Le concept de « réfugié climatique » n'est pas reconnu par la Convention de Genève de 1951. Or, pour la première fois, le Comité des droits de l'homme de l'ONU a précisé que de retourner des demandeurs d'asile dans leur pays d'origine alors que leur vie est menacée par la crise climatique « pourrait exposer ces personnes à une atteinte à leurs droits », et on entend ici leur droit à la vie. Quelle est la portée de cette décision? Entrevue avec François Gemenne, directeur de l'observatoire Hugo sur les migrations, l'environnement et les relations internationales à l'Université de Liège et membre du GIEC.
Si cet avis de l’ONU est important, il n’est pas contraignant et il est déjà appliqué dans les faits par certains gouvernements, comme cela a été le cas après le tremblement de terre en Haïti, par exemple. Le problème avec les changements climatiques est que bien qu’ils soient irréversibles, ils sont très lents. Le caractère immédiat d’une menace à fuir ne s’applique donc pas.
« Ma crainte, si l'on présente systématiquement les choses comme un risque futur ingérable, c’est que plutôt que de traiter de la situation d’émigration, les États ont tendance à renforcer le contrôle à leurs frontières et à avoir des politiques de plus en plus restrictives. Et que, finalement, ça alimente un sentiment xénophobe. Donc, mon message c’est : nous avons les moyens dès à présent d'organiser et de gérer ces déplacements. C’est uniquement si nous attendons au dernier moment que ça va devenir ingérable. »
Mais combien de réfugiés climatiques doit-on prévoir? Sera-t-on en mesure de gérer l'ampleur de la crise à venir?
« Tout va dépendre des mesures que l’on va mettre en place aujourd'hui : à la fois pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre, mais également pour permettre l’adaptation dans les zones du monde qui seront touchées par les impacts des changements climatiques. Ça pourra aller de plusieurs dizaines à plusieurs centaines de millions, ça va dépendre de ce qu’on va faire maintenant. »