foura. Il faut une nouvelle constitution, et il faut mieux déterminer le rôle que jouera l’armée dans ce nouveau système. »
Depuis l'indépendance du pays, en 1962, l'Armée nationale populaire joue en effet un rôle prépondérant au pays, étant toujours restée très proche du pouvoir et considérée par de nombreux observateurs comme un « État dans l'État ».
Nadia Zouaoui pense qu'il y a de l'espoir au sein de la jeunesse algérienne.
On voit l’impact des réseaux sociaux sur les jeunes. Des jeunes vivant très loin dans les villages sont sortis du salafisme et du wahhabisme en développant une pensée critique sur les réseaux sociaux. Ils s'éloignent de l'islamisme. C'est une bonne nouvelle pour la démocratie.
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