Bébés échangés à la naissance dans le nord du Manitoba : Santé Canada enquêtera

Luke Monias (à gauche) et Norman Barkman (centre) ont été échangés à la naissance en 1975
Photo : ICI Radio-Canada
La ministre fédérale de la Santé Jane Philpott a demandé à ses fonctionnaires d'enquêter immédiatement sur les cas de Luke Monias et Norman Barkman, deux hommes qui ont récemment découvert qu'ils ont été échangés à leur naissance dans un hôpital du nord du Manitoba.
« Je peux assurer tous les Canadiens que Santé Canada examinera les préoccupations qui ont été soulevées par M. Narkman et M. Monias », a affirmé la ministre Philpott par voie de communiqué.
La province du Manitoba avait joint sa voix à celles de Luke Monias et Norman Barkman pour demander la tenue d'une enquête fédérale après avoir confirmé que les deux hommes avaient été échangés à leur naissance dans un hôpital du nord du Manitoba.
Une erreur qui a duré 40 ans
Selon la province, l'erreur s'est produite il y a 40 ans dans un hôpital géré par le gouvernement fédéral, à Norway House, dans le nord du Manitoba.
Luke Monias et Norman Barkman sont nés dans le même établissement le 19 juin 1975. Leurs mères, Rosamund Monias et Rebecca Barkman, étaient toutes deux des résidentes de la Première Nation Garden Hill qui avaient voyagé à Norway House pour accoucher.
Les deux hommes auraient grandi ensemble et ont toujours senti qu'ils appartenaient à la famille de l'autre. De nombreux membres de la petite communauté avaient même remarqué que les deux garçons ressemblaient aux membres de la famille de l'autre plutôt qu'à la leur.
« On m'a toujours dit que j'avais l'air d'un Barkman. Même Norman pensait que je ressemblais à son père, que c'était comme regarder dans un miroir. »
Quarante ans plus tard, Luke Monias a décidé de mettre un terme aux rumeurs et a convaincu Norman Barkman et Rebecca Barkman de subir un test ADN.
Ils ont reçu le 10 novembre les résultats du test qui confirmaient que Rebecca était la mère biologique de Luke et qu'elle n'avait aucun lien biologique avec Norman.
Les deux hommes demandent la tenue d'une enquête sur les circonstances qui ont mené à cette erreur, une requête appuyée par le gouvernement du Manitoba.
« Je veux que le gouvernement fédéral lance une enquête pour déterminer pourquoi et comment c'est arrivé, dit Luke Monias. J'aimerais avoir des réponses, pour moi et ma famille. »
Le ministre des Affaires autochtones et du Nord du Manitoba, qui a aidé Luke Monias dans sa quête pour élucider le mystère, s'est dit bouleversé par les résultats. « C'est choquant et incroyable, mais c'est malheureusement vrai, dit Eric Robinson. Ils ont perdu leur identité et l'impact sur leurs familles et la communauté est immense. »
« On a volé l'identité à deux enfants innocents. »
« Les vies de Luke, Norman et leurs familles ont été déchirées de manière irréversible », soutient le ministre. « Ce n'est pas une erreur qui peut être réparée simplement à ce stade-ci. Il ne sera pas facile pour ces familles de continuer leurs vies avec ces nouvelles révélations. Leur bien-être psychologique, physique et spirituel a été profondément touché. »
Liens familiaux à reconstruire
Luke Monias dit que les résultats des tests ADN n'ont fait que renforcer les liens qu'il partageait déjà avec Norman Barkman. « Il est encore mon frère, peu importe ce qu'on peut en dire, affirme Luke Monias. On se connaît depuis toujours, ça ne va rien changer entre nous. Mais j'aimerais apprendre à mieux connaître la famille Barkman. »
Luke aura l'occasion de mieux connaître sa mère biologique, Rebecca Barkman, qu'il a toujours connue en tant que la mère de son meilleur ami.
Norman n'aura pas cette chance parce que sa mère biologique, Rosamund Monias, est décédée avant d'apprendre l'existence de l'erreur. Son père biologique, Isaiah Monias, est toujours vivant.
Un cas isolé?
Le ministre Eric Robinson avoue qu'une enquête fédérale sur cette histoire pourrait ouvrir une boîte de Pandore. « C'était une chose après l'autre : les pensionnats autochtones, la rafle des années 60 (...) et je me demande si c'est possible que ce soit arrivé à quelqu'un d'autre? »
Eric Robinson ajoute qu'il a déjà communiqué avec de la ministre fédérale des Affaires autochtones, Carolyn Bennett, qui lui aurait assuré sa pleine coopération.