Enseignant pendant 46 ans, le géographe Rodolphe De Koninck s'intéresse de près à l'agriculture et à l'urbanisme. À la retraite depuis peu, il désire « écrire plus et parler moins, pour continuer à expliquer et à montrer aux jeunes que ce n'est pas vrai qu'il faut baisser les bras et qu'il n'y a rien à faire ». Dans cet entretien avec Marie-France Bazzo, il parle avec réalisme de la réorganisation des productions agricoles, de religion et de transmission du savoir.
La géographie, une discipline qui répond à ses questions
Fils de philosophe, Rodolphe De Koninck a grandi dans une famille d’intellectuels où la lecture, les sports et les voyages sont énormément valorisés. Dès l’adolescence, c’est en voyage vers la Californie qu’il développe un intérêt particulier pour la géographie. Il est au hublot et est fasciné par ce qu’il voit, par cette notion de photo aérienne. « Quand on change d’échelle, on voit des processus de plus en plus clairement et de plus en plus confusément, en montant ou en descendant. » C’est ainsi qu’il commence à observer l’étalement urbain et la disposition des champs destinés à l’agriculture.
Sonner l’alarme
Il croit dans le pouvoir explicatif de la géographie. Celle-ci doit savoir émerveiller, mais aussi ouvrir les yeux pour s’inquiéter et critiquer. « Les premiers citoyens de nos villes sont de plus en plus nos voitures. Ça a toutes sortes d’implications quand on voit que les villes se détériorent et s’asservissent aux voitures en adaptant [pour elles] leurs budgets collectifs et individuels, leurs infrastructures, leur mentalité, [dégradant ainsi] l’air qu’on respire. Qui est mieux placé que le géographe pour expliquer l’absurdité de l’étalement urbain? »
Absurdité et mensonges
« Pour moi, l’agriculture telle qu’elle est pratiquée dans le monde témoigne de notre incapacité à bien habiter la planète. » Selon lui, la production mondiale de nourriture est gérée par de mauvais politiciens et par des entreprises néolibérales. Il affirme que ces gens croient à tort que le pétrole est incontournable et qu’il faut produire plus, alors qu’en réalité, on gaspille près du tiers de la production mondiale. « Cette façon [de faire de l’agriculture] est erronée, destructrice et suicidaire. »