Montréal a longtemps rêvé d'avoir une tour. L'historien Jean-François Nadeau parle même d'une « obsession montréalaise ». Pendant près d'un siècle, la ville envisagera une multitude de projets, dont l'emprunt de la tour Eiffel de Paris.
Quand on apprend que Montréal accueillera l’Exposition universelle de 1967, l’idée d’une tour rejaillit pour une énième fois dans la tête des Montréalais. Le caricaturiste Robert Lapalme convainc alors son ami Jean Drapeau, maire de la métropole, d’essayer d’emprunter la tour de Gustave Eiffel à Paris, raconte Jean-François Nadeau.
Une demande officielle est envoyée en France, mais le souhait du maire Drapeau ne se concrétisera pas, comme l’explique l'historien : « L’administration française finit par répondre, de façon très diplomatique, mais en rigolant un peu : "Bien sûr, nous vous la prêtons, si vous pouvez garantir que vous préserverez l’intégralité des 60 tonnes de peinture, des 18 038 pièces de métal, des 2,5 millions de rivets, que vous nous déménagez ça et que vous la remettrez telle quelle. »
Plusieurs projets qui n'ont jamais abouti
Cette anecdote n’est qu’un exemple parmi tant d’autres des tentatives de Montréal de se doter d’une tour. Dès 1896, un ancien architecte de la Ville présente un projet de tour de 500 pieds, dans laquelle il voit des restos, des salons de coiffure et des espaces récréatifs.
« Pour ces gens-là, ça prenait une tour pour que Montréal soit considérée à la hauteur des grandes capitales. »
Dans les années 1950, c’est le projet d’une tour inclinée qui voit le jour. Le maire Jean Drapeau espère l’installer dans le Vieux-Port, près de l’endroit où sont déchargés les navires. On pense même utiliser le contrepoids de la tour pour faciliter le déchargement, précise Jean-François Nadeau. Encore une fois, le projet ne se concrétisera pas.
Une tour pour le stade olympique
Il faut attendre les années 1970, et l’annonce des Jeux olympiques à Montréal, pour que le projet de tour si cher à Montréal puisse aller de l’avant. L’architecte français Roger Taillibert conçoit alors une tour inclinée, destinée à accueillir des salles multifonctionnelles vouées au sport.
« Il y a des problèmes structuraux assez importants qui vont empêcher que ça soit terminé pour 1976, pas juste des problèmes d’organisation technique comme on le pense », signale Jean-François Nadeau.
La tour du stade olympique sera finalement terminée dans le milieu des années 1980. Au lieu d'installations sportives, elle accueille en ce moment les bureaux du Mouvement Desjardins.
Si la structure a gardé son aspect incliné, les plans de Roger Taillibert ont été beaucoup modifiés, mentionne l’historien : « On a changé la courbure de la tour. Taillibert avait prévu que la lumière allait entrer par le dessus pour ne pas aveugler les sportifs, mais on en a finalement fait des bureaux. Avec du béton, on peut faire des courbures plus facilement qu’avec des fenêtres. Il a fallu tout réajuster ça. »