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Les cobayes de Sainte-Justine

Des chercheurs ont bâclé une étude clinique sur des enfants

Des chercheurs de l’Hôpital Sainte-Justine voulaient développer un traitement de la dernière chance pour enfants cancéreux. Mais ils ont tourné les coins ronds et n’ont pas respecté le protocole de recherche. Santé Canada a dû intervenir en catastrophe.

Par Pasquale Turbide d’Enquête

4 octobre 2018 | access_time MINUTES DE LECTURE

Léna était leur deuxième fille et son diagnostic de tumeur du tronc cérébral, en mai 2015, a ravagé cette famille unie. Pharmaciens tous les deux, Mai Pham et Toan N’guyen savaient qu’il s’agissait d’une condamnation à mort.

Lorsque des médecins de Sainte-Justine, à Montréal, leur proposent de faire de Léna la première patiente d’une nouvelle étude clinique, ils acceptent. Parce que ne rien faire est intolérable, mais aussi parce qu’ils trouvent important de contribuer à l’avancement des connaissances sur le cancer. « Quand vous tombez dans le vide avec votre fille, il faut espérer un remède ou prier le ciel », explique la mère de Léna.

« Dans le vide, vous essayez d’attraper n’importe quoi. Et c’était l’étude. »

- Mai Pham, mère de Léna

Et si c’était à refaire aujourd’hui? « Peut-être que l’on serait allés ailleurs, dans un autre hôpital », murmure Mai Pham.

L’étude clinique va dérailler.

Léna souriante dans un manège
Léna, avant son diagnostic, dans une grande roue à Montréal Photo : Courtoisie de la famille de Léna

Un an après l’ouverture de l’étude, Santé Canada investit le pavillon Charles-Bruneau, réservé aux enfants cancéreux. L’agence fédérale vient de recevoir une plainte anonyme au sujet de l’étude clinique. Durant six jours, des inspecteurs saisissent des dossiers, fouillent dans les ordinateurs et interrogent des employés.

Quelques semaines plus tard, la conclusion est brutale. Santé Canada suspend l’étude clinique, censée offrir « un espoir de survie » aux enfants souffrant d’un cancer avancé. Au moment de sa suspension, cinq des six participants étaient déjà décédés… dont Léna, 9 ans.

Lors de l’inspection en novembre 2016, les agents de Santé Canada identifient 76 violations de tout genre, dont 23 de niveau critique, « constituant un danger pour les sujets ou un risque excessif qui menace leurs droits, leur santé et leur sécurité ».

« C’est quand même un sacré paquet de violations », explique le Dr Jonathan Finlay, chercheur et directeur du département de neuro-oncologie au Nationwide Children Hospital, un des plus importants hôpitaux pédiatriques des États-Unis. « Ça révèle un encadrement et une surveillance médiocres », ajoute-t-il.

« La décision de Santé Canada de suspendre était absolument appropriée. Ne pas le faire aurait été injustifiable. »

- Dr Jonathan Finlay

La suspension d’un projet de recherche est une sanction rare. Sur 337 inspections réalisées par Santé Canada de 2012 à 2018, seules cinq ont entraîné la suspension de l’étude clinique.

Chimiothérapie périmée

C’est un coup dur pour Sainte-Justine. Pour la première fois, l’institution voit l’un de ses projets de recherche suspendu. Cette étude clinique était aussi la première entièrement conçue et mise sur pied à l’interne, sans supervision d’une compagnie pharmaceutique.

L’étude, appelée DEC GEN, cherchait à mesurer l’effet combiné de deux molécules : la DÉCitabine, une forme de chimiothérapie, et la GÉNistéine, un dérivé de la protéine de soya. Cette combinaison avait déjà été testée sur des adultes à l’hôpital Notre-Dame, mais à des doses réduites.

Dans sa lettre de suspension, Santé Canada souligne que « des effets indésirables graves et des décès » n’ont pas été signalés par les chercheurs, ce qui constitue une contravention à la Loi sur les aliments et drogues. « Il n’a pas été démontré qu’une dose [de chimiothérapie] sécuritaire a été établie », estime Santé Canada.

Au moins une déviation de protocole concernait directement Léna. Comme deux autres patients, la fille de Mai et de Toan a reçu une dose de chimiothérapie périmée. Son dossier médical révèle que le chercheur principal de l’étude, le Dr Henrique Bittencourt, a ordonné de continuer la perfusion malgré le dépassement de l’heure d’expiration.

Sainte-Justine estime aujourd’hui que quelques minutes de dépassement, sur une perfusion de 24 h, ne font pas de différence sur l’efficacité ou la toxicité de la chimiothérapie.

La famille de Léna, souriante, avec des ballons de fête
Léna (en bas) avec son frère et ses parents lors du défilé du père Noël Photo : Courtoisie de la famille de Léna

Mais les parents, scientifiques de formation, savent que pour obtenir des résultats valides, il faut respecter le protocole. « Le résultat final des études [DEC GEN], je pense qu'on peut mettre des points d'interrogation là-dessus », estime Toan N’guyen.

« Ils ont absolument raison, confirme l’éminent chercheur et oncologue Jonathan Finlay. Ça remet en question chaque résultat, qu’il soit positif ou négatif. »

Malgré cet accroc au protocole, Léna n’a pas subi d’effets nocifs.

Effets secondaires non signalés, personnel mal formé, documentation incomplète et inexacte : les rapports de Santé Canada dressent le portrait d’une étude clinique mal construite et désorganisée.

Selon Sainte-Justine, il y avait « beaucoup d’incompréhensions » de la part de Santé Canada envers l’essai clinique. Pour l’hôpital, les problèmes soulevés étaient d’ordre « administratif ».

Cette affirmation fait sursauter le directeur de l’unité d’éthique biomédicale de la Faculté de médecine de l’Université McGill, Jonathan Kimmelman. « Quand vous faites de la recherche scientifique, la tenue de registres, c’est absolument critique. Nous devons être méticuleux. Si vous faites des erreurs dans vos comptes rendus, ça bloque la chaîne de connaissance du laboratoire local jusqu’aux autres chercheurs. Ce n’est pas trivial du tout », dit-il.

Le mirage de la rémission

Jenifer n’était plus une enfant. À 20 ans, elle avait combattu deux leucémies et enduré cinq traitements de chimiothérapie, en plus d’une greffe de moelle. Au printemps 2016, elle a désespérément besoin d’une seconde greffe, mais son cancer ne lui laisse aucun répit.

Jenifer, souriante, pose avec son chien
Jenifer et son chien Alice en 2015 Photo : Courtoisie de la famille de Jenifer

Ses médecins de l’Hôpital de Montréal pour enfants lui suggèrent DEC GEN, une nouvelle étude clinique en cours à Sainte-Justine. Jenifer est anxieuse et fatiguée, mais l’espoir l’anime toujours, se souvient sa mère Sylvana. « Même si elle était inquiète, elle montrait qu’elle était encore positive. Elle avait encore du courage, elle voulait sauver sa vie », dit-elle.

Fin avril, Jenifer se rend avec sa famille rencontrer le Dr Yvan Samson, qui doit lui présenter l’étude. Cette étape est importante et délicate, car le chercheur se doit d’être transparent sur les buts de la recherche et sur ses véritables possibilités de bénéfices... et de risques.

L’étude DEC GEN est une étude expérimentale de « phase 1 », mentionne à quelques reprises le Dr Samson. « La chance qu’il y ait un bénéfice est très très faible », explique Bryn Williams-Jones, directeur des programmes de bioéthique de l’école de santé publique de l’Université de Montréal. « Le but premier n’est pas de traiter la maladie. Il s’agit d’une intervention expérimentale qui vise à développer des connaissances. »

« C’est un peu comme donner son corps à la science. Ce n’est pas un traitement. »

- Bryn Williams-Jones, éthicien

Mais ce n’est pas du tout ce que Jenifer et sa famille comprennent ce jour-là. « On a parlé de la rémission. C’était le mot-clé, parce que c’était vraiment ce qu’on voulait [...] C’était vraiment important pour nous [...] parce qu’elle avait besoin d’une autre greffe », se souvient sa mère Sylvana.

Jenifer et sa famille lors d’une activité de collecte de fonds pour le cancer
Jenifer et sa famille avaient amassé 75 000 $ pour la recherche contre le cancer Photo : Courtoisie de la famille de Jenifer

Au lieu de prendre des notes, la famille a enregistré l’entretien.

« Le but de cette combinaison de médicaments, c’est de provoquer une rémission et ensuite ils pourront faire une autre greffe de moelle », explique le Dr Samson dès les premières minutes de la rencontre. « Si vous n’êtes pas en rémission après le premier cycle, on pourra vous en donner un deuxième ou un troisième, aussi longtemps que vous en aurez besoin pour être en rémission. Jusqu’à 12 cycles de traitement », ajoute-t-il.

Or, aucun patient n’avait reçu plus de deux cycles de traitement jusque-là.

Le mot « rémission » a été prononcé neuf fois au cours de la rencontre d’environ une heure et demie. Neuf fois de trop, selon l’éthicien Bryn William-Jones, qui a lu la transcription complète.

« C’est un mot qui a une charge émotionnelle. Quand on [veut] sauver notre enfant, surtout dans un contexte où l’on a épuisé toute autre intervention, on cherche n’importe quel espoir », explique-t-il, ajoutant qu’il faut éviter d’utiliser un langage manipulateur, surtout quand on a peu d’autres options.

« La rémission, c’est la petite carotte qui nous tire dans une autre direction. Ça peut être une influence indue. Ça, c’est dangereux. »

- Bryn Williams-Jones, éthicien

La famille avait d’autres options, car Jenifer avait déjà été acceptée dans une étude aux États-Unis. Ce sont les perspectives de rémission qui auraient fait la différence.

Le Dr Yvan Samson a refusé de répondre aux questions de Radio-Canada. Mais son chef de service, le Dr Michel Duval, estime qu’avec « les données qu’on avait en laboratoire et les données des premiers patients, on pouvait tout à fait espérer que, pour certains patients, on observe une rémission ».

Avant tout, Jenifer voulait qu’on lui dise la vérité. « Pendant toutes ces discussions avec tous les médecins, à travers les années, elle disait : "Dis-moi quelles sont mes chances, dis-moi ce que je dois savoir." Elle ne voulait pas être protégée », explique son père, Catalin.

Vous avez des informations à nous transmettre? Contactez notre journaliste : pasquale.turbide@radio-canada.ca

Pression indue

Lors de la rencontre avec la famille de Jenifer, le Dr Samson semblait pressé. « Nous pourrions le faire aujourd’hui, nous avons réservé la salle avec l’anesthésiste. Mais nous avons besoin de faire une ponction lombaire et une de la moelle osseuse avant de commencer le traitement. Ça peut donc être fait aujourd’hui », dit-il.

« Vous avez déjà fait la réservation », s’étonne la mère de Jennifer, ajoutant que sa fille n’a pas mangé depuis minuit. « On peut la nourrir par voie intraveineuse ou vous pourriez prendre un 7 UP ou un jus de pommes », répond une infirmière présente.

« C’est de la pression indue! », s’insurge l’éthicien Bryn Williams-Jones, à l’écoute de l’enregistrement. « On a déjà prévu une intervention pour le début de l’étude et ils n’ont pas encore signé le consentement, ils n’ont pas encore décidé s’ils veulent le faire. »

« C’est inadmissible. Rien n’aurait dû être déclenché avant que la personne signe le consentement éclairé. »

- Bryn Williams-Jones, éthicien

À la suite de cette offre, le Dr Samson mentionne à Jenifer qu’une guérison est improbable et lui propose de réfléchir quelques jours. Il lui dit même qu’il n’y a pas d’urgence. Elle lui répond qu’elle préférerait effectivement attendre. Jenifer craignait les effets d’une sixième chimiothérapie et voulait réfléchir, selon sa famille.

Les membres de la famille de Jenifer, souriants, les uns à côté des autres
Jenifer (en haut à gauche) et sa famille lors d’une fête familiale Photo : Courtoisie de la famille de Jenifer

Jenifer aura finalement mis près d’un mois avant d’accepter d’entrer dans l’étude. Elle sera la quatrième patiente et la première leucémique de DEC GEN.

L’expérience est de courte durée. Son état se dégrade rapidement et on diagnostique une infection fongique, un effet secondaire fréquent chez les patients leucémiques en chimiothérapie. L’infection envahit rapidement ses bronches et bloque ses voies respiratoires.

Moins d’un mois après son entrée dans DEC GEN, Jenifer meurt d’un épisode de détresse respiratoire aiguë et des suites de sa maladie le 23 juin 2016. Le choc est immense pour sa mère Sylvana. « Dans notre tête, c’était le cycle du premier mois, puis on allait revoir les résultats. Après ça, on [allait] décider des prochaines étapes. C’était un choc, c’était comme un cauchemar. »

« J’espère que ce qu’on a fait, [...] ça va être utilisé pour avoir de meilleures informations pour l’avenir. Mais il faut tenir compte que, derrière ça, il y a des humains, pas seulement des éprouvettes. »

« On ne veut pas être des cobayes. Et si on est des cobayes, qu’on le sache », dit le père de Jenifer, troublé.

Comme pour tous les autres cas, c’est Radio-Canada qui a appris à la famille de Jenifer que l’étude DEC GEN avait été suspendue par Santé Canada.

Sainte-Justine estime avoir bien agi dans les circonstances. « C’est une question qu’on s’est posée [...] Notre interprétation des faits, c’est qu’on n’a pas mis en danger les enfants, on n’a pas eu d’impact sur la survie [...] Ce n’était pas nécessaire d’appeler les familles pour les tarabuster avec ça. »

Le dernier patient

Guillaume dans son lit d’hôpital avec des jouets et un chandail du Canadien de Montréal
Guillaume, 5 ans, en décembre 2015. Il venait de recevoir son diagnostic. Photo : Courtoisie de la famille de Guillaume

Trois mois après le décès de Jenifer, Guillaume, 5 ans, devient le dernier patient de l’étude DEC GEN. Au moment de l’inscrire, ses parents ne savent pas que la plupart des patients précédents sont décédés.

« On nous a dit que c’était expérimental, mais on ne nous a jamais parlé des autres patients », se souvient Richard, le père de Guillaume.

Richard hésite, car l’état de santé de son fils décline rapidement. Mais sa mère Sylvie voit les choses autrement. « Il y a toujours des revirements. Des miracles, ça existe », se disait-elle. Elle y aura cru jusqu’à la dernière minute.

Avant DEC GEN, Guillaume avait subi six traitements de chimio pour contrôler une leucémie incontrôlable.

Juste avant son entrée dans l’étude, son état se dégrade. « Il était très faible, il n’avait plus de tonus. Au mois de septembre, quand on est arrivé à l’hôpital, il ne marchait plus. Ça prenait tout pour lui donner son bain », se souvient sa mère.

Sylvie porte un masque, couchée à côté de son fils Guillaume
Guillaume et sa mère Sylvie en avril 2016 Photo : Courtoisie de la famille de Guillaume

Le jour de son admission à DEC GEN, les reins de Guillaume fonctionnent si mal qu’il est exclu de l’étude pour deux semaines. Mais neuf jours plus tard, les médecins donnent à nouveau le feu vert. Guillaume remplit, en principe, tous les critères d’admissibilité à l’étude. Pourtant, les analyses de sang révèlent un autre problème : la lipase, une enzyme du pancréas, dépasse les limites permises au protocole, la bible de l’étude clinique.

Cet écart a été jugé « cliniquement non significatif ». Pour cette raison, le médecin de Guillaume a maintenu sa participation dans l’étude.

Il s’agit d’une erreur, selon l’éminent chercheur et oncologue Jonathan Finlay. « Ce patient n’aurait pas dû être inclus dans l’étude. Si le protocole ne permet pas un taux élevé de lipase, il faut respecter les règles. Nous n’avons pas le droit d’en dévier », dit-il.

Le traitement de Guillaume ne durera que cinq jours. Comme pour la plupart des patients, il faut arrêter DEC GEN prématurément.

Danger dans les tuiles

Le 7 octobre, le père de Guillaume fait une troublante découverte. « Un soir, je donne le bain à mon garçon. Je suis en train de le laver et je lève les yeux au plafond. Je suis tombé quasiment sans connaissance », raconte Richard Daraîche.

« Les tuiles au plafond étaient pleines de moisi. C’était tout noir. »

- Richard, père de Guillaume

Des tuiles au plafond sont brunes
Plafond de la salle de bain de Guillaume à Saint-Justine Photo : Richard Daraîche

Il réagit tout de suite. « Je suis allé au poste des infirmières demander si c’était normal que, dans une chambre d’enfant sans système immunitaire, que l’on ait des tuiles qui ne sont pas saines. »

Le personnel condamne la porte de la salle de bain avec du ruban adhésif et une serviette. On offre à la famille de changer de chambre, mais elle préfère rester dans la chambre, la seule qui puisse accueillir tout le monde en cette période difficile. Personne ne leur indique qu’il serait dangereux de demeurer dans cette chambre, selon les parents.

Trois jours plus tard, de petits points se mettent à apparaître sur le corps de Guillaume. Ils prolifèrent rapidement et finissent par recouvrir son corps en entier, et même sa bouche, sa gorge et son nez.

Le petit Guillaume, couché, a la peau recouverte de boutons
Guillaume atteint d’une infection fongique Photo : Courtoisie de la famille de Guillaume

Un souvenir douloureux pour ses parents. « On ne pouvait pas y toucher. Il était vraiment sensible. Il avait mal partout, on ne pouvait plus le prendre. Tu ne veux pas voir ton enfant comme ça », se souvient sa mère, Sylvie Bélisle.

Les analyses révèlent qu’il s’agit d’une infection fongique causée par un champignon très rare, le fusarium.

Pour un enfant leucémique qui n’a plus de système de défense, c’est presque une condamnation à mort, explique le Dr Michel Laverdière, directeur du département d’infectiologie de l’Hôpital Maisonneuve-Rosemont pendant 35 ans. L’infection de Guillaume était « massive » et « excessivement sévère », dit-il.

« Le champignon envahit le sang et va aller s'installer là où on va bien vouloir l'accueillir : dans les poumons, le foie, la rate, les reins, le cerveau, la peau. »

- Dr Michel Laverdière

Le champignon filamenteux vient-il du plafond de la salle de bain? Impossible de le savoir sans tester un prélèvement de la tuile, explique le Dr Laverdière.

Or, Sainte-Justine n’a pas testé la tuile en question. « Comme ce sont des infections qui sont transmises par l'air, on teste l'air », explique l'hôpital pour enfants, qui ajoute que les analyses réalisées n’ont pas relevé la présence de champignon filamenteux dans la chambre de Guillaume.

Quelle que soit l’origine du champignon, le Dr Laverdière déplore les conditions imposées à Guillaume et à sa famille. « C'est une situation qui est dangereuse. L'individu qui se retrouve dans cet environnement peut aspirer des spores, de la moisissure qui est en suspension, et développer des infections fulgurantes, et même, éventuellement, fatales. »

Guillaume Daraîche est décédé le 8 novembre 2016. C’est en fouillant dans son dossier médical que ses parents ont appris que la fusariose était considérée comme la première cause de son décès. Son certificat de décès stipule aussi qu’il est mort de leucémie.

La mort de Guillaume est survenue le dernier jour de l’inspection de Santé Canada qui a mené à la suspension de DEC GEN.

Guillaume et son père dans une voiture
Guillaume et son père Richard Photo : Courtoisie de la famille de Guillaume

La patience de Santé Canada

La suspension de DEC GEN n’a pas marqué la fin de cette saga. Tout au long de 2017, les chercheurs de Sainte-Justine ont cherché à faire annuler la décision de Santé Canada.

Enquête a obtenu une grande partie de la correspondance entre les deux institutions. En mars, juin et novembre, l’agence fédérale somme les chercheurs d’expliquer leurs erreurs et de changer leurs procédures pour améliorer la qualité de leur essai clinique.

« C’est très bizarre », s’étonne l’oncologue Jonathan Finlay, qui travaille au Nationwide Children’s Hospital. « Je ne connais pas le fonctionnement de Santé Canada, mais aux États-Unis, on ne se serait pas engagé dans un dialogue. On aurait fermé ça tout de suite. J’ai trouvé Santé Canada très patient », dit-il.

L’agence fédérale a d’ailleurs révisé certains de ses constats. Après la réception des conclusions d’un expert mandaté par Sainte-Justine, Santé Canada précise maintenant que les effets secondaires étaient conformes au protocole et que les décès ont été causés par la maladie.

Pour sa part, l’hôpital pour enfants maintient que la vie et la santé des enfants n’ont pas été mises en danger par l’étude.

Mais dans sa dernière lettre à Sainte-Justine, Santé Canada persiste et signe : il était approprié de suspendre l’essai clinique, étant donné les résultats de l’inspection.

Mise à jour

Nous avons ajouté que le certificat de décès de Guillaume stipule aussi qu’il est mort de leucémie.

Vous pouvez regarder en rattrapage le reportage d'Enquête sur l’hôpital Sainte-Justine sur le site de l'émission.

Yanic Lapointe réalisateur équipe Enquête, Pasquale Turbide journaliste, Melanie Julien chef de pupitre, Gaétan Pouliot journaliste, André Guimaraes développeur et Francis Lamontagne designer

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