En 2012, la petite ville suédoise de Karlskoga, en Suède, a constaté que sa politique municipale en matière de déneigement, telle que conçue depuis des années, était principalement pensée selon les habitudes et les déplacements des habitants masculins. Pire, les femmes subissaient un nombre élevé de blessures lors de leurs déplacements hivernaux. Ce constat a été pris très au sérieux, au point de mener à une modification de la politique de déneigement pour la rendre moins sexiste. Notre journaliste cambrioleuse Hélène Mercier a découvert cette stratégie hivernale qui séduit de plus en plus les municipalités, où le déneigement est un défi. Elle s'informe auprès de Marie-Ève Desroches, doctorante en études urbaines à l'institut national de la recherche scientifique (INRS), sur la possibilité d'appliquer ces mesures dans notre pays.
Les déplacements des habitants ont été observés à la loupe. Alors que les hommes se déplacent majoritairement en voiture sur les grands axes, les femmes multiplient les trajets courts, à pied, et dans un périmètre restreint autour de leurs logements. Autant de temps en extérieur, qui accentue le risque de blessures pour cette partie de la population.
Dans une vision plus égalitaire de la politique locale et pour arrêter de pénaliser les femmes, il a été décidé de commencer par déneiger les rues aux abords des garderies et des écoles, puis des tours à bureau et enfin des grands axes. Le résultat est sans appel : moins de blessures ont été recensées! De nombreuses autres villes, comme Stockholm, ont suivi. Si bien que la question de savoir si ce phénomène est transposable dans notre pays est légitime.
Alertée sur cette vision féministe de la politique de déneigement, la Ville de Montréal admet que ce n’est présentement pas au cœur de la réflexion du plan existant. Le déneigement étant géré par les arrondissements, son organisation répond à des critères d'accessibilité autour du transport actif : on déneige prioritairement les accès aux stations de métros, écoles, hôpitaux, commerces essentiels.
Pour Marie-Ève Desroches, les politiques municipales progressent pour devenir plus égalitaires. Le genre est de plus en plus considéré et accueilli! On est ouvert, mais que met-on réellement en place?
La chercheuse note que cette conception féministe du nettoyage hivernal ne va pas à l’encontre de ce qui est déjà en place chez nous, mais pourrait ajouter des arguments et rehausser la légitimité des mesures existantes.
Chaque vendredi, Hélène Mercier, la journaliste cambrioleuse, nous présente une initiative intéressante adoptée ailleurs dans le monde en se demandant si cette dernière peut être importée à Montréal. Vous avez une suggestion à lui faire? Écrivez-nous : le1518@radio-canada.ca
Références :
Invisible Women: Data Bias in a World Designed for Men (Nouvelle fenêtre) de Caroline Criado-Perez, aux éditions Abrams Books
L’épisode 365 (Nouvelle fenêtre) du balado 99 percent invisible avec Caroline Criado-Perez