« Elle engage les femmes à faire corps avec la société, elle veut les persuader d'acquérir de la force physique et morale », dit Chantal Maillé, professeure à l'Université Concordia en études des femmes et membre de l'Institut Simone de Beauvoir. En compagnie de la directrice de l'Institut de recherches et d'études féministes, Rachel Chagnon, elle parle de la féministe issue des Lumières Mary Wollstonecraft et de son œuvre charnière, Défense des droits de la femme, parue en 1792.
Origine modeste
Née le 27 avril 1759 à Spitalfields, Mary Wollstonecraft meurt le 10 septembre 1797 à Londres, à l’âge de 38 ans, en laissant derrière elle plusieurs essais importants. Thoughts on the Education of Daughters: With Reflections on Female Conduct in the More Important Duties of Life (1787), A Vindication of the Rights of Men, in a Letter to the Right Honourable Edmund Burke (1790) et A Vindication of the Rights of Woman (1792). Sa fille, connue sous le nom de Mary Shelley, est l’auteure de Frankenstein, œuvre pionnière de la science-fiction.
Contre le patriarcat
Inspirée par la pensée des Lumières (18e siècle), autodidacte, elle s’éduque comme elle peut. « Elle regarde la vie en dehors des superstitions et en dehors des religions, ça lui permet d’avancer ses idées sur le statut des femmes. D’avancer l’idée que ce n’est pas vrai que les femmes sont idiotes, contrairement à ce que Jean-Jacques Rousseau défend dans son ouvrage Émile ou de l’éducation, qui faisait école à l’époque », explique Chantal Maillé.
Une visionnaire
Son œuvre est toujours d’actualité, croit Rachel Chagnon. Selon elle, Wollstonecraft se distingue des autres penseurs progressistes de son époque en mettant de l’avant une pensée plus sociale-démocrate que libérale. Elle expose la question des classes sociales et du pouvoir politique et propose, de ce fait, un regard sociologique bien avant Alexis de Toqueville, que l’on considère comme le père de la discipline.
Extrait de son livre, Défense des droits des femmes : « J’espère que, quand on reverra la Constitution, les droits de la femme seront enfin comptés pour quelque chose et respectés comme ils doivent l’être, surtout quand il sera bien prouvé, comme cela ne peut manquer de l’être, que la raison exige que l’on fasse attention à leurs plaintes et réclame hautement justice pour une moitié de l’espèce. » - Mary Wollstonecraft