Déterminer l'âge de l'eau pour mieux la protéger

Photo : Radio-Canada/Découverte
Prenez note que cet article publié en 2016 pourrait contenir des informations qui ne sont plus à jour.
Des chercheurs de l'UQAM travaillent à mettre au point une méthode capable de déterminer l'âge de l'eau souterraine, qui représente pas moins de 98 % de l'eau douce sur la planète. Mieux la décrire permettra peut-être de mieux protéger cette ressource vulnérable, menacée par les pompages excessifs, la pollution et les changements climatiques. Explications.
Après une averse, 10 % de l'eau s'infiltre dans le sous-sol. Selon le trajet emprunté, il s'écoule un an, 10 ans, 100 ans, 1000 ans avant qu'une seule goutte d'eau rejoigne un cours d'eau, comme une rivière. Ce délai, c'est ce que les hydrogéologues appellent l'âge de l'eau.

Photo : Radio-Canada/Découverte
Dans les 10 à 20 premiers mètres d'eau se trouvent des eaux très récentes, qui ont en général quelques années ou quelques dizaines d'années. Cette eau alimente ensuite de façon continue les lacs et les rivières. « La recharge des nappes d'eau souterraine va pousser ces eaux et les ramener à la surface », explique l'hydrogéologue Florent Barbecot.
Ce dernier, avec ses collègues de l'UQAM, forment l'une des rares équipes dans le monde à travailler sur la datation de l'eau. Une méthode qui permet de comprendre comment les éléments extérieurs modifient et influencent la recharge des eaux souterraines.
À lire aussi :
Les molécules d'eau ont la capacité de traîner tout ce qu'elles rencontrent durant leur parcours. Ces indices, une fois identifiés, permettent de remonter dans le temps.
Un exemple? Les chlorofluorocarbures ou CFC
Utilisés entre autres dans la réfrigération, dans la climatisation et comme propulseurs dans les aérosols, les CFC dans l'eau indiquent qu'une partie de la recharge est récente, car l'utilisation de ces produits n'a débuté qu'après 1950.
Le reportage de Danny Lemieux et Pier Gagné a été présenté à l'émission Découverte à ICI Radio-Canada Télé.
Les traceurs du genre sont peu nombreux; une douzaine tout au plus. L'interprétation des données demande un an de travaux, mais une fois qu'elle est terminée, les résultats obtenus sont d'une incroyable richesse.
Ça va nous donner des informations sur la période de recharge de la nappe, sur l'altitude de la recharge, si ça s'est passé en vallée ou en montagne et puis sur l'origine des masses d'air.
L'analyse renseigne aussi sur la végétation arrosée par les précipitations. Même la saison où elles se sont produites est déterminée. Des informations remarquables pour évaluer l'impact des changements climatiques, grands responsables de la recharge de nos aquifères.

Des chercheurs prélèvent des échantillons d'eau.
Photo : Radio-Canada/Découverte
Connaître l'âge d'une nappe d'eau souterraine permet d'évaluer sa vulnérabilité. Une fois puisée, l'eau souterraine sert à la consommation humaine, à l'agriculture et à l'industrie.
D'ailleurs, la moitié de la population mondiale dépend des eaux souterraines pour subvenir à ses besoins. La datation de l'eau permet justement d'évaluer les risques d'assèchement. La source d'eau est-elle sous pression? Puise-t-on trop d'eau par rapport à sa capacité de recharge? Une information cruciale pour les embouteilleurs d'eau, par exemple.
Répondre à cette question, c'est le rôle du géochimiste Daniele Pinti.

Les chercheurs ont découvert sur la planète des eaux qui ont des milliers d'années, voire des dizaines de milliers d'années. Ainsi, si les humains exploitent trop la ressource, ils devront attendre des milliers d'années avant qu'elle se renouvelle.
La datation de l'eau représente donc un outil de gestion incroyable pour une ressource naturelle qui subit une pression planétaire.
Le saviez-vous?
Au Québec, les aquifères sont en bonne santé. Ils alimentent environ 80 % de la population rurale.