En cette journée internationale de la visibilité trans, les membres la communauté constatent que bien des préjugés sont encore présents dans la société.
La porte-parole d’Entraide trans Saguenay-Lac-Saint-Jean, Claude Amiot, en appelle à l’ouverture et à la compréhension. En entrevue à l’émission C’est jamais pareil, elle a raconté son parcours et a expliqué à quel point l’organisme l’a aidée dans sa transition.
Cette journée-là est quand même assez récente. J’avais 61 ans donc ça fait sept ans. C’est une accumulation parce que pendant 60 ans de ma vie, je me suis cachée. Le ressenti existe dans mon cas depuis l’âge d’environ quatre ans. À ce moment-là, il n’y avait pas de mots. On ne parlait pas de dysphorie de genre et de ces choses-là. Il y avait un besoin de féminité et de féminin pendant des années où même l’homosexualité était une maladie
, a-t-elle témoigné.
Avec une éducation religieuse et dans un contexte familial machiste, Claude Amiot ne pouvait s’affirmer comme elle aurait aimé le faire.
Grâce à certaines personnes qui ont ouvert des portes, comme Russel-Aurore Bouchard et Marie-Ève Guay, elle estime que le chemin a été débroussaillé pour bien des personnes qui, comme elle, ont obtenu un diagnostic de dysphorie de genre.
« Une bonne journée, j’ai compris que c’était possible et au début de la cinquantaine, quand j’ai entendu le mot dysphorie de genre et que j’ai entendu au sujet de Kathleen Jenner, je me suis dit : " Ok, je ne suis pas malade, je ne suis pas obsédée". Parce que je me sentais malade mentale. »
Pour aller mettre les poubelles au chemin un soir, elle a retiré ses vêtements féminins de peur d’être vue dans des habits qu’elle portrait toute la journée.
C’est à partir de ce moment que j’ai décidé d’être bien dans ma peau et de m’extérioriser.
Je n’aurais jamais mis les pieds dehors avec un vêtement féminin parce que j’avais trop honte. Je me suis dit que j’allais avertir ma patronne parce que j’avais commencé à aller faire l’épicerie ou des choses [habillé en femme]. Je voulais que la direction le sache parce que je n’étais pas prête à faire un coming out public
, a-t-elle relaté.
Des années à vivre dans le mensonge
Claude Amiot a vécu pendant des années dans le mensonge. Personne ne se doutait qu’elle était trans.
La journée internationale de la visibilité est importante, selon elle, parce qu’encore beaucoup de préjugés subsistent. Entraide Trans a permis à Claude Amiot d’être elle-même.
Quand ça a été fondé, j’ai eu la chance d’être là dès la première rencontre, où je me suis présentée garçon. À la deuxième rencontre, pour la première fois de ma vie, je sortais de façon féminine. C’est cette organisation-là qui m’a permis d’être la femme que je suis aujourd’hui et qui m’a permis de m’extérioriser comme je le fais aujourd’hui
, dit Claude Amiot, qui invite les gens qui amorcent une transition à prendre contact avec un organisme.
Elle estime qu’un bon nombre de personnes trans vivent encore cachées et animées de la peur de se faire juger, ce qui peut rendre leur quotidien infernal.
« Quand je suis arrivée dans le bureau de l’endocrinologue, il m’a dit qu’il y avait deux peaks : la jeune vingtaine et la soixantaine. La majorité du temps, les enfants sont élevés, le divorce est prononcé et ils n’ont plus de vie publique, donc c’est plus facile pour eux de vivre dans leur genre. »
L’intimidation est un souci constant pour Claude Amiot et elle souhaite sensibiliser les gens à l’importance de ne pas porter de jugement.
Qu’est-ce qu’on a de si différent que les autres. On est dans une famille. On va à l’école, on a une famille, on a un métier. Comme moi, on a des enfants et des petits-enfants. Prenez-le temps de nous découvrir. On a une vie particulière. N'essayez pas de comprendre, c’est en nous, c’est de naissance. Prenez le temps de nous découvrir
, plaide-t-elle.
Un bon allié de la communauté LGBTQ+ est un quelqu'un qui accepte et qui respecten ces personnes telles qu'elles sont, selon Claude Amiot.
Il s'agit d'utiliser les bons prénoms et les bons pronoms, sans trop s'excuser en cas d'erreur. Ce n'est pas grave
, pointe-t-elle.
« Si on regarde ce qu'il se passe ailleurs dans le monde, notre liberté est fragile. Je trouve ça affreux, c'est un manque de compréhension. Il faut constamment être aux aguets si on veut conserver nos beaux acquis au Québec »
Avec les informations de Frédéric Tremblay et Béatrice Rooney