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P.K. Subban et le CH : six ans plus tard, toujours au même point

P.K. Subban a affiché de la frustration après la défaite des siens.

P.K. Subban a affiché de la frustration après la défaite des siens.

BILLET - Ces derniers jours, au terme d'une longue discussion avec un dirigeant d'une équipe de la LNH, j'ai tout bonnement lancé cette question : « Comment trouvez-vous la saison de P.K. Subban? »

Un texte de Martin LeclercTwitterCourriel

À l'autre bout, il y a eu une sorte de soupir.

« Il a connu un bon départ, mais, honnêtement, je trouve qu'il joue depuis quelques mois le pire hockey de sa carrière. Je crois sérieusement que Subban était meilleur qu'il ne l'est présentement quand il jouait pour les Bulldogs de Hamilton (en 2009-2010) », a répondu mon interlocuteur, du tac au tac.

« Ses couvertures défensives font défaut, il est indiscipliné et il prend des décisions qui n'ont pas d'allure avec la rondelle. On s'attend à ce qu'un joueur qui touche à la rondelle 30 fois par match commette des revirements. C'est normal. La game de Subban a toujours comporté une certaine part de risque. Mais là, il bat tous les records. L'autre soir, je l'ai vu tenter de déjouer un rival, alors qu'il était le dernier joueur de son camp et que trois joueurs adverses se dressaient entre lui et son plus proche coéquipier. C'est la LNH. Tu ne peux pas jouer de cette façon », a répondu mon interlocuteur, sans la moindre émotion.

***

Appuyons maintenant sur la touche « accélérer ».

Nous sommes mercredi soir à Denver. Le pointage est de 2 à 2, il reste à peine 2 minutes à jouer. Le CH est sur la route. L'équipe vient de subir deux défaites, elle tente désespérément de sauver une saison catastrophique et a besoin de mettre des points en banque.

P.K. Subban reçoit la rondelle à la ligne bleue de l'Avalanche sur le flanc droit. Son équipe est bien installée en zone offensive. Dans cette situation, le manuel Gestion de rondelle 101 est on ne peut plus clair : le défenseur doit minimiser les risques et favoriser le jeu qui a le plus fort taux de réussite en refilant le disque à un coéquipier placé au fond de la zone adverse ou, dans le pire des cas, simplement placer la rondelle au filet, ou encore dans un coin de la patinoire. Les défenseurs de 14-15 ans savent cela.

Mais P.K. Subban choisit plutôt le jeu le plus risqué. Il longe la ligne bleue sur 90 pieds en essayant de déjouer d'une main le jeune Mikhail Grigorenko. Ce dernier lui soutire habilement la rondelle et, cinq secondes plus tard, le pointage est 3-2 pour le Colorado. Jeu, set et match.

De retour au vestiaire, P.K. Subban enfile sa casquette de P.K. Subban et affiche fièrement son slogan « Change the game ». Et il raconte aux journalistes que si ce jeu était à refaire, il essaierait... de ne pas perdre l'équilibre! Le hic, c'est qu'il s'était fait soutirer la rondelle bien avant de tomber sur la patinoire.

***

Appuyons maintenant sur la touche « rembobiner ».

Nous sommes le 26 janvier au Centre Bell. Les Blue Jackets de Columbus sont en ville. La veille, à Columbus, Subban s'est comporté comme un poltron. Après avoir déjoué le gardien des Blue Jackets pour créer l'égalité d'un tir chanceux et voilé de la ligne rouge, il s'en est pris à Brandon Dubinsky et a écopé d'une incroyable pénalité d'indiscipline.

Ce fameux soir du 26 janvier, au Centre Bell, il se passe quelque chose de différent. Pour la toute première fois de sa carrière, la foule montréalaise hue à tue-tête le défenseur numéro un du CH, qui connaît un match gênant.

En milieu de deuxième, au moment où le pointage est de 2 à 1 pour les Blue Jackets, P.K. Subban tente de déjouer deux joueurs adverses derrière le filet du Canadien. Cam Atkinson lui soutire le disque (Subban perd l'équilibre peu après) et une seconde plus tard, Dubinsky fait 3 à 1 Columbus.

Avant que P.K. Subban obtienne un contrat de huit ans d'une valeur totale de 72 millions et devienne le plus haut salarié de l'histoire du CH, Jean-Jacques Daigneault et Michel Therrien clouaient occasionnellement leur arrière numéro un au banc pour le rappeler à l'ordre. Depuis la signature de ce fameux contrat, les entraîneurs ont changé leur approche. Ils ont inclus Subban dans le noyau de meneurs de l'équipe et lui ont confié un rôle d'adjoint au capitaine en espérant que son statut et ses responsabilités allaient l'inciter à placer les intérêts de la collectivité avant les siens.

Mais le défenseur n'est toujours pas considéré comme un meneur dans ce vestiaire. Après les matchs, certains de ses coéquipiers hochent la tête, incrédules, lorsqu'ils le voient se dépêcher à enfiler la casquette de sa marque de commerce avant de s'adresser aux médias. On déplore qu'il privilégie la promotion de sa personne, alors que l'organisation, dont il est le plus haut salarié, préfère que ses employés arborent le logo du CH.

Ça fait maintenant six ans que les plus vieux coéquipiers de Subban déplorent ses manifestations d'égocentrisme. Et on en est rendu au point où même des niaiseries semblables attirent l'attention des membres de l'équipe.

Lors de ce fameux match du 26 janvier, donc, constatant que Subban joue encore avec une partition différente de celle de l'équipe, les entraîneurs adoptent une stratégie différente. Ils noient le poisson et le renvoient sans cesse sur la patinoire. En fin de troisième, au moment où le pointage est 3-2 pour Columbus, le no 76 provoque un autre revirement et les Blue Jackets mettent le match hors de portée du CH. Jeu, set et match...

***

À la tombée de la nuit mercredi soir, les réseaux sociaux étaient en feu. Quelques confrères, surtout anglophones, vilipendaient Michel Therrien pour avoir osé clouer Subban sur le banc, alors que le CH avait besoin d'un but pour corriger la bévue élémentaire que son défenseur numéro un venait de commettre.

« Therrien défend Markov de toutes ses forces et, à la première occasion, il lance Subban sous l'autobus », a spectaculairement dénoncé l'un d'eux.

Cette saison affreuse est en train de prendre un drôle de virage parmi la presse sportive montréalaise. D'un côté, il y a ceux qui lisent les statistiques avancées d'une seule main et qui idolâtrent Subban. De l'autre, il y a ceux qui voient ce qui se passe sur la patinoire et qui entendent de drôles de choses émanant du vestiaire.

En début de semaine, l'animateur radiophonique Ron Fournier a déclenché un tonnerre de réactions en déclarant que, selon ses informations, P.K. Subban est la plus grande source de discorde au sein du vestiaire du Canadien.

Et, toujours selon Fournier, c'est un groupe de joueurs de premier plan qui en a plein le dos.

J'aimerais bien comparer mes notes avec celles de Ron. Peut-être a-t-il aussi appris que Subban ne s'est pas aidé, récemment, en rabrouant son capitaine devant tous ses coéquipiers. Les mêmes coéquipiers qui, il y a quelques mois, ont reconnu l'ascendant de Max Pacioretty en l'élisant capitaine par une forte majorité.

***

La question n'est pas de savoir si P.K. Subban est un bon défenseur. La réponse coule de source.

La question n'est pas de savoir si P.K. est sympathique. Il l'est.

Et la question n'est pas de savoir si tous les membres d'une équipe sont obligés de s'aimer d'un amour tendre pour connaître du succès. Encore là, la réponse est évidente.

En fin de compte, par contre, le temps est peut-être venu de se demander pourquoi, près de sept ans après son arrivée à Montréal, ces constats, ces histoires embarrassantes et ces désolants débats continuent de coller à la peau de P.K. Subban.

N'êtes-vous pas tannés de cela? Il y a deux ans, je demandais dans cette chronique à quel moment le CH allait enfin pouvoir cesser de jouer à la mère avec P.K. Subban? (Nouvelle fenêtre) Et la situation ne semble pas avoir changé.

P.K. Subban est âgé de 26 ans et est le plus haut salarié de la plus prestigieuse équipe de hockey au monde. Comment se fait-il qu'après toutes ces années, il se retrouve encore au centre d'un pareil freak show?

Quand un joueur gagne 500 000 $ par année et qu'il ne rame pas dans le même sens que ses coéquipiers, c'est le joueur fautif qui est en sérieuse difficulté. Mais quand un athlète a en poche un contrat de 8 ans d'une valeur de 72 millions et qu'il ne rame pas dans le même sens que les autres, c'est l'équipe qui le paie qui a un sérieux problème.

Six ou sept ans plus tard, tristement, le CH et P.K. semblent encore se trouver au point de départ. On le trouve bon, on l'aime et on sait qu'il peut faire encore mieux. Et ceux qui l'entourent continuent d'espérer qu'un jour, il cessera de jouer uniquement pour lui.

À toute épreuve, le blogue de Martin Leclerc.

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