Les femmes journalistes autochtones souvent victimes d'intimidation et de violence
La croisée
Avec Sandra Gagnon
En semaine de 15 h 30 à 18 h
Les femmes journalistes autochtones souvent victimes d'intimidation et de violence

Un des studios du réseau de télévision autochtone APTN.
Photo : APTN
Les femmes autochtones qui exercent le métier de journaliste s'exposent souvent à de l'intimation et de la violence autant de la part de la police que des leaders autochtones, selon un rapport de l'organisme Journalistes pour les droits humains et la Commission canadienne pour l'UNESCO, Liberté de la presse Canada.
Jean Larose, président-directeur général sortant du réseau de télévision autochtone APTN, a constaté ces difficultés particulières auxquelles sont confrontées les femmes journalistes.
Leur situation est souvent très précaire et souvent elles font face à des situations très intenses et très confrontationnelles
, affirme-t-il.
Il décrit des incidents qui lui ont été rapportés où une journaliste a été poursuivie en voiture jusqu'à être forcée de se réfugier dans un fossé pour être ensuite menacée.
Une autre a été menacée par un homme brandissant un bâton de baseball. L'homme lui a dit que s'il n'aimait pas ce qu'elle écrivait, elle en subirait les conséquences.
Il affirme que les hommes journalistes ne sont pas confrontés à des situations aussi extrêmes.
Ces incidents sont devenus assez communs pour que le réseau APTN adopte des mesures particulières pour protéger ses femmes journalistes, explique Jean Larose.
Les femmes ne sont pas envoyées seules dans des communautés où la situation est tendue. Elle est accompagnée par un cameraman ou un autre membre de l'équipe masculin. Dans certains cas, les dirigeants de communautés ou d'organisations ont été avisés de changer leurs comportements et démontrer plus de respect aux journalistes.
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Jean Larose déplore le contexte dans lequel les journalistes doivent travailler et souligne que l'attitude actuelle va à l'encontre des valeurs et rôles traditionnels dans les sociétés autochtones.
Une grande majorité des communautés autochtones étaient sous un système matriarcal dans le passé. [...] On a perdu énormément à se voir imposer un système où ce sont les hommes qui mènent la barque. C'est tout ce traitement colonial qui nous reste à modifier et à retourner à nos propres valeurs.
Il remarque d'ailleurs que beaucoup de femmes jouent un rôle très important dans l'activisme autochtone des dernières années.
Édith Bélanger, journaliste pour Espaces autochtones à Radio-Canada, affirme quant à elle qu'elle est particulièrement prudente quand vient le temps de parler de sujets potentiellement explosifs.
Elle admet qu'il s'agit d'une forme de retenue de sa part pour éviter de s'exposer à des représailles.
Elle affirme avoir été marquée par les violences subies par d'autres femmes journalistes autochtones au Canada.
Édith Bélanger croit également que l'influence des colonisateurs blancs a profondément modifié les rapports entre hommes et femmes dans les communautés autochtones, notamment avec Loi sur les Indiens qui limitait la participation des femmes en politique.
Graduellement, on a appris aux hommes et aux femmes autochtones que le pouvoir, les sujets politiques, ça c'est une affaire d'hommes, alors que c'est à l'opposé de nos valeurs et de notre système traditionnel.
Elle croit que cet héritage colonial explique en partie le peu de femmes qui se lancent en politique dans les communautés autochtones ainsi que le malaise de beaucoup d'hommes par rapport à des femmes qui s'intéressent à des sujets politiques.
C'est comme si on sentait que ce n'était pas notre place
, dit-elle.
Elle souligne également que le travail de journaliste dans les communautés autochtones implique de nombreux défis qui doivent être mieux compris pour adapter le recrutement et les mesures à mettre en place pour assurer un milieu de travail sécuritaire pour les journalistes.
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