Issey Miyake était connu dans le monde pour ses vêtements graphiques et son plissé unique. La sociologue Valérie Harvey, spécialiste du Japon, explique pourquoi ses créations n'étaient ni japonaises ni occidentales, mais universelles.
Né à Hiroshima en 1938, Issey Miyake a 7 ans quand la bombe atomique détruit la ville et tue 140 000 personnes. Il est donc un hibakusha, une victime des bombes atomiques larguées par l’armée américaine en 1945. « On dit que 80 % des victimes ont caché leur état », précise Valérie Harvey.
Plus tard, Issey Miyake étudie à Tokyo « dans une grande université des beaux-arts ». Par la suite, il part à Paris en 1968 pour un stage d’un an. Mai 1968 change sa vision de la mode. Désormais, il veut démocratiser ses vêtements.
Il effectue plusieurs séjours en France et quelques-uns aux États-Unis. Une fois revenu au Japon, il fonde le Miyake Design Tokyo en 1970. C’est le début de son succès.
Issey Miyake mélange des matériaux modernes moins nobles comme du plastique et du fil de fer à des matériaux traditionnels japonais, tels du papier artisanal, du tissu. Il mélange aussi les techniques, comme le pliage de l’origami. « Miyake cherchait à faire le vêtement du vent, raconte Valérie Harvey. Il allait chercher une relation entre le tissu et le corps. »
« Comme on a reconstruit les villes japonaises [après la Seconde Guerre mondiale], il va intégrer lui aussi des matériaux modernes avec des matériaux plus traditionnels de la mode. »
Un célèbre col roulé
Steve Jobs, le cofondateur d’Apple, avait adopté son col roulé noir. Pour cette création, Issey Miyake désirait un confort, une liberté de mouvement : « Le vêtement ne prend pas la place du message. Le vêtement suit la personne qui parle », soutient Valérie Harvey. Steve Jobs avait commandé une centaine de ces cols roulés, à 175 $ chacun.
Par la suite, le créateur de mode accroît sa popularité lorsqu’il met sur le marché le parfum l’Eau d’Issey, qui est à son image, donc « aérien », « léger » et « clair ».
Toute sa vie, Issey Miyake est demeuré un homme discret. La stigmatisation créée par le statut d’hibakusha l’a fortement marqué. Il n’en a jamais parlé parce qu’il souhaitait penser à des choses qui allaient être créées et non détruites. « Je pense que Miyake peut être une inspiration pour plusieurs personnes », affirme la sociologue Valérie Harvey.