L’agente de renseignements « n’était pas bienvenue » au MTQ, dit Poëti

Robert Poëti répond aux questions des journalistes le 18 mai.
Photo : La Presse canadienne / Jacques Boissinot
Prenez note que cet article publié en 2016 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
L’ancien ministre des Transports Robert Poëti, qui a embauché l’agente de renseignements Annie Trudel, dit que celle-ci n’était pas particulièrement bien accueillie au ministère des Transports durant son travail.
Le mandat de Mme Trudel consistait à conseiller le ministre des Transports pour assurer l’intégrité du ministère, de ses employés et de ses processus, et pour s'assurer de la conformité des attributions de contrats. Or, Mme Trudel a démissionné en avril dernier, dénonçant dans sa lettre de démission le manque de collaboration de la part du nouveau cabinet après le départ de Robert Poëti en janvier.
Dans cette lettre, qui a été rendue publique, Mme Trudel laisse entendre qu'on a saboté son travail et elle évoque des difficultés pour obtenir de l'information.
En entrevue à Radio-Canada, l’ancien ministre Poëti, maintenant député, souligne que même à l’époque où il était ministre des Transports, l’agente de renseignements n’était pas toujours bienvenue lorsqu’elle souhaitait rencontrer des gens. « Quand j’étais là, j’ai dû lui faire ouvrir des portes. À plusieurs occasions. »
Plusieurs personnes au ministère étaient toutefois prêtes à collaborer, insiste-t-il. M. Poëti dit que, à son départ du ministère, il a fait part de ses « inquiétudes » à son remplaçant, Jacques Daoust, et qu’il lui a dit qui étaient les « alliés sur qui il pouvait compter, parce qu’il y en avait beaucoup au ministère ».
Une lettre de M. Poëti à son successeur datée du 27 avril et rendue elle aussi publique témoigne de son impatience parce que, trois mois après qu'il eut perdu son poste, « aucune requête provenant du cabinet, ou du nouveau ministre, pour faire une transition ou, minimalement, s'informer des dossiers qui étaient en cours ou sur le point d'être traités n'a été signifiée ».
Est-il possible que Jacques Daoust n’ait pas été aussi empressé que lui de permettre à Mme Trudel de bien remplir son mandat? M. Poëti croit qu’il faut lui « laisser le temps d’arriver », mais avoue être inquiet à la lecture de la lettre de démission de Mme Trudel.
Si certaines personnes travaillaient pour ne pas lui permettre d’obtenir de l’information, ça, ça m’inquiète.
« Il apparaît dans cette lettre-là qu’elle n’a pas été reçue facilement. En tout cas, c’est l’interprétation que je fais de cette lettre-là. C’est qu’elle ne sentait pas les portes ouvertes. »
M. Poëti dit qu’il avait embauché Annie Trudel spécifiquement parce qu’il voulait s’assurer que l'obligation de rendre des comptes était respectée au sein du ministère des Transports. « Tant qu’elle a été là, moi, j’étais rassuré. On avait de l’information. »
« Elle était issue de l’UPAC, elle avait travaillé sur plusieurs dossiers. […] D’ailleurs, c’est M. Duchesneau qui me l’avait référée parce qu’elle avait même travaillé au ministère des Transports à l’époque. »
Satisfait de la tournure des événements
Admettant que la semaine qui vient de s'écouler a été difficile, M. Poëti se dit toutefois satisfait des mesures annoncées jeudi par le gouvernement Couillard, soit le départ de la sous-ministre aux Transports, Dominique Savoie, du chef de cabinet de Jacques Daoust, Pierre Ouellet, et de la création d'un poste d'inspecteur général au MTQ.
« J'ai confiance dans la nomination d'un inspecteur, de la vérificatrice générale [qui va se pencher sur la gestion du MTQ, NDLR], de la nouvelle administration qui va s'installer pour donner confiance dans nos institutions, et à l'UPAC. C'est beaucoup d'éléments en même temps », a-t-il dit.
La bonne nouvelle, c'est que suite aux décisions du premier ministre, [...] on a donné des outils, des moyens à mon successeur – en fait plus que j'aurais aimé moi-même, pour être honnête – pour être capable d'aller de l'avant. Qui est gagnant là-dedans? C'est les citoyens.
Saluant la « décision instantanée » prise jeudi par le premier ministre Couillard, M. Poëti dément tout désaccord avec ce dernier. « Ma relation avec lui ces derniers jours a été très bien, très correcte », affirme-t-il. Il assure en outre avoir « l'appui de l'ensemble du caucus » libéral.
« Oui, c'est une semaine trouble. On n'aime pas ça, on aurait aimé que ce soit autrement. Mais quand on regarde la résultante, c'est peut-être la définition même de libéral : c'est d'être capable d'être en désaccord sur certains points, mais de continuer d'avancer », conclut-il.
Couillard assure que Poëti a sa confiance
Le premier ministre Philippe Couillard assure pour sa part que Robert Poëti jouit toujours de sa confiance. Il estime que les entrevues que son ex-ministre donne depuis jeudi sont « de grande qualité ».
« J'ai vu ses sorties publiques où il témoigne de sa satisfaction devant les directions qui sont prises, autant sur le plan des gens que sur le plan des politiques, la mise en place de l'inspecteur général », a-t-il ajouté.
Robert, c'est une partie importante de mon équipe. Je suis en contact avec lui. On est vraiment dans une direction qui est très positive. Je crois que cette page est tournée maintenant. Et il faut aller de l'avant.
Relancé sur la controverse des derniers jours, il a refusé net d'envisager de donner des directives à l'Unité permanente anticorruption (UPAC). « Je ne veux même pas mettre le début d'un pas dans la politisation des activités de l'UPAC », a-t-il dit.
« Si on arrive à un régime politique où les politiciens ou les élus donnent des instructions à un organisme comme l'UPAC, c'est très dangereux pour la démocratie. Il faut vraiment les laisser libres d'assumer leurs décisions, de prendre leurs décisions », a poursuivi M. Couillard.
« Et le dirigeant de l'UPAC est régulièrement dans les forums, dans les commissions parlementaires, il peut s'expliquer », a-t-il conclu.