Le 16 mars 1968, dans le hameau de My Lai, environ 500 civils, dont des femmes, des enfants et des bébés, ont été tués de sang-froid par un groupe de soldats de l'armée américaine. Ce n'est qu'en novembre 1969 que les Américains ont appris avec consternation l'horrible événement. La politologue Karine Prémont raconte comment ce massacre a été un tournant dans la guerre du Vietnam et la façon dont l'armée a tenté de le cacher.
Menée par le capitaine Ernest Medina, la compagnie à l’origine du massacre arrive au Vietnam à la fin de 1967. En quelques mois, la moitié de ses soldats se font tuer lors d’embuscades ou par des mines. La troupe carbure à la vengeance de ses camarades morts et veut pourchasser et enlever la vie à tous les sympathisants de l’ennemi.
Le jour du massacre, une trentaine des 105 soldats de la compagnie d’Ernest Medina tirent sur des innocents et mettent le feu à leurs maisons. L’officier Hugh Thompson arrive sur les faits en hélicoptère et ordonne à son mitrailleur de faire feu sur les soldats qui s’en prennent aux civils. Alerté par radio, un lieutenant ordonne à Medina de cesser le carnage.
L’armée et le gouvernement tentent de minimiser la tuerie
À la fin de 1969, les Américains apprennent avec révolte le massacre de My Lai dans les journaux, puis à l’émission 60 minutes, qui diffuse des témoignages de soldats. À une époque où environ 1500 Américains meurent par mois au Vietnam, il y a un déclin de confiance envers les institutions politiques et militaires américaines.
« Le massacre de My Lai va réussir à catalyser tout le mouvement antiguerre aux États-Unis. »
Une commission d’enquête créée par l’armée en septembre 1969 arrive un peu tard. Mise au courant du carnage par un caporal, la Maison-Blanche veut éviter un scandale. Le président Nixon discrédite les gens qui ont fait connaître l’événement, dont le photographe Ronald Haeberle, en disant qu’ils contribuent à renforcer l’opposition à la guerre du Vietnam.
L’impunité des hauts dirigeants
Pendant son enquête sur le massacre de My Lai, l’armée inculpe 25 personnes, dont le second lieutenant William Calley et le capitaine Ernest Medina. Finalement, la justice militaire retient seulement Calley comme coupable du meurtre de 22 civils à My Lai. Il écope d’une peine de prison à perpétuité, ce qui provoque un tollé aux États-Unis.
Même les opposants à la guerre du Vietnam protestent contre l’emprisonnement de Calley. On condamne le fait qu’on se serve de cet officier comme bouc émissaire. Devant la protestation, le président Nixon décide de réduire la peine de Calley, qui obtient une libération conditionnelle en 1974.