Si, aujourd'hui, la métropole foisonne en bibliothèques publiques, ce n'était pas du tout le cas au 19e siècle. En raison des pressions exercées par l'Église catholique, peu de francophones osaient prendre l'initiative de constituer une collection accessible au grand public. C'est ce qui fait dire à l'historien Jonathan Livernois qu'il s'agit d'une histoire « à la fois riche et un peu désespérante ». « On avait beaucoup de retard comparativement aux anglophones de Montréal », dit-il.
Avant l’apparition des bibliothèques publiques, on trouvait toutes sortes de bibliothèques collectives, appartenant à des congrégations religieuses ou à des établissements d’enseignement. Dès 1659, on sait que les religieuses de l’Hôtel-Dieu avaient une petite collection de livres à leur disposition.
Par la suite, il y a eu différents instituts qui ont mis des livres à la disposition de leurs membres : d’abord la Literary and Historical Society of Quebec en 1824, puis la National Historical Society of Montreal l’année suivante, et enfin, le Montreal Mecanics Institute en 1829. Ce dernier était d'ailleurs un lieu de grande importance, selon Jonathan Livernois, puisqu’on s’y réunissait pour discuter, s’informer et s’instruire.
Les collections de ces instituts étaient exclusivement scientifiques et techniques, et elles tentaient de répondre aux besoins de cette époque d’industrialisation. Elles ne représentaient donc aucun intérêt pour le grand public.
Lorsque l’Institut de Montréal a décidé de constituer sa propre collection en y incluant des livres mis à l’index, l’Église a décidé d’embarquer dans le mouvement et de créer le Cabinet de lecture paroissial afin d’offrir de la lecture inoffensive aux fidèles.
Mais à la fin du 19e siècle, de plus en plus de voix s’élevaient pour réclamer de vraies bibliothèques publiques, notamment du côté des chroniqueuses dans les journaux.
Il faut cependant attendre 1892 pour voir la première bibliothèque publique sur le territoire montréalais, à Westmount.
Chez les francophones, l’Église était encore trop influente à cette époque pour que de telles bibliothèques voient le jour. La Ville de Montréal refuse même une subvention du philanthrope américain Andrew Carnegie, qui souhaitait financer la construction d’une bibliothèque publique dans la métropole.
En guise de compensation, en 1903, Montréal met sur pied une bibliothèque technique uniquement destinée à former la main-d’uvre.