Au 19e siècle, il avait une importance comparable à celle qu'ont aujourd'hui Félix Leclerc et Gilles Vigneault. Premier auteur québécois reconnu par l'Académie française, il s'est imposé avec une poésie romantique finement ciselée, mais il a aussi, comme conteur, mis en valeur le folklore et le joual à une époque où les écrivains tournaient le dos à cette langue. Claude La Charité, professeur de littérature, explique à Jacques Beauchamp que l'admiration de Louis Fréchette pour Victor Hugo a parfois atteint des proportions gênantes.
Né à Lévis en 1839 d’un père agriculteur, il exerce d’abord la profession d’avocat, mais ne réussit pas à faire sa marque. C’est néanmoins pendant ses études en droit qu’il commence à écrire de la poésie alors qu’il vit dans une mansarde, à Québec. Son premier recueil, Mes loisirs, est publié en 1863.
Poète en exil
Il essaie ensuite de publier des journaux, mais s’endette au point de contempler la faillite et d’être emprisonné. Il fuit donc à Chicago pendant six ans, de 1866 à 1872, et publie le recueil La voix d’un exilé. À son retour, il fait de la politique et devient député libéral, mais ne parvient pas à se faire réélire.
Son ouvrage Les fleurs boréales, paru en 1879, change tout pour lui. Célébration de la nature et de la nation canadienne-française, le livre est récompensé du prix Montyon de l’Académie française. C’est la première fois que la prestigieuse institution accorde un prix à un Québécois. Au pays, c’est la consécration : Fréchette est dès lors enseigné à l’école.
En mission
Le poète, en retour, se sent investi du devoir de représenter ses origines. En 1887, il publie La légende d’un peuple, une série en trois parties sur l’histoire du Québec, de la Nouvelle-France au régime anglais.
Lorsqu’il se rend à Paris pour recevoir son prix, il est reçu par son auteur préféré, Victor Hugo, et constate avec tristesse que le maître ignore tout du Canada. De retour au Québec, Fréchette, un polémiste ayant sa part d’ennemis, clive l’opinion. Certains prétendent que le prix qu’il a reçu n’est qu’une distinction mineure. Un dénommé William Chapman publie par ailleurs une série d’articles qualifiant Louis Fréchette de plagiaire.
La seule faute du poète pourrait bien être d’avoir singé la posture de Victor Hugo. Selon Claude Lacharité, il reprend avec maladresse certains effets de l’auteur des Misérables.
Face cachée
Louis Fréchette publie également des recueils de contes dans lesquels il montre une autre facette de sa personnalité. D’une langue châtiée et littéraire, il passe alors à une langue truculente et populaire.
« Fréchette fait une utilisation très intelligente de ce matériau précieux qu’est le français populaire québécois de la fin du 19e siècle. C’est aussi pour lui une façon de renouer avec ses origines, parce que Louis Fréchette, bien qu’il soit devenu un personnage très respectable avec un rayonnement international, avait des origines modestes. »
Après sa mort, en 1908, son éditeur ne réédite que ses poésies, et non ses contes. Pour cette raison, c’est d’abord comme poète qu’on s’en souvient.
Selon Claude Lacharité, la langue grandiloquente de Louis Fréchette peut paraître un peu vieillotte pour notre époque. Il reste tout de même, aux côtés d’Émile Nelligan et d’Octave Crémazie, l’un des poètes québécois les plus importants du 19e siècle.