En 2018, choisir son costume d'Halloween peut être une question épineuse : se déguiser en portant les signes distinctifs d'une culture étrangère est de plus en plus critiqué. Certains affirment qu'il s'agit d'une appropriation culturelle. Le sociologue Mathieu Wade tente d'éclairer la question.
D’abord, qu’est-ce que l’appropriation culturelle? C’est l’action d’un groupe dominant s’appropriant une culture, un symbole voire une pratique d’un groupe dominé, explique Mathieu Wade.
Ce phénomène serait né selon lui il y a une vingtaine d’années dans la foulée de la mondialisation et du multiculturalisme.
Le sociologue y voit un grand paradoxe : alors qu’on se veut une société ouverte à la diversité et au monde, il faut toutefois respecter la culture de l’autre, établir des frontières et faire attention aux rapports de forces qui existent, explique-t-il.
« Tout est appropriation culturelle »
Si on demande à un Acadien : "Qu'est-ce qui définit la culture acadienne?", il va dire qu'il fait du yoga, qu'il regarde du cinéma américain, qu'il mange du sushi. Est-ce que c’est de l’appropriation culturelle ?
, s'interroge-t-il.
Mathieu Wade explique que certains costumes d’Halloween font réagir puisque pour certains, un costume ne peut résumer voire expliquer toute une culture.
Imaginez que la culture acadienne relativement absente de l’univers anglophone, que les anglophones ne connaissent pas nos artistes, nos débats de société, etc…Soudainement on commence à vendre dans les magasins un costume de la Sagouine.
L’Acadie, continue-t-il, est beaucoup plus que la Sagouine.
« On va dire : "non, on exige de définir par nous-même de définir qui nous sommes" »
Les héros fictifs
Est-ce que vos enfants font de l’appropriation culturelle en se déguisant en Mohana, Mulan ou Aladin, des personnages de Disney issu des Philippines, de l’Asie et du Moyen-Orient ?
Oui, répond-il, si ces personnages fictifs renvoient à une culture qui n’est pas acadienne. Mathieu Wade affirme que l'on crée ses personnages pour que les enfants s’identifient à eux. Ce constat accentue le paradoxe du phénomène, selon lui.
« On va dire à la jeune blonde aux yeux bleus “non tu ne peux pas être Pocahontas parce que tu n’as pas la même race, culture, ethnicité. Ne t’identifie pas à ce personnage-là”. »