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Comment la colonisation est passée par la domination sexuelle

Une femme africaine est exhibée dans cette image tirée du livre Sexe, race et colonies.
Une femme africaine est exhibée dans cette image tirée du livre Sexe, race et colonies.PHOTO : Éditions La Découverte
Publié le 12 octobre 2018

Durant six siècles au moins, les colonisateurs ont violé, acheté et réduit au rang d'objets sexuels les femmes des terres conquises, notamment en y organisant la prostitution. Des milliers de peintures et de cartes postales témoignent aujourd'hui de l'intime relation entre la colonisation des pays et celle des corps de leurs habitants. Christelle Taraud, historienne ayant codirigé l'ouvrage Sexe, race et colonies, parle à Catherine Perrin des traces de cette domination dans la pornographie et le tourisme sexuel, mais aussi dans les mentalités des anciennes colonies, comme celle des anciens empires coloniaux.

Selon Christelle Taraud, les femmes ont été les premières victimes de cette domination sexuelle, mais les hommes n’ont pas été exclus. « On sent bien que, comme dans le même temps, en Europe, il y a des crispations très fortes sur ce qu’on appelle le contrôle des bonnes mœurs, qu’il y a criminalisation de certaines pratiques – par exemple, de l’homosexualité –, on voit bien qu’en miroir, les territoires colonisés sont pensés comme des espaces où la liberté sexuelle, particulièrement des hommes blancs […], peut s’exercer sans contrainte », dit-elle à propos des mentalités qui avaient cours au 19e siècle et au début du 20e siècle.

Des couvertures de magazines tirées du livre Sexe, race et colonies

Éditions La Découverte

Récréation sexuelle

« Ces territoires étaient des territoires de récréation sexuelle, au sens large, où l’on pouvait effectivement exercer un certain nombre de pratiques sexuelles qu’on ne pouvait pas, ou qu’on pouvait marginalement, de manière clandestine seulement, [exercer] dans les métropoles coloniales », poursuit la chercheuse.

Très graphique

Dans nombre de ces cartes postales, envoyées par des militaires en poste dans les pays colonisés aux 19e et 20e siècles, on peut voir des hommes enlaçant des femmes du pays en posant des gestes obscènes. « C’est très, très graphique, reconnaît Mme Taraud. Ça a pour vocation de préciser immédiatement la nature du rapport qui s’exerce entre les hommes et les femmes dans ce contexte. Le corps de la femme est-il autre chose qu’un objet encore aujourd’hui dans la grande majorité de nos sociétés? C’est un débat beaucoup plus vaste. »

Une photo d'époque tirée du livre Sexe, race et colonies.

Éditions La Découverte

À la source des stéréotypes

L’historienne réfute les critiques qui reprochent à l’ouvrage de montrer trop de ces scènes. « Il me semblait important de montrer de manière implacable – c’est bien de ça qu’il s’agit – à quel point cette domination visuelle avait pris possession des corps, affirme-t-elle. Une grande partie des stéréotypes qui sont répliqués dans nos sociétés contemporaines sont le produit de cette domination visuelle. »

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