Un pacte pour rassembler de façon durable l'Allemagne et la France, qui avaient déjà croisé le fer trois fois en moins d'un siècle : voilà l'objectif premier du traité de Rome, ratifié en mars 1957. Cet accord a donné naissance à la Communauté économique européenne (CEE) et il a misé sur le commerce pour faciliter l'union entre des nations qui se regardaient souvent en chiens de faïence. Le professeur Joseph Yvon Thériault résume la naissance de l'Europe et des institutions qui la régissent.
Cette ouverture des frontières économiques, officialisée dans une salle du Capitole à Rome, s'est faite près de six ans après une première opération européenne visant à établir un marché commun. En 1951, un traité sur l’acier et le charbon jetait les bases de cette entente plus large.
La paix à tout prix
Le traité de Rome est l’idée d’une poignée d’hommes politiques de France, d’Allemagne, du Luxembourg, des Pays-Bas, de l’Italie et de la Belgique. Konrad Adenauer, chancelier d’Allemagne de l’Ouest de 1949 à 1963, était le seul homme d’État à faire partie de ce comité.
« C’était une idée très humaniste à la base. La dimension économique était quasiment instrumentale. L’idée, c’était de faire la paix. On espérait que le commerce unifie ensuite les cultures. »
Malgré les bonnes intentions soutenant le traité, le général Charles de Gaulle envisageait celui-ci d’un mauvais œil. Les Allemands, de leur côté, y voyaient une manière nouvelle de s’émanciper de leur lourd passé.
Des réussites
Cette convention avait eu aussi pour but d’aider l’Europe à reprendre des forces, après avoir perdu beaucoup de plumes pendant la Seconde Guerre mondiale.
Au cours des 60 ans de cette union européenne, des traités (à Lisbonne, à Maastricht, etc.) ont été signés pour modifier l’approche des institutions européennes mises en place.
Le passage à l’euro, en 2002, a été l’un des moments les plus importants de l’Europe en tant qu’entité. Et peut-être sa plus grande réussite. Il a fallu quatre ans pour y arriver. L’euro a instauré l’idée qu’il existait désormais une liberté économique en Europe.
Par ailleurs, un autre tour de force a été accompli pendant ces années : il n’y a pas eu de guerres entre les pays signataires.
Des failles, des divorces
L’euroscepticisme a été présent dès les premières heures de la construction de l’Europe. Certaines nations ont reproché à l’Union européenne de n’être gérée que par des groupes de fonctionnaires aucunement redevables aux différentes nations pour lesquelles ils agissaient.
Après des années de calme relatif, cet euroscepticisme a repris de l’ampleur récemment.
« Aujourd’hui, il y a un déficit démocratique, note le professeur en sociologie, l’Europe sociale ne s’est pas développée. On a réussi à bâtir un marché d’échanges économiques très prospère, mais il n’existe pas de peuple européen. Les débats se font encore selon les lignes de partage des pays. »
Et en juin 2016, une large fissure s’est ouverte sur l’Europe avec le Brexit, instaurant l’idée d’un départ de la Grande-Bretagne de l’Union européenne. Il s’agit d’une crise très importante qui ébranle l’idée d’unifier politiquement les nations du continent.