Recelant bien plus que le léger badminton sentimental lourdement raconté à l'origine du mot « marivaudage », l'œuvre du mystérieux dramaturge, romancier et journaliste est aussi celle des luttes de pouvoirs, du détail et de la cruauté, selon Benoît Melançon. Le professeur de lettres raconte à Jacques Beauchamp qu'il a fallu attendre les metteurs en scène du 20e siècle, près de deux siècles après la mort de l'écrivain, pour en avoir une lecture plus juste.
Né Pierre Carlet en 1688, ce fils de fonctionnaire royal étudie le droit, puis se dote d’un nom grandiloquent typique des hommes de lettres avant de se lancer dans différentes formes d’écriture : le journalisme personnel, le roman et le théâtre.
Ses romans (Le paysan parvenu, La vie de Marianne) traitent de la difficulté de réussir quand on ne vient pas de la noblesse. Ses pièces (Le jeu de l’amour et du hasard, Le triomphe de l’amour, Les fausses confidences) scrutent le sentiment amoureux, de sa naissance à son aveu.
Second regard
Prisé par le public de son vivant, son théâtre est aussi vivement critiqué pour sa langue tarabiscotée, notamment par Diderot et Voltaire. Si bien qu’après sa mort, en 1763, il tombe dans l’oubli.
Au milieu du 20e siècle, l’écrivain Claude Roy et le metteur en scène Jean Vilar posent un nouveau regard sur Marivaux. Selon eux, il faut s’accrocher au côté sombre de son propos.
« Si l'on entre dans le détail du texte de Marivaux – ce qui est absolument passionnant et nécessaire pour en faire une analyse littéraire –, on se rend compte de l’immense complexité de scènes qui sont, en apparence, toujours les mêmes. »
Dans ce segment, Benoît Melançon raconte la manière particulière avec laquelle Marivaux a publié ses romans, par ailleurs inachevés et terminés par d’autres écrivains que lui, et analyse la structure particulière de ses pièces.